Combien vaut une vie humaine  ? Au moins 200 000 $, et peut-être plus, selon les règles qui régissent l’indemnisation des proches des victimes d’un écrasement d’avion.

D’ici quelques jours, les familles de chaque victime de l’écrasement du vol d’Ukraine International Airlines, près de Téhéran mercredi dernier, devraient déjà recevoir un paiement anticipé de 30 000 $ CAN en aide d’urgence, versée par la compagnie aérienne.

Puis, les proches pourront recevoir une somme additionnelle de 170 000 $ en prouvant qu’ils ont subi des préjudices. Ils pourront aussi obtenir une somme supplémentaire du gouvernement iranien, qui a reconnu être responsable de l’écrasement.

L’avocat Gérard Samet, spécialisé notamment dans les recours en cas d’accident aérien, a répondu à nos questions sur le fonctionnement du système d’indemnisation. Me Samet a défendu des familles de victimes de l’écrasement du Concorde, en France, en 2000, et d’un vol d’Air Algérie au Mali, en 2014, où des Canadiens ont péri.

Que prévoient les règles internationales pour les proches des victimes ?

Dans les deux semaines après un accident mortel, les compagnies aériennes doivent verser l’équivalent de 30 000 $ CAN aux ayants droit de chaque victime (conjoint, enfants, parents, frères, sœurs). Puis, une somme supplémentaire de 170 000 $ CAN est prévue, sur présentation de documents décrivant les préjudices moraux, économiques ou traumatiques. C’est la Convention de Montréal, un traité adopté en 1999 par les États membres de l’Organisation aérienne civile internationale (OACI), qui balise l’indemnisation des victimes de catastrophes aériennes.

Quel est le processus pour toucher l’indemnisation ?

Les proches des victimes doivent préparer un dossier prouvant leurs préjudices Jusqu’à 200 000 $ CAN, ils doivent s’adresser à la compagnie aérienne. Au-delà de 200 000 $ CAN, et si la compagnie n’est pas entièrement responsable de l’écrasement, c’est le responsable de l’accident (ici le gouvernement iranien) qui devra assumer la facture.

À quelles instances doivent-ils s’adresser ?

Des poursuites judiciaires visant à la fois la compagnie aérienne ukrainienne et l’Iran peuvent être déposées devant les tribunaux ukrainiens, iraniens ou canadiens – pour les proches des passagers qui se rendaient au Canada, ou encore devant les tribunaux du pays de la résidence principale de la victime. « Même si les familles habitent en Iran, elles peuvent s’adresser aux tribunaux canadiens, dans le cas d’une victime qui avait pris l’avion à destination du Canada », explique Gérard Samet. « À elles de choisir le tribunal qui leur semble le plus indépendant. »

À combien les indemnités peuvent-elles s’élever ?

Il n’y a pas de limite. Les sommes versées peuvent varier selon les cas et les situations familiales. Par exemple, lors de l’écrasement du Concorde, en 2000 près de Paris, les 700 « ayants droit » des 100 passagers et 13 membres d’équipage morts se sont partagé 114 millions d’euros, à l’issue d’un accord à l’amiable. Les indemnisations variaient de 115 000 euros à 7,6 millions d’euros par ayant droit. Les accords à l’amiable sont généralement confidentiels, mais le magazine français L’Expansion avait publié à l’époque les montants des indemnisations versées.

Campagne pour récolter 1,5 million

En plus de sommes à recevoir en vertu de la Convention de Montréal, un restaurateur torontois d’origine iranienne a lancé lundi une campagne de financement visant à recueillir 1,5 million pour aider les familles à payer les frais funéraires des victimes. Mohamad Fakih, fondateur de la chaîne de restaurants Paramount Fine Foods, a lui-même versé 30 000 $ au fonds appelé « Canada Strong », qui était aussi venu en aide aux familles des victimes de l’attaque au camion bélier de 2018 au centre-ville de Toronto.