PRÉCISION: Dans ce texte paru le 1er juin dernier, nous avons indiqué que la Ville de Hudson avait approuvé un projet de construction situé en partie dans un milieu humide. Or, la Ville de Hudson a uniquement donné son accord de principe à ce projet, lequel est conditionnel, entre autres, à l’obtention des autorisations du Ministère de l’Environnement et de la Lutte aux changements climatiques, lesquelles visent notamment la protection des milieux humides, et au respect en plus d’une bande de protection humide de 10 mètres. Le texte a également pu laisser entendre que ce projet bordait la rivière des Outaouais, ce qui n’est pas le cas. Nos excuses.

La Ville de Hudson a approuvé un important projet de construction de plus d’une centaine de maisons situé en partie dans un milieu humide qui avait agi comme zone tampon lors des inondations ayant frappé la région ce printemps.

Le projet de la municipalité, qui borde la rivière des Outaouais, comprend la construction de 114 maisons sur un terrain composé au tiers d’un milieu humide et d’un cours d’eau que la Ville a identifiés comme à protéger en 2017.

« Les conseillers municipaux ont voté deux fois pour ce projet, et là on se rend compte en leur parlant qu’ils ne savent pas sur quoi ils ont voté, dit Benjamin Poirier, résidant de Hudson. Ce projet n’aurait jamais dû être approuvé. »

Longeant la rue Léger, le terrain en question contient aussi un boisé comprenant deux espèces d’arbres vulnérables : le noyer cendré et le caryer ovale. « La Ville elle-même dit que c’est un lieu à protéger. Et là, la Ville fait le contraire, et ce sont les citoyens qui doivent jouer à la police », déplore M. Poirier.

Le 7 août 2017, la municipalité de Hudson a accepté le plan de lotissement du projet domiciliaire Willowbrook de l’entreprise Habitations Robert Inc., sous réserve que le promoteur obtienne deux certifications du ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC), dont une concernant l’article 22 portant sur les constructions dans un milieu humide. La Ville précisait qu’un cours d’eau se trouvait sur la propriété.

Or, au vote suivant, en février 2019, le nouveau plan de lotissement soumis aux élus n’indiquait plus un cours d’eau, mais bien un fossé. Ce changement a des conséquences : la présence d’un fossé n’oblige pas le promoteur à obtenir une certification d’autorisation du MELCC.

En entrevue, le maire de Hudson, Jamie Nicholls, affirme que la présence du cours d’eau et d’un boisé d’intérêt sur ce terrain est connue. Il souligne que le projet est appelé à évoluer.

« On parle de 114 unités, mais ç’a déjà été plus haut, et ça peut aller plus bas. Nous n’allons pas délivrer les permis de construction sans que l’entrepreneur ait son certificat d’autorisation en vertu de l’article 22. » — Jamie Nicholls, maire de Hudson

Quant à l’argument voulant que l’endroit serve de zone tampon lors des inondations, soit qu’elle absorbe l’eau, M. Nicholls estime que ce sera au Ministère de se pencher sur la question. « On aime l’environnement à Hudson, on aime le caractère vert de la ville et on veut que ça soit préservé. »

Lors d’une rencontre avec les élus et la population, le 30 avril dernier, le promoteur du projet, Philippe Robert, a dit aux citoyens que les exigences de l’article 22 ne s’appliquaient pas à son projet. M. Robert n’a pas rappelé La Presse cette semaine.

Frédéric Fournier, porte-parole du MELCC, rappelle qu’il appartient au promoteur « de s’assurer que son projet est conforme à la Loi sur la qualité de l’environnement et à la réglementation municipale ».

« Déconnecté de la réalité »

Des résidants estiment aussi que le nouveau projet s’inscrit mal dans le secteur : il aura une densité de 12,5 logements par hectare, alors que la densité actuelle de ce secteur de Hudson est de 4 logements par hectare.

Christian Redahl, qui habite depuis huit ans sur la rue Léger, a l’impression que la municipalité l’a laissé tomber. La petite rue Léger compte aujourd’hui six habitations avec de grands terrains boisés. Deux voitures ont peine à se croiser sur cette voie rurale.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

La petite rue Léger compte aujourd’hui six habitations avec de grands terrains boisés. Deux voitures ont peine à se croiser sur cette voie rurale.

« C’est complètement déconnecté de la réalité. Je suis favorable au développement [d’ensembles résidentiels], mais faisons les choses en harmonie avec le quartier, au lieu de faire du développement copié-collé, de couper à peu près tous les arbres et de remblayer les milieux humides comme dans les années 50. »

Les élus lui ont dit que le projet ferait augmenter les revenus de la Ville, mais M. Redahl est sceptique.

« Souvent, ces projets finissent par être coûteux pour les villes, qui doivent assumer tous les services et l’entretien. Ils n’ont fait aucune étude. On dirait qu’ils ne veulent pas le savoir. »

John Corker, résidant de la rue Léger, souligne qu’il y a toute une vie dans le marais, et que cette vie est menacée. « Il y a des serpents, des tortues, on voit aussi des renards, des hiboux, des chevreuils… C’est tout un écosystème qu’on s’apprête à détruire pour y poser de l’asphalte. »