Soixante-dix ans après ses premiers Jeux olympiques, la Montréalaise Rhoda Wurtele a de nouveau chaussé ses skis, hier, cette fois à l'inauguration de la Pente à neige.

Rhoda Wurtele et sa jumelle ont inspiré bien du monde. Ces jours-ci, ce sont pourtant les athlètes canadiens dépêchés à PyeongChang qui inspirent la Montréalaise de 96 ans, rencontrée hier alors qu'elle enfilait ses skis pour l'inauguration de la Pente à neige du parc Ignace-Bourget, dans l'arrondissement du Sud-Ouest.

« C'est très inspirant de les voir ressentir les frissons des Jeux. » Rhoda Wurtele n'a pas perdu son aplomb. Sa soeur Rhona et elle ont été les premières femmes à faire partie de l'équipe canadienne de ski alpin, aux Jeux olympiques de Saint-Moritz en Suisse, en 1948. Rhoda a aussi été des Jeux d'Oslo en Norvège, en 1952.

« Les Jeux, c'est une expérience inoubliable », témoigne l'ex-athlète, qui portait fièrement, hier, un col roulé blanc brodé des anneaux olympiques et de la feuille d'érable, même si 70 ans ont passé depuis qu'elle a dévalé les pentes suisses. « Ça ne dérange pas si tu gagnes ou pas, il y a tellement de choses qui peuvent arriver aux Jeux », assure-t-elle, sans regret.

Véritables pionnières, les jumelles Wurtele ont dominé leur sport dans les années 40 et 50, cumulant à elles deux plus d'une centaine de médailles remportées en compétition, mais aucune olympique. Le sort aura voulu qu'elles se blessent à l'entraînement après leur arrivée en Suisse. En 1952, Rhoda a terminé au neuvième rang de l'épreuve de la descente.

Depuis vendredi, Mme Wurtele suit avec attention les Jeux de PyeongChang de sa résidence de Pointe-Claire, où sa soeur occupe la chambre voisine. « Elle a un faible pour les soeurs Dufour-Lapointe », confie sa petite-fille qui l'accompagnait au moment de l'entretien. On aurait pu le deviner, puisque les jumelles Wurtele ont toujours été inséparables.

Pendant leur carrière, elles se sont échangé la première et deuxième marche des podiums. « Nous étions vraiment au même niveau », précise Rhoda, qui a excusé l'absence de sa soeur, hier. Elles ont été intronisées simultanément au Temple de la renommée du ski canadien et américain en 1969 et 1982, entre autres honneurs.

« Nous étions aussi assez audacieuses », ajoute-t-elle. Les jumelles Wurtele ont commencé à skier sur le mont Royal avec leurs frères. « Un jour, nous avions 12 ans, et mon frère nous a mises au défi de descendre la pente et de sauter du tremplin. Nous sommes allées et nous avons aimé ça », dit-elle. Elles venaient d'attraper le virus.

Les jumelles Wurtele ont dû faire leur place dans un monde où les femmes se faisaient rares. « Nous avons vraiment eu de la chance », convient-elle.

Si Rhoda a un conseil à donner à la gent féminine, c'est celui-ci :  « Si tu veux obtenir quelque chose, travaille pour y arriver. Fais des sacrifices, amuse-toi et fais-le. »

Hier, Rhoda n'allait pas rater l'occasion de faire quelques descentes en compagnie des apprentis skieurs venus s'exercer à la nouvelle Pente à neige. Du haut de ses 96 ans, elle a descendu la piste quatre ou cinq fois. « Il faut toujours être active, tu dois toujours bouger, sinon tu deviens usée », résume-t-elle en rigolant quand on lui demande le secret de sa longévité.

« C'est fantastique, ce qu'ils ont fait ici, en pleine ville. Ma soeur et moi, nous avons appris à skier dans une pente située en bas de la rue, à Montréal. Je suis vraiment impressionnée », a-t-elle ajouté, invitée à prendre la parole pour l'inauguration du site en plein air, qui célèbre également le retour du ski alpin dans la métropole.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Rhoda Wurtele a été photographiée avec quelques-uns de ses admirateurs, dont Dominique Anglade, ministre de l'Économie, de la Science et de l'Innovation.