Le gouvernement Legault doit indemniser davantage les chauffeurs de taxi dont les permis ne vaudront plus rien après la déréglementation à venir.

C'est ce qu'a plaidé la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ), mais aussi l'Institut économique de Montréal (IÉDM), en commission parlementaire mercredi, après une manifestation devant le parlement où des centaines de chauffeurs ont protesté contre le projet de loi 17 qui déréglemente l'industrie.

Le ministre des Transports, François Bonnardel, a été dépeint sur des affiches avec une moustache semblable à celle de Hitler et une croix gammée, mais il n'a pas bronché sur l'indemnisation.

Le projet de loi 17 prévoit notamment la fin du plafonnement du nombre de permis, qui fera baisser la valeur de ceux existants. Les permis ont déjà perdu de leur valeur avec l'arrivée de la multinationale Uber et son application.

Le gouvernement caquiste propose 500 millions en indemnisation pour la perte de valeur des permis existants, mais les propriétaires de permis réclament 1,3 milliard.

Selon le président de la FCCQ, Stéphane Forget, les deux parties doivent s'entendre sur un point milieu entre ces deux montants. « Il faut que ce soit juste et équitable », a-t-il réclamé, en insistant pour que chaque dossier soit traité « au cas par cas ».

« Il faut régler l'enjeu de la compensation de ceux qui vont perdre », a-t-il fait savoir à François Bonnardel, au premier jour de la commission parlementaire sur le projet de loi

Les représentants de l'IÉDM, un groupe de recherche réputé pour être très à droite, ont aussi demandé une indemnisation pleine et entière, puisque le permis constitue une propriété et son détenteur doit être indemnisé si l'État change les règles, selon l'IÉDM.

M. Bonnardel n'a pas commenté ces demandes de hausser l'indemnisation. Il s'est toutefois dit ouvert à bonifier le régime de redevances prévu de 0,20 $ par course pour un fonds de modernisation de l'industrie, qui pourrait totaliser entre 10 et 13 millions par an.

L'opposition officielle libérale a également réclamé une indemnisation beaucoup plus substantielle.

« (Le gouvernement) envoie un message extrêmement négatif, a dit le porte-parole de l'opposition officielle en matière de transports, Gaétan Barrette, en mêlée de presse. Les contribuables n'ont pas mis ce gouvernement au pouvoir pour heurter d'autres contribuables. Il n'y a pas un gouvernement qui a mis la valeur du permis (de taxi) à zéro et celui-là le fait. »

Le Parti libéral s'est également inquiété de l'appauvrissement des chauffeurs qui seront plus nombreux à se disputer le marché. « Le marché totalement libre n'a pas amené la personne qui est au bas de l'échelle à gagner plus, bien au contraire, a dit M. Barrette. Affirmer que c'est le nirvana, ça ne marche pas comme ça. »

Pour sa part, le Parti québécois (PQ) s'inquiète des effets de ce projet de loi sur le transport de personnes dans les régions périphériques et sur le transport adapté.

De même, la tarification dynamique prévue dans le projet de loi, qui permet la variation du prix de la course selon la demande, ne sera pas favorable aux consommateurs, a argué le porte-parole péquiste aux transports, le député Joël Arseneau, en conférence de presse au parlement.

Le PQ exige la publication des résultats des projets pilotes avec Uber mis sur pied par le précédent gouvernement Couillard.

En vertu du projet de loi, l'ensemble des chauffeurs, qu'ils soient de l'industrie traditionnelle du taxi ou occasionnels au service d'une application comme Uber, devra répondre aux mêmes normes. Tous devront avoir :

-un permis de classe 5, plutôt que la classe 4C des chauffeurs de taxi actuels ;

-une formation minimale dont la durée reste à déterminer ;

-réussi un examen ;

-été soumis à une vérification des antécédents judiciaires.

Le gouvernement mettrait fin :

-aux territoires exclusifs réservés et au contingentement des taxis ;

-à l'immatriculation T réservée aux taxis ;

-à l'inspection annuelle.