Le Canada ramènera-t-il au pays ses ressortissants soupçonnés d’avoir grossi les rangs du groupe armé État islamique en Syrie ? Plusieurs sources affirment qu’un plan de rapatriement secret a bien failli aboutir l’an dernier, ce qu’Ottawa nie. Une chose est sûre, on a demandé à tout le monde ici de se préparer à leur retour.

« Ils devaient ramener des gens en avion, mais ce n’est pas arrivé »

Le Canada aurait négocié au printemps 2018 le rapatriement de 11 djihadistes canadiens présumés et de leurs 10 enfants, selon un député britannique revenu d’une mission en Syrie. Dans une déclaration sous serment obtenue par La Presse et dont l’authenticité a été confirmée, il écrit que les forces kurdes croyaient les Canadiens « à une semaine de rentrer à la maison », avant que les discussions ne soient rompues sans autres explications.

PHOTO MAYA ALLERUZZO, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Des centaines de femmes et d’enfants de djihadistes présumés vivent dans le camp de détention de Roj, au Kurdistan syrien.

Selon le député travailliste Lloyd Russell-Moyle, le Canada et des représentants de la Fédération démocratique du Nord syrien avaient établi dans un document officiel la manière dont s’organiserait l’évacuation des ressortissants canadiens. « J’ai appris des officiels kurdes qu’il y avait eu des discussions intensives avec les Canadiens. Ensemble, ils avaient pris diverses mesures en vue de rapatrier tous les Canadiens, qui étaient, d’après ce que j’ai compris, 21, dont 10 enfants », lit-on dans la déclaration sous serment.

Faux, dit Ottawa

À Ottawa, Affaires mondiales Canada nie catégoriquement cette information. « Les rapports selon lesquels un accord aurait été conclu pour rapatrier des citoyens canadiens de Syrie sont faux », indique la porte-parole Barbara Harvey. 

La position officielle est la suivante : « Compte tenu de la situation sécuritaire sur le terrain, la capacité du gouvernement du Canada à fournir une aide consulaire dans l’ensemble de la Syrie est extrêmement limitée. Le gouvernement s’occupe de ces cas et fournit de l’aide dans la mesure du possible. »

Comment expliquer un tel fossé entre les versions ? Selon une source gouvernementale, l’histoire du rapatriement raté serait en fait un « ballon d’essai » lancé par les Kurdes.

Ils ont intérêt à faire ces affirmations pour exercer de la pression sur les gouvernements étrangers.

Une source gouvernementale

« Ils ont commencé à faire ça il y a environ un an, et là, il semble qu’ils aient cessé. Le gouvernement fédéral n’a aucun intérêt à envisager une telle option. Je ne peux imaginer qu’il le fasse dans l’avenir. »

Un retour raté ?

La Presse s’est entretenue avec plusieurs autres personnes qui sont persuadées que des Canadiens détenus en Syrie ont bien failli rentrer au pays l’an dernier.

C’est le cas de l’avocat britannique en droits de la personne Clive Stafford Smith, qui travaille dans le dossier du retour des djihadistes vers leurs pays d’origine. « À l’époque, l’identité de 21 Canadiens était connue. Un protocole d’entente a été conclu dans la ville de Souleimaniye [en Irak] entre les Syriens du nord-est et le Canada pour rapatrier tous les Canadiens », écrit l’avocat dans un courriel à La Presse.

Il explique que ces 21 personnes, des femmes, des hommes et plusieurs enfants, ont alors rempli tous les documents nécessaires à la délivrance de titres de voyage d’urgence. « Les documents à remplir leur ont été fournis et ils les ont remplis. Et ils ont pris les photos », soutient Me Stafford Smith, qui affirme avoir lui-même parlé aux soldates kurdes du camp de Roj qui ont aidé les Canadiennes. « Le gouvernement canadien a ensuite vraiment fait de l’obstruction et a nié avoir reçu de telles demandes, ce qui nous a obligés à reprendre tout le processus. C’est ce que plusieurs femmes ont fait. »

La directrice de l’organisme FAVE Canada, Alexandra Bain, qui aide les familles de jeunes partis vers la Syrie, raconte une histoire semblable. Au printemps 2018, dit-elle, Affaires mondiales Canada aurait demandé aux membres de quatre familles de l’aide pour recueillir les informations nécessaires à la délivrance de titres de voyage, « pour que tous les Canadiens dans le camp puissent être ramenés au Canada ensemble ».

