(Québec) Mettant de côté leurs frustrations quant à l’attitude du gouvernement, tous les partis de l’opposition seront présents, aux côtés de François Legault, au lancement aujourd’hui de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse.

Au cours des dernières heures, la présidente imposée par Québec, l’ex-syndicaliste Régine Laurent, a été fort active pour favoriser un atterrissage en douceur de l’opération, qui, avec l’intransigeance du gouvernement, ne s’annonçait pas très bien à l’origine.

Le mandat de la commission, dont La Presse a pu prendre connaissance, portera d’abord sur « l’organisation et le financement des services de protection de la jeunesse au sein du réseau de la santé et des services sociaux pour s’assurer d’une prestation de services de qualité, diligente et adaptée aux besoins des enfants et de leur famille ». Mme Laurent a dit aborder son mandat avec « une volonté de fer » ; elle est déterminée à faire en sorte que les choses changent, confie-t-on. Elle s’engagera à ce qu’aucun autre enfant en détresse ne puisse passer à travers les mailles du filet.

M. Legault insistera sur le fait que la commission, dont le mandat a été adopté hier par le Conseil des ministres, sera totalement indépendante du gouvernement, une exigence ferme des partis de l’opposition.

Dans les heures ayant suivi la mort d’une fillette à Granby, le gouvernement s’était engagé à organiser une vaste réflexion non seulement sur les services de protection de la jeunesse, mais aussi sur la loi qui l’encadre, les services sociaux et le rôle des tribunaux. Rappelons qu’un juge avait décidé de renvoyer l’enfant dans sa famille en dépit des signalements reçus et du dossier de la direction de la protection de la jeunesse.

Le groupe, qui se déplacera dans la province et pourra convoquer des témoins, aura à faire une « analyse globale » des mécanismes de protection des jeunes. Il pourra toucher à tous les réseaux concernés, et aura à formuler des recommandations pour changer un système qui a à l’évidence failli à la tâche.

Un rapport d’ici le 30 novembre 2021

Le groupe devra remettre son rapport dans 18 mois, soit d’ici le 30 novembre 2021. Régine Laurent, ancienne présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, dirigera la commission, appuyée par deux vice-présidents, André Lebon et Me Michel Rivard. On ajoutera neuf commissaires, soit cinq experts et un représentant de chacun des partis politiques représentés à l’Assemblée nationale. 

Une surprise : la représentante de Québec solidaire sera Manon Massé, qui devra conjuguer ces responsabilités à son rôle de porte-parole du parti au Salon bleu. Pour la Coalition avenir Québec, la représentante sera Lise Lavallée, députée de Repentigny. Sans surprise, le Parti québécois déléguera Lorraine Richard et les libéraux, Hélène David. Cette dernière avait proposé de se retirer de l’exercice quand Québec solidaire avait proposé le nom de sa sœur, Françoise, comme présidente de la commission, à la mi-mai. Les libéraux avaient proposé André Lebon ou l’ancien député péquiste Camil Bouchard comme président.

Le mandat de la commission sera aussi de se pencher sur « l’évolution des conditions d’exercice et des pratiques cliniques des intervenants en protection de la jeunesse depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur la protection de la jeunesse », il y a 40 ans.

Les membres étudieront aussi le « rôle des autres réseaux dans la protection des enfants au Québec et leur contribution au bien-être de l’enfant ». Il s’agit ici d’évaluer les enjeux et les obstacles à la collaboration entre les réseaux, afin de parfaire la prise en charge des enfants qui ont besoin de protection. On scrutera le niveau de concertation entre les réseaux de l’éducation, de la famille et de la garde à l’enfance, des services de garde et des organismes communautaires.

Du côté juridique, on voudra vérifier le fonctionnement des tribunaux en matière de protection de la jeunesse ainsi que les arrimages avec les tribunaux en matière de garde d’enfant.