Les sinistrés des inondations n’auront aucun répit avant quelques jours et devront, au contraire, se préparer à une montée des eaux avec les précipitations attendues. Ceci a forcé la mairesse de Montréal Valérie Plante à déclarer l’état d’urgence dans la métropole.

Selon Environnement Canada, le corridor directement au nord du fleuve Saint-Laurent devrait recevoir un déversement de quantités importantes d’eau qui s’ajouteront à la fonte des neiges à l’intérieur des terres pour les régions les plus touchées, soit les Laurentides, Lanaudière et la Mauricie.

« Sur cette bande, qui va de Lachute environ jusqu’à la Côte-Nord, on parle d’un 40 à 50 millimètres, mais il y a des pointes à 60 millimètres localement », a expliqué le météorologue Simon Legault en entrevue avec La Presse canadienne.

La mairesse Valérie Plante a déclaré l’état d’urgence à Montréal en fin d’après-midi, vendredi, s’attendant à voir la montée des eaux menacer encore davantage les secteurs à risque de Pierrefonds, Ahuntsic, l’Île Bizard et l’Île Mercier.

Cette mesure permet notamment de confier des pouvoirs au directeur du Service de sécurité incendie de Montréal, Bruno Lachance, pour faire des dépenses supplémentaires pressantes, réquisitionner des terrains pour les travaux requis et de procéder à des évacuations forcées si nécessaire.

M. Lachance a toutefois précisé que Montréal était beaucoup mieux préparée qu’en 2017 alors qu’avec les mêmes niveaux d’eau, quelque 400 résidences avaient été inondées et des centaines de citoyens évacués. Seulement 50 bâtiments sont touchés cette année et on ne rapporte que 11 évacuations.

« Pour l’instant, on n’a rien de planifié, puisque ce n’est pas nécessaire. On n’est pas rendus à évacuer aucun secteur », a précisé M. Lachance.

La ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, a de son côté répété que l’on disposait des effectifs requis et qu’elle n’hésiterait pas à demander des renforts s’il en faut, mais elle a fait valoir que l’évolution de la situation permet des réaffectations des effectifs déjà disponibles, comme ce fut le cas à Pointe Calumet, sur la rive nord du lac des deux Montagnes : « Il y a une digue qui pourrait être à risque de céder à Pointe Calumet. On parle de milliers de personnes qui devraient être évacuées si la digue devait céder, donc il y a des troupes des Forces armées qui sont arrivées ce matin (vendredi) à Pointe Calumet pour prêter main-forte pour essayer de renforcer au maximum cette digue. »

L’Outaouais ne sera pas épargné

« On a un deuxième corridor de pluie dans la tête de l’Outaouais et en Abitibi, avec un 30 à 50 millimètres attendus dans ces régions, donc le Pontiac, le Témiscamingue, jusqu’aux portes de Chibougamau et ça, ça va venir influencer la rivière des Outaouais », a précisé le météorologue Simon Legault.

Le dernier bilan dévoilé vendredi soir montre d’ailleurs une progression constante du nombre de sinistrés à travers la province, alors que 3017 résidences sont présentement inondées, 2736 autres sont isolées par l’eau qui les rend inaccessibles et 1796 citoyens sont évacués.

Ces chiffres, en plus, ne tiennent pas compte des milliers de sinistrés qui ont réintégré leur domicile dans les secteurs où l’eau est redescendue et qui ne sont plus ni sur la liste des résidences inondées, ni sur celle des personnes évacuées d’Urgence Québec.

Barrage en débordement

Pendant ce temps, le barrage de la Chute-Bell, sur la rivière Rouge à la limite de l’Outaouais et des Laurentides, demeure sous très haute surveillance après l’évacuation d’urgence, jeudi, de tous les citoyens en aval, résultat d’une alerte lancée par les autorités qui ont été avisées par Hydro-Québec d’un risque de rupture de l’ouvrage centenaire.

La Sûreté du Québec a procédé à l’évacuation de 61 résidences. Une soixantaine de personnes ont pu évacuer d’elles-mêmes, mais une quinzaine d’autres ont quitté en hélicoptère, leurs résidences n’étant plus accessibles par voie terrestre.

Hydro-Québec, de son côté, a installé une caméra de surveillance et des limnimètres pour mesurer les niveaux d’eau au barrage.

La société d’État note que le débit a atteint, jeudi, 1000 mètres cubes à la seconde, soit le débit maximal pour lequel l’ouvrage a été conçu lors de sa construction en 1915 et on s’attend à une hausse de ce débit avec la pluie et la fonte des neiges.

Un porte-parole d’Hydro-Québec, Éric Moisan, a reconnu qu’« au-delà de 1000 mètres cubes, on ne connaît pas le comportement de la centrale si jamais on avait plus d’eau ».