PHOTO SEAN KILPATRICK, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Alexandra Bain, directrice de l’organisme FAVE Canada, Alexandra Bain, qui aide les familles de jeunes partis vers la Syrie

[Dans les camps], les femmes pensaient qu’elles allaient prendre l’avion d’un moment à l’autre. Elles croyaient tellement qu’elles allaient partir qu’elles se sont débarrassées de toutes leurs possessions.

Alexandra Bain, directrice de l’organisme FAVE Canada

Au Canada, une source confidentielle directement impliquée dans l’enquête sur les jeunes partis grossir les rangs du groupe armé État islamique affirme aussi à La Presse qu’il « s’est passé quelque chose » au printemps 2018. « Ils devaient ramener des gens en avion, mais ce n’est pas arrivé », dit la source, qui n’est pas autorisée à parler publiquement. Depuis, les choses sont au point mort.

Jack Letts, un Canado-Britannique à qui le Royaume-Uni a retiré la citoyenneté parce qu’elle le croit djihadiste, faisait partie du groupe, selon sa famille. « Ils nous ont dit dans une lettre qu’ils faisaient tout ce qu’ils pouvaient pour le faire sortir. Nous savons qu’ils ont rencontré des responsables kurdes et que les choses avançaient. Et puis, boum. Ils ont coupé toutes les communications avec nous », dit son père John. 

Prêt pour un retour

Reviendront ? Reviendront pas ? La question du retour des émules de l’EI est une épine dans le pied pour le gouvernement. Selon un sondage Ipsos pour le compte de Global News, 71 % des Canadiens s’opposent à ce que le gouvernement « fasse ce qu’il faut » pour les ramener au pays.

Il s’agit d’un dossier « très politique », dans lequel le résultat de la dernière campagne fédérale a pu avoir un impact, nous dit une source confidentielle qui travaille avec la police dans le dossier de ces jeunes et qui craint d’être sanctionnée en prenant la parole.

« Il y a des dissensions entre les différents partis politiques, mais je pense qu’il y a une position gouvernementale par rapport au rapatriement des ressortissants canadiens. »

J’ai l’impression que [maintenant que la campagne électorale est passée], une telle position devrait prévaloir. Donc, oui, on s’attend à ce qu’il y ait rapatriement.

Une source confidentielle

Une chose est certaine : Ottawa a demandé aux intervenants sur le terrain de se préparer à l’arrivée de ressortissants canadiens en provenance de la Syrie.

À Montréal, un comité regroupant la Gendarmerie royale du Canada, la direction de la protection de la jeunesse et des experts du réseau de la santé a été mis sur pied. Qui les attendra à l’aéroport ? Que fera-t-on des enfants ? « Tout a été prévu, explique la pédopsychiatre Cécile Rousseau, membre du comité. On n’est pas dans l’improvisation. »

Son équipe, dit-elle, est prête à se rendre à l’aéroport « n’importe quand ».

« Ils arrivent d’une zone de guerre »

Selon les chiffres de FAVE Canada, il y a non plus 21, mais 40 Canadiens dans les camps ou les prisons contrôlées par les forces kurdes : une dizaine de femmes, cinq hommes et environ 25 enfants, dont 19 ont moins de 5 ans.

S’ils réussissent à rentrer, que ce soit par leurs propres moyens ou avec l’aide de l’État, ils seront attendus par des policiers, des professionnels de la santé, des intervenants de la DPJ et des interprètes. « Ils arrivent d’une zone de guerre et de camps où les conditions physiques et d’hygiène sont très pauvres. On sait qu’on va devoir mobiliser des acteurs en santé physique, en maladies infectieuses, en nutrition et en développement. On s’attend à avoir des gens qui sont en mauvais état physique », dit la Dre Rousseau. Elle ajoute que la plupart des enfants sont nés là-bas et, parfois, ne parlent ni anglais ni français.

