Avis à ceux qui trouvent que les cahiers publicitaires distribués à la maison sont une plaie, un truc inutile, envahissant et polluant. Et qui ont signé des pétitions demandant une consultation publique à leur sujet, dans la métropole et dans le Québec au complet. 

Transcontinental n’est pas sur le point de les abandonner. 

Le chef de la direction de l’entreprise, François Olivier, l’a clairement fait savoir hier aux audiences publiques de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), au sujet du Plan métropolitain de gestion des matières résiduelles.

Selon la société, ces annonces constituent une activité « utile, responsable et légitime ».

D’abord, a tenu à rappeler le chef de la direction, aucun arbre ne meurt en vain par leur faute. Il y a longtemps – depuis 1986, pour être précis – qu’on ne coupe plus d’arbres des terres de la Couronne pour faire ce genre de papier. On prend les résidus des scieries. Et en plus, l’entreprise travaille aussi avec de la fibre de papier recyclé. 

Ensuite, Transcontinental affirme que les cahiers publicitaires sont lus. D’après les chiffres de l’entreprise, seulement 11 % des gens qui suivent les aubaines le font en ligne. 

Selon Transcontinental, 87 % des gens qui reçoivent les cahiers publicitaires les lisent. Et 84 % les trouvent utiles.

L’entreprise invite ceux qui les reçoivent malgré eux et que ça énerve suprêmement à l’appeler directement pour recevoir une vignette « Pas de circulaire ». Avantage pour TC : pouvoir savoir quelle part réelle des ménages – de 5 % à 13 % des 3,3 millions de portes au Québec – n’en veut pas. 

Est-ce dire que Transcontinental n’entend rien changer à sa façon de faire ?

Non. 

En fait, même s’il dirige une entreprise dont les revenus étaient de 2,5 milliards l’an dernier, François Olivier était là, lui aussi, comme les groupes écolos, pour dire à la CMM de mieux faire son boulot. Ou, à tout le moins, de permettre aux entreprises qui veulent faire des changements écoresponsables de le faire.

En gros, Transcontinental veut devenir le champion du plastique recyclé. Et a besoin qu’on commence à prendre notre recyclage au sérieux.

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Donc premier changement annoncé : le sac du Publisac sera fait dès l’automne à 100 % de plastique recyclé et sera 30% plus petit. (L’entreprise est aussi en train de tester des prototypes d’enveloppes en papier, pour la distribution de circulaires là où la pluie et la neige ne sont pas un problème.) 

Mais surtout, Transcontinental a demandé officiellement à la CMM, hier, de l’aider à avoir accès à de la matière première bien triée, donc du plastique auquel ses ingénieurs peuvent redonner une utilité.

Parce que Transcontinental, naguère principalement un géant des médias papier – la société imprimait notamment La Presse –, est maintenant un géant de l’impression – et de la confection – sur plastique mou. L’emballage de votre P’tit Québec ou de vos yaourts en tube. 

De 2014 à 2016, la société a acheté six entreprises et possède maintenant 28 usines de la Nouvelle-Zélande au Canada, en passant par la Chine et le Royaume-Uni, qui fabriquent des emballages. Sa liste de clients comprend les Saputo et Procter & Gamble de ce monde. 

Mais on parle ici exactement du genre d’emballage qui est sous la loupe des écolos.

La demande de solutions de rechange à base de plastique recyclé, m’a expliqué M. Olivier en marge des audiences, est donc fort importante. Les marques veulent qu’on dise que leurs emballages sont responsables.

Et le prix n’est plus nécessairement un obstacle.

S’il faut majorer la note de quelques cents pour être plus écologique, qu’à cela ne tienne, lui ont dit des entreprises. Pas toutes, mais un bon nombre.

Bref, le fabricant d’emballages a une demande. Mais une demande qui nécessite une matière première qui n’est pas nécessairement accessible, notre système de collecte collective étant, actuellement, fort peu performant.

On connaît la situation : pour encourager la « mise au recyclage », au début du millénaire, la CMM a mis sur pied un système de collecte en vrac où tout le monde met n’importe quoi, pêle-mêle, dans le bac vert à récupération.

Pour que cela puisse être efficace, il aurait fallu être capable de trier précisément la matière, ce que nos centres de tri n’ont jamais vraiment fait. C’est pour cela que la Chine, où on vendait notre matière recyclée de qualité très ordinaire, a fini par ne plus en vouloir. Le produit n’est pas assez net, pas bien classé.

Ce que le chef de la direction de Transcontinental a dit à la CMM, c’est un peu la même chose : organisez-vous pour qu’on ait accès à des dizaines de millions de tonnes de plastique réellement recyclable, et on va le faire.

« Mais il faut avoir accès à ces déchets », insiste l’homme d’affaires.

« En peu de temps, on a créé le sac de plastique pour les Publisacs avec les déchets. On a montré qu’on peut le faire. »

Transcontinental, a-t-il expliqué, a des ingénieurs et des chimistes, qui travaillent sur ça, en collaboration avec les clients. Qui ont leurs exigences. Et qui doivent se conformer aux lois.

Car dans toute cette grande discussion sur les emballages et notre surconsommation de plastique, on ne doit surtout pas ignorer les différents ministères qui ont imposé de toujours mettre de plus en plus de couches protectrices autour de tout. 

D’ailleurs, ça me fait penser à ceci : j’espère qu’on n’est pas ici comme chez les agronomes et que les gardiens de notre « santé » n’ont pas de conflits d’intérêts avec les entreprises d’emballage…

Sonneurs d’alarme, écrivez-moi si c’est le cas.