Le gouvernement fédéral se prépare à recevoir des demandeurs d'asile durant la saison froide, mais il ne faut pas y voir un signe qu'il s'attend à ce que des demandeurs continuent d'entrer au Canada au cours des prochains mois, selon le ministre Marc Garneau.

Le ministère des Travaux publics a publié jeudi un appel d'offres pour l'installation d'unités d'hébergement chauffées permettant d'accueillir 200 personnes à Saint-Bernard-de-Lacolle.

Cet appel d'offres stipule que «la durée des services pourrait aller jusqu'à une période de neuf mois» et être prolongée au besoin.

«On ne sait pas exactement ce qui va se passer dans les mois à venir, mais je crois vous seriez d'accord pour dire que tout gouvernement responsable doit essayer d'anticiper toute éventualité, a indiqué M. Garneau lors d'un point de presse vendredi. C'est ce que nous sommes en train de faire.»

Il était accompagné de la ministre de l'Immigration du Québec, Kathleen Weil, et du député fédéral Emmanuel Dubourg.

Les trois élus venaient de participer à la troisième réunion du groupe de travail formé le mois dernier pour gérer l'afflux de migrants à la frontière canado-américaine.

Le ministre Garneau a annoncé l'ouverture prochaine de nouveaux bureaux du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration dans le Complexe Guy-Favreau à Montréal pour le traitement des demandes de statut de réfugié.

Cela permettra