Voici comment on entend procéder.

Pour les adultes

« Une évaluation du risque est faite pour chaque sujet qui revient d’une zone de conflit, explique le sergent Hakim Bellal, de la GRC. Chaque dossier fait l’objet d’une enquête et chaque dossier diffère d’un autre, selon le risque qu’il représente pour la sécurité nationale. On va s’assurer que la personne qui rentre au Canada ne va pas poser un risque pour la collectivité. »

Et comment fait-on ? 

D’abord, rappelons que depuis 2013, le droit canadien considère que quitter ou tenter de quitter le Canada afin de participer aux activités d’un groupe terroriste est un acte criminel. Le dépôt d’accusations criminelles est donc possible contre certains.

Selon une source confidentielle impliquée dans l’enquête, les policiers s’intéressent aussi à de jeunes Canadiens qui auraient maltraité leurs domestiques dans leur maison du « califat » établi par l’EI notamment en territoires syriens, les soumettant à de mauvais traitements et des sévices physiques et sexuels. Ils pourraient être accusés en vertu de la Loi canadienne sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre.

Au minimum, les autorités envisageraient de faire signer aux retournants des Engagements de garder la paix, explique cette même source.

« Le risque zéro n’existe pas, mais tout a été mis en place pour qu’il n’y ait pas de surprise, assure le sergent Bellal. Ces dossiers-là sont suivis de près par la GRC. »

Pour les enfants

Contrairement à la politique de certains pays européens, comme la France, les enfants ne seront pas systématiquement séparés de leurs parents, explique la pédopsychiatre Cécile Rousseau.

L’accueil des retournants, dit-elle, a été pensé en fonction d’une priorité, soit celle de l’intérêt supérieur de l’enfant.

« Dans le cas où un parent serait arrêté, il devrait être séparé de ses enfants. Même dans une situation comme ça, il est important que le parent soit rassuré quant au sort de l’enfant et qu’il puisse lui expliquer qu’ils vont être en sécurité. C’est très important pour rassurer les enfants qui arrivent d’un état de guerre, où la sécurité était loin d’être acquise. »

Dans le scénario où le parent n’est pas accusé, « il y aura une évaluation pour voir comment vont les enfants et les parents et, finalement, déterminer ce qui est le mieux dans l’intérêt de l’enfant. Dans la mesure où il y a un lien d’attachement, il vaut mieux ne pas les séparer. Si on a des parents en très mauvaise santé physique ou mentale, ou des cas de maltraitance, les mêmes règles qui s’appliquent aux parents canadiens s’appliqueraient aux termes de la Loi sur la protection de la jeunesse. »

Bref, les présumés djihadistes seront traités comme tout autre parent.

Cette approche ne fera pas l’unanimité, la Dre Rousseau en est consciente.

« Les approches plus sécuritaires, plus punitives créent beaucoup de dommages, de ressentiment et de détresse chez les parents et les enfants. Si les enfants sont traités avec bienveillance et que les parents ont l’impression que leur relation est respectée, on met la table pour une relation de respect essentielle à une réintégration. Il ne s’agit pas de penser la même chose qu’eux. Mais ça ne veut pas dire que la personne n’est que ça. Vous n’êtes pas juste quelqu’un qui a fait quelque chose de condamnable. Vous êtes aussi quelqu’un qui a des enfants et nous avons en commun la préoccupation de les protéger. »

— Avec la collaboration de Mélanie Marquis, La Presse

« Un Canadien devrait être jugé et emprisonné au Canada »

Mettez-le en prison, mais ramenez-le au Canada.

Voilà essentiellement le message que lance le père du présumé djihadiste canado-britannique Jack Letts, détenu dans une prison syrienne.

PHOTO TIRÉE DE FACEBOOK

Converti à l’islam à l’adolescence, Jack Letts a pris la route de la Syrie en 2014. Plusieurs médias ont rapporté qu’il s’était joint au groupe État islamique. Son père croit plutôt qu’il était coincé dans son territoire.