Il a toutefois précisé qu’un barrage « ne cède pas nécessairement ; c’est du béton, c’est très solide » et que le débit actuel fait en sorte que l’eau passe sur l’évacuateur : « C’est une crête déversante. L’eau passe par-dessus et c’est conçu pour ça, mais on voit qu’avec le débit, l’eau passe à côté et c’est ça qui nous inquiète dans le fond. »

Routes sous surveillance

Le ministre des Transports, François Bonnardel, s’était pour sa part déplacé en périphérie de Saint-Jérôme pour constater les dégâts qui ont forcé la fermeture de la route 117, près de la jonction avec l’autoroute 50.

Il a précisé que certaines routes ont dû être fermées même si la chaussée n’était pas submergée par mesure de précaution.

« Par exemple, il y a des portions de la route 158 (qui sont fermées). Les gens nous disent : pourquoi vous n’ouvrez par la route ? Il y a trop d’eau dans le champ. Il y a trop d’eau sur les portions à droite ou à gauche et si quelqu’un avait un accident et qu’on ne pouvait pas sortir de son auto à cause d’une accumulation d’eau trop importante… pour nous la sécurité passe avant tout », a précisé le ministre.

« Si on doit fermer les autoroutes, on va le faire », a-t-il lancé, notant que la situation pourrait même se produire avec des voies de circulation majeures telles les autoroutes 20 et 40 à l’ouest de Montréal.

« S’il y avait problématique, on va trouver des mesures d’atténuation pour que les gens puissent utiliser l’autoroute 30 avec le péage qui serait gratuit », a dit le ministre.

État d’urgence et d’alerte

À Gatineau, le maire Maxime Pedneaud-Jobin a averti ses citoyens de se préparer au pire. « D’ici lundi ou mardi, on devrait dépasser les niveaux les plus élevés de 2017, et ce, partout sur le territoire », a-t-il dit en conférence de presse vendredi avant midi.

« Ce qu’on va vivre dans les prochaines semaines, on ne l’a jamais vécu », a-t-il ajouté.

Dressant le bilan, le directeur du service des incendies de la Ville, Denis Doucet, a fait état de 1800 logements et 4142 personnes touchées par la crue des eaux.

Cependant, avec la mise à jour du périmètre projeté des zones qui pourraient être touchées, la Ville de Gatineau estime « qu’environ 500 bâtiments de plus pourraient être touchés avec cet agrandissement de la zone », a-t-on indiqué par voie de communiqué.

À Ottawa, l’état d’urgence a été décrété jeudi par le maire Jim Watson, provoquant l’envoi d’aide militaire et la visite, vendredi matin, du premier ministre ontarien Doug Ford.

La capitale fédérale a accueilli 400 soldats vendredi pour prêter main-forte dans les zones inondées qui sont situées loin du centre de la ville. Le maire Watson a dit s’attendre à plus de dégâts qu’aux inondations de 2017.

À Laval, devant la prévision d’augmentation des niveaux d’eau, les autorités municipales ont recommandé aux citoyens de quelque 400 résidences situées dans les secteurs les plus à risque d’évacuer dès maintenant et annoncent qu’elles cessent la livraison de sacs de sable dans ces secteurs afin de concentrer toutes leurs énergies à la sécurité et la protection des citoyens et des employés.

Tempête de neige et répit

Ce n’est pas avant dimanche que Dame nature donnera une chance aux sinistrés, selon le météorologue Simon Legault. Aucune précipitation d’importance n’est prévue entre dimanche et jeudi, seulement des quantités minimes de pluie mardi et mercredi, mais il y aura possibilité de quantités plus importantes vendredi prochain.

Cependant, toute l’eau qui sera tombée d’ici à dimanche fera son chemin dans les bassins versants, de sorte que l’on s’attend à ce que les niveaux continuent de monter au moins jusqu’à mardi.

Seule consolation : le mercure chutera considérablement une fois la pluie passée, tombant même sous le point de congélation à certains endroits. « Il y a même une possibilité de neige dans les Laurentides. Pas des grosses quantités, mais il peut y avoir quelques centimètres. Ça va aider à ralentir la fonte et même la stopper par endroits », a confié M. Legault.

En fait, la couverture de neige s’épaissira considérablement plus au nord, alors qu’un avertissement de tempête touche une région qui en a déjà reçu plus que sa part.

« On a émis un avertissement de neige pour l’Abitibi, surtout la partie ouest près de l’Ontario, où il va y avoir de 15 à 20 centimètres avec de la poudrerie », a révélé le météorologue.

