Personne n’est à blâmer pour la mort d’une fillette de 7 ans à Granby, a conclu le rapport d’enquête interne rendu public mercredi par le CIUSSS de l’Estrie-CHUS. C’est plutôt le «système au complet» qui a failli à la protéger.

L’enfant est morte de ses blessures après avoir été trouvée ligotée dans le domicile de son père et de sa belle-mère. Elle était suivie depuis plusieurs années par la DPJ de l’Estrie.

Or, personne à la DPJ n’a commis de faute dans le traitement de son dossier, conclut l’enquête interne lancée dans la foulée du drame. Il s’agit plutôt du «système au complet qui a failli de plusieurs façons et à plusieurs moments», peut-on lire dans les conclusions.

«L’enquête nous a démontré qu’il n’y avait pas un événement qui a influencé fortement la fin de vie de cette jeune fille-là. Par contre, l’enquête a démontré aussi que l’établissement et le système actuel ont présenté à quelques moments ou à plusieurs moments des failles, et c’est sous la responsabilité de notre établissement», a dit en entrevue téléphonique le président-directeur général du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de l’Estrie – Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (CIUSSS de l’Estrie – CHUS), le Dr Stéphane Tremblay.

La fillette a été suivie toute sa vie par la protection de la jeunesse et elle a reçu une «panoplie de services». Selon le rapport, l’engagement des intervenants et des gestionnaires du réseau à son endroit ne fait guère de doute.

Sauf qu’une «succession d’événements qui n’auraient pas dû se produire ont placé cette enfant dans une situation à haut risque avant son décès», constate le rapport.

Le document propose 14 recommandations pour améliorer le suivi des enfants vulnérables.

Parmi ces recommandations, on retrouve celle de «s’assurer que les intervenants en protection de la jeunesse se rendent dans le milieu de vie des enfants le plus souvent possible», d’harmoniser les services en CLSC et de revoir la Loi sur la protection de la jeunesse pour pouvoir intervenir auprès des conjoints des parents. Les divers intervenants sont aussi invités à mieux communiquer et collaborer.

Des travailleurs sociaux ont déjà sonné l’alarme sur la lourdeur de leurs tâches. Le Dr Tremblay admet que beaucoup de travail administratif est demandé aux intervenants et qu’il faudra revoir certains volets. «Il y a certaines recommandations qui demandent une réflexion de notre société, qui probablement seront répondues lors de la commission nationale sur les droits et la protection de l’enfance», a précisé le Dr Tremblay, qui a admis que les recommandations sont basées sur le principe d’avoir les bonnes ressources au bon moment. L’une d’elles aborde d’ailleurs la nécessité d’«intensifier les démarches pour attirer et retenir le personnel en protection de l’enfance et de la jeunesse».

Certains éléments sont sous la responsabilité du CIUSSS, d’autres doivent être revus au niveau national, juge le Dr Tremblay. Le manque de ressources ne peut pas être un obstacle. «Au-delà de l’argent, qu’un enfant de 7 ans décède, fort probablement en lien avec de la maltraitance, et l’enquête policière nous le démontrera, je ne pense pas que ça a un coût dans notre société», a-t-il ajouté.

Les recommandations seront toutes suivies, a assuré le ministre délégué à la Santé, Lionel Carmant.

«Il faut attendre les autres enquêtes avant de blâmer quelqu’un, a indiqué le ministre. Mais on a pris les recommandations et elles vont être appliquées.»

L’enquête policière se poursuit. Le coroner et la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse n’ont pas encore rendu leurs conclusions.

Le père de la fille de 7 ans, morte le 29 avril, a été accusé de séquestration, de négligence criminelle ayant causé la mort, d’avoir omis de fournir des choses nécessaires à la vie de la fillette et d’abandon d’enfant. Sa conjointe est accusée de meurtre non prémédité, de séquestration et de voies de fait graves.