Depuis que le Royaume-Uni a retiré la citoyenneté à son fils l’été dernir, le Franco-Ontarien établi en Angleterre mise tout sur le Canada.

Même s’il croit à l’innocence de son garçon, John Letts ne demande pas à Ottawa de lui offrir un chèque en blanc. 

« Une fois qu’ils seront au Canada, dit-il au sujet des retournants, ils devraient tous être immédiatement emprisonnés. Personne n’a jamais dit qu’ils devraient être libres. »

PHOTO SEAN KILPATRICK, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

« Je crois [que mon fils] devrait avoir accès à un avocat et qu’il devrait avoir un procès », affirme John Letts, père du présumé djihadiste canado-britannique Jack Letts, détenu dans une prison syrienne.

Je ne voudrais pas qu’un seul d’entre eux soit libre, y compris mon fils. Mais je crois qu’il devrait avoir accès à un avocat et qu’il devrait avoir un procès.

John Letts

« La fille d’un ami est morte dans une explosion dans le métro de Londres. Je connais des gens qui ont souffert du terrorisme. Je déteste l’EI. Je déteste tout ce qui est violent, et si mon fils avait été impliqué dans quelque chose comme ça, je le condamnerais sur la place publique. Mais je crois qu’un Canadien reste un Canadien et qu’il devrait être jugé et emprisonné au Canada, s’il a fait quelque chose de mal, dit-il. Je le condamnerai, s’il a fait quelque chose de mal, mais je veux voir des preuves. Pas seulement ce que les journaux ne cessent de répéter. »

Les médias britanniques le surnomment « Jack le djihadiste ». Son histoire est nébuleuse. Converti à l’islam à l’adolescence, le jeune homme a pris la route de la Syrie en 2014. Il s’est marié et a eu un enfant. Plusieurs médias ont rapporté qu’il s’était joint au groupe djihadiste. Les forces kurdes le détiennent sur cette prémisse. Son père croit plutôt qu’il était coincé dans le territoire de l’EI.

« La pierre angulaire de la démocratie, c’est que les gens sont considérés comme innocents jusqu’à preuve du contraire. Nos avocats n’ont trouvé aucune preuve que Jack avait été impliqué dans l’EI, qu’il était un combattant. Dès l’instant où on dit que son nom, c’est Jack le djihadiste, ça dit qu’il est coupable. Son nom, c’est Jack Letts. »

« Nous travaillons sur votre cas »

La mère de Jack, Sally Lane, a transmis à La Presse la transcription d’une conversation qu’il a eue avec une fonctionnaire canadienne en janvier 2018, avant qu’il ne perde sa citoyenneté britannique.

La femme lui demande quelles sont ses conditions de détention, s’il est nourri régulièrement, s’il peut faire de l’exercice. Puis elle lui propose de l’aide.

Voici quelques extraits : 

Fonctionnaire : « Je suis du gouvernement du Canada. Voulez-vous de l’aide de notre part ? »

Letts : « Oui. Sortez-moi d’ici. »

Fonctionnaire : « Si c’était possible, voudriez-vous venir au Canada ? En Grande-Bretagne ? »

Letts : « Je veux revenir au Canada. »

Le jeune homme demande à plusieurs reprises si elle pourra organiser son rapatriement.

Fonctionnaire : « Nous travaillons sur votre cas. Parler avec vous est un premier pas positif. […] Nous continuerons d’essayer de trouver une solution. »

Letts : « Avez-vous l’intention de me ramener au Canada ? »

Fonctionnaire : « Nous avons l’intention d’essayer de vous aider. […] Le Canada est une option. […] Nous n’avons personne en Syrie et c’est un environnement complexe, je ne peux donc pas vous donner d’échéancier définitif, mais nous travaillons sur votre cas. »

« Les enfants devraient être sauvés immédiatement »

Quelles sont les responsabilités du Canada envers ses ressortissants ? Doit-on traiter les enfants différemment des adultes ? Les retournants posent-ils un risque pour la sécurité nationale ? La Presse s’est entretenue avec Phil Gurski, ancien analyste pour le Service canadien du renseignement de sécurité.

