Une autre contestation judiciaire du Réseau électrique métropolitain (REM) se pointe le bout du nez. Le propriétaire du terrain sur lequel doit être construit le Terminal Rive-Sud, à Brossard, conteste à la fois son expropriation et la « redevance de transport », soit la taxe qui doit servir à capter la plus-value foncière le long du parcours.

L'entreprise 8811571 Canada inc., dont l'actionnaire principal est Claude Gazaille, possède des terrains constituant l'essentiel du quadrant sud de l'intersection des autoroutes 10 et 30, à Brossard. Ces terrains, longtemps réservés à l'exploitation agricole, mais inexploités, sont ceux où la Caisse de dépôt et placement souhaite construire le terminal de l'antenne sud du REM, ainsi qu'un stationnement incitatif.

Dans une requête déposée mardi dernier, le jour même où la Cour supérieure a rejeté les arguments d'opposants au projet, l'entreprise conteste le projet sur plusieurs points.

D'abord, elle estime inconstitutionnelle la Loi concernant le Réseau électrique métropolitain adoptée par Québec. Cette loi prévoit à son article 8 l'impossibilité pour les propriétaires visés de contester l'avis d'expropriation.

Il s'agit « clairement », selon les demandeurs, d'« une tentative inconstitutionnelle de transformer le ministre en Cour supérieure ». Le gouvernement, argue-t-on, « ne peut retirer à la Cour supérieure le pouvoir de contrôler la légalité de l'acte d'expropriation ».

Si la Cour devait se rendre à cet argument, elle invaliderait du même coup possiblement l'ensemble des avis d'expropriation délivrés dans le cadre de ce projet.

L'entreprise de M. Gazaille souhaite justement contester son avis d'expropriation, parce qu'elle juge que la Caisse réclame des portions jusqu'à deux fois plus grandes que nécessaire de son terrain.

« En réalité, la défenderesse exproprie la propriété appartenant à la demanderesse dans le but de [la rendre disponible] pour une des filiales de la CDPQ pour un développement immobilier actuel, favorisant ainsi indûment les intérêts d'un tiers au détriment des intérêts de la demanderesse. »

- Extrait de la requête

La Caisse a rejeté ces arguments lorsqu'on l'a interrogée à ce sujet, hier.

« Les terrains acquis dans le cadre du REM le sont pour des fins de transport collectif et non pour du développement commercial, a écrit un porte-parole, Jean-Vincent Lacroix. Ceci est d'autant plus vrai pour la station terminale Rive-Sud, puisque le décret que nous avons obtenu pour pouvoir construire dans cette zone ne permet pas de construire des infrastructures autres que pour des fins de transport collectif. »

TAXE ILLÉGALE

Finalement, la requête s'attaque à la « redevance de transport », un mécanisme mis en place par Québec pour financer une partie des travaux du REM par la captation de la hausse des valeurs foncières sur les terrains avoisinants.

Ces redevances peuvent être appliquées lors de la construction, de la modification ou du changement d'usage d'un bâtiment impliquant des travaux d'au moins 750 000 $ dans une zone désignée, à proximité du REM et de ses gares.

Selon les contestataires, il s'agit là d'une taxe indirecte parce qu'elle « impose indirectement, de façon illégitime et illégale, aux entrepreneurs/promoteurs et par le fait même, aux seuls acheteurs ultimes, des coûts qui devraient être supportés par l'ensemble de la communauté ». 

Or, font-ils valoir, seul le gouvernement fédéral a l'autorité d'imposer une taxe indirecte.

L'entreprise de M. Gazaille n'avait pas répondu à notre appel au moment d'écrire ces lignes.