Noël ne rime pas toujours avec famille. Pendant que certains préparent le menu du réveillon ou enrubannent les derniers cadeaux, d'autres sont loin de leurs proches. Par obligation ou par choix. Témoignages.

Du lit d'hôpital au micro de CKOI 

Jean-Philippe Dupuis sera demain au micro de CKOI de 16 h à minuit. Triste ? Non, tout le contraire. Quand nous lui avons parlé, il attendait avec impatience son congé de l'hôpital, où il avait été admis samedi pour une infection à E. coli. « J'aime tellement ma job que je ne vois pas ça comme un sacrifice, dit l'animateur de 23 ans. La relation avec les auditeurs est différente dans le temps de Noël. Il y a un côté très humain et une plus grande proximité. Je trouve que c'est un privilège d'accompagner les gens qui nous écoutent. C'est peut-être quétaine, mais j'ai hâte de les retrouver. » Ça tombe bien parce que Jean-Philippe est enfant unique et que ses parents sont partis dans le Sud il y a trois semaines, pour deux mois. De son côté, Francis Gilbert, qui a failli le remplacer, profitera de son premier congé des Fêtes en 10 ans de radio. À moins que...

Noël au centre commercial 

Serveuse chez A & W, Kawtar Boujadale ne fêtera pas Noël en famille. En fait, elle ne fêtera pas Noël du tout. « Dans ma culture, on croit en Jésus, mais on ne fête pas sa naissance », dit-elle. Au Québec depuis septembre 2017, Kawtar vient du Maroc, où ses parents et sa soeur habitent toujours. Elle a quitté son pays à 17 ans pour venir étudier à Montréal. En mai prochain, elle décrochera son diplôme de machiniste de l'École des métiers de l'aérospatiale de Montréal et ira sur le marché du travail à la recherche d'un emploi. Que fera-t-elle ce soir ? « Je vais aller dans un centre commercial, répond-elle. Je vais juste voir comment ça se passe, comme l'année dernière, et revenir dormir chez moi. Ça ne me dérange pas. Je suis ici parce que je veux être ici. C'est mon choix. »

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Kawtar Boujadale, serveuse chez A & W.

Une journée comme une autre 

La Grande Roue de Montréal ne prend pas congé pendant les Fêtes. Pas plus que Maïa Pelletier, étudiante en première année à HEC Montréal, qui y travaille à temps partiel. Plantée dehors devant la billetterie, une pancarte bleue au dos, la jeune femme de 18 ans accueille et informe les visiteurs de la Grande Roue du matin jusqu'à 22 h le soir. Elle y est aujourd'hui et y sera demain, alors que le mercure avoisinera les -10 degrés Celsius. Ce sera d'ailleurs son premier Noël loin de ses proches, qui habitent dans le Bas-du-Fleuve. « Pour moi, ce n'est pas un problème, dit-elle. Le 25 décembre, c'est une journée comme une autre. J'ai choisi cet emploi parce que ça me tentait de travailler pendant le temps des Fêtes. Je voulais rester dans le coin. » Bon à savoir : la patinoire réfrigérée du Vieux-Port est aussi ouverte durant les Fêtes.

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Maïa Pelletier, étudiante en première année à HEC Montréal.

Au chevet de ses patients

La plupart des commerces sont fermés à Noël. Tout comme le sont, en très grande majorité, les bureaux, les musées et les restaurants. Mais les hôpitaux restent ouverts 24 heures sur 24, 365 jours par année. Béatrice Chapdelaine, 25 ans, résidente en médecine de famille, sera de garde demain aux urgences de l'hôpital Notre-Dame. Ce sera son troisième Noël au boulot. « Le 25 décembre, d'habitude, on fête avec la famille élargie du côté de mon père. Mais cette année, je ne serai pas là », précise-t-elle. Déçue ? « Non. Je n'ai pas d'enfant. C'est moins déchirant de ne pas être là le 25. Mais ce le sera peut-être plus tard. » Règle générale, les résidents en médecine travaillent soit à Noël, soit au Premier de l'an, rappelle Béatrice. À quoi s'attend-elle demain ? « J'ai l'impression que les hôpitaux sont moins occupés à Noël qu'au jour de l'An. Je m'attends à ce que ce soit assez calme. » On le lui souhaite.

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Béatrice Chapdelaine, résidente en médecine de famille.

Question d'habitude 

Pour David Badiane, travailler les 24 et 25 décembre, c'est devenu une habitude. « J'ai toujours travaillé le jour de Noël, dit-il. C'est un jour comme un autre. » Directeur du Speakeasy, rue McGill, David, 27 ans, a quitté la France il y a six ans pour venir travailler dans le secteur de l'hôtellerie à Montréal. « Je suis rentré une seule fois en France pour Noël en six ans, précise-t-il. C'était en 2014. » Depuis, son Noël rime plus avec travail qu'avec famille. Mais il ne s'en plaint pas. « Le 25 est un jour comme les autres. Mais ça me fait plaisir de recevoir des gens et de voir des gens avoir du plaisir. Ça fait de ce jour "normal" un jour spécial en même temps. » Le Speakeasy est ouvert ce soir et demain de 17 h à 23 h. Le cahier de réservations déborde pour ce soir et il est presque plein pour demain. « En général, on travaille plus fort le 24 que le 25 », souligne David.

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David Badiane, directeur du Speakeasy.