Or, toute neige tombant sur l’ouest de l’Abitibi fera éventuellement son chemin vers la rivière Gatineau, puis, celle des Outaouais et, ultimement, le fleuve Saint-Laurent.

Inondation majeure

- Fleuve Saint-Laurent, au lac Saint-Pierre, en baisse

- Lac des Deux Montagnes, à Pointe-Calumet, en hausse

- Rivière de la Petite Nation, en amont de Ripon, en hausse

- Rivière des Mille-Îles, à Bois-des-Filion, en baisse

- Rivière des Outaouais, à la Baie Quesnel, en hausse

- Rivière des Outaouais, à la Baie de Rigaud, en hausse

- Rivière Rouge, en amont de la chute McNeil, en hausse

Inondation moyenne

-Fleuve Saint-Laurent, à Trois-Rivières, en hausse

-Lac des Deux Montagnes, à Sainte-Anne-de-Bellevue, en baisse

-Lac des Deux Montagnes, à Terrasse-Vaudreuil, en baisse

-Lac Maskinongé, à Saint-Gabriel-de-Brandon, en baisse

-Rivière des Mille Îles, en amont du barrage du Grand-Moulin à Deux-Montagnes, en hausse

-Rivière des Mille Îles, en aval du barrage du Grand-Moulin à Deux-Montagnes, en hausse

-Rivière du Nord, en amont du pont du CN à Saint-Jérôme, en hausse

Inondation mineure

- Fleuve Saint-Laurent, à Lanoraie, en baisse

- Fleuve Saint-Laurent, à Bécancour, en baisse

- Fleuve Saint-Laurent, à Port-Saint-François, en baisse

- Fleuve Saint-Laurent, à Sorel, en baisse

- Lac Champlain, dans la baie Missisquoi à Saint-Armand, en baisse

- Lac Champlain, à Rouses Point, en hausse

- Lac des Trente et Un Milles, à Sainte-Thérèse-de-la-Gatineau, en hausse

- Lac Louise, à Weedon, en baisse

- Lac Memphrémagog, à Memphrémagog, en baisse

- Lac Saint-Louis, à Sainte-Anne-de-Bellevue, en hausse

- Rivière Chaudière, en aval du barrage Mégantic, en baisse

- Rivière des Outaouais, à Ottawa au parc Britannia, en baisse

- Rivière des Outaouais, à la marina de Hull, en hausse

- Rivière des Prairies, à la tête des rapides du Cheval Blanc, en baisse

- Rivière du Diable, en amont du pont de la route 117, en baisse

- Rivière du Lièvre, en amont du pont-route 311 à Lac-Saint-Paul, en hausse

- Rivière du Nord, en aval du pont du CP près de Sainte-Agathe-des-Monts, en hausse

- Rivière du Nord, au pont de la route 148 à Lachute, en hausse

- Rivière L’Assomption, au pont-route 158 à Joliette, en baisse

- Rivière Maskinongé, au pont du CN près de Sainte-Ursule, en hausse

- Rivière Matawin, en aval du pont-route 131 à Saint-Michel-des-Saints, en baisse

- Rivière Noire, en amont du pont-route à Sainte-Émélie-de-l’Énergie, en hausse

- Rivière Ouareau, à la tête des chutes Dorwin, en baisse

- Rivière Picanoc, sur le chemin du Lac-Cayamant à Gracefield, en hausse

- Rivière Richelieu, à Saint-Jean-sur-Richelieu, en hausse

- Rivière Saint-François, en en aval du barrage Aylmer, en baisse

Rivières et plans d’eau sous surveillance

- Fleuve Saint-Laurent, à Montréal près du boulevard LaSalle, en baisse

- Lac Aylmer, au quai de Stratford, en baisse

- Rivière Beaurivage, en aval du pont-route 171 à Saint-Étienne, en hausse

- Rivière Chaudière, au pont-route 218 à Saint-Lambert-de-Lauzon, en hausse

- Rivière Chaudière, en aval du barrage Sartigan, en hausse

- Rivière Chaudière, au pont-route 271 à Saint-Georges, en hausse

- Rivière Chaudière, au nord du pont-route 171 à Scott, en baisse

- Rivière Chaudière, au pont-route 276 à Saint-Joseph, en hausse

- Rivière des Mille Îles, à Terrebonne, en baisse

- Rivière Famine, en amont du pont-route 173 à Saint-Georges, en hausse

- Rivière l’Assomption, à Sainte-Mélanie, en hausse

- Rivière Richelieu, à Saint-Paul-de-l’Île-aux-Noix, en baisse

- Rivière Saint-Charles, en amont de la Lorette, en hausse

- Rivière Saint-François, au lac Aylmer à Weedon, en hausse