PHOTO IVOR PRICKETT, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES

Des enfants jouent dans un camp où sont rassemblés des proches de combattants de l’État islamique, dans le nord de la Syrie.

Q. Le Canada a-t-il une obligation légale ou morale de ramener les présumés djihadistes et leurs enfants ? 

R. Voilà deux questions distinctes. Selon [le ministre sortant de la Sécurité publique] Ralf Goodale, le Canada n’a aucune obligation légale d’aider les Canadiens qui ont commis des crimes en dehors du Canada. Qu’on soit un djihadiste en Irak ou un drogué à Singapour, le Canada n’a aucune obligation d’envoyer la police ou l’armée pour vous sauver. Ça, c’est la question légale.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Phil Gurski, ancien analyste pour le Service canadien du renseignement de sécurité

Il y en a qui font valoir que s’il n’y a pas d’obligation juridique, il y a une obligation morale. Et franchement, je me demande ce que ça veut dire. Dans le passé, j’ai dit que puisque ces gens se sont radicalisés au Canada, ils sont notre problème. Ce ne sont pas des innocents qui, une fois en Irak, se sont radicalisés. Le processus de radicalisation s’est fait ici au Canada. Le problème, c’est que les crimes ont été commis en Irak ou en Syrie. Les gouvernements de ces pays n’ont-ils pas le droit de les juger pour les punir de crimes commis dans leurs pays ? 

Q. Doit-on faire une distinction entre les enfants et les adultes ?

R. Les enfants devraient être sauvés immédiatement. Ces enfants devraient être retirés à leurs parents, parce que selon moi, un père ou une mère qui voyage pour faire partie du groupe État islamique, ça me prouve qu’il n’est pas un parent. Le gouvernement canadien devrait sauver les jeunes enfants, les enlever à leurs parents s’ils sont vivants, les rapatrier au Canada et les confier à d’autres membres de la famille ou les confier à l’État. 

Q. Pourquoi déciderait-on de les ramener au pays ?

R. Parce qu’un Canadien est un Canadien. Voici la fameuse citation de Trudeau il y a quatre ans [alors qu’il était chef de l’opposition, Justin Trudeau avait fait cette déclaration pour signifier qu’il s’opposait au retrait de leur citoyenneté aux terroristes]. Le problème, c’est que la grande majorité des Canadiens ne veulent rien avoir à faire avec ces gens-là. Alors si le gouvernement décide de tous les rapatrier, les hommes, les femmes et les enfants, ça va être peu populaire auprès de la grande majorité des gens. La raison pour laquelle les libéraux n’ont rien fait jusqu’ici, c’est qu’ils n’ont rien à gagner. 

Q. Posent-ils un risque pour la sécurité nationale ?

R. Absolument. Certains parmi eux en posent un. Il y en a qui vont planifier des attentats ou commettre des attentats. L’autre problème, c’est qu’il y en a d’autres qui vont revenir chez nous sans renoncer à l’idéologie extrémiste ou terroriste. Et il se peut qu’ils radicalisent d’autres Canadiens. Est-ce qu’on veut que quelqu’un qui a passé du temps là-bas revienne et recrute ou radicalise des gens pour qu’ils suivent la même voie qu’eux ? Tout le monde ne va pas retourner et commettre un attentat dans la semaine ou le mois suivant, mais on ne peut pas le prédire. Il faut faire enquête sur tout le monde et déterminer le risque, et ça prend du temps. 

Q. Pourra-t-on les accuser une fois ici ? 

R. Selon la loi sur le terrorisme, c’est un crime de quitter le Canada pour se joindre à un groupe terroriste, mais le problème, c’est comment le prouver ? Les preuves sont en Syrie. Les preuves sont en Irak. Les témoins sont là. Les victimes sont là. Ça serait très difficile pour un gouvernement de constituer un dossier qui va subir avec succès l’épreuve des tribunaux au Canada. C’est difficile de recueillir des éléments de preuve en zone de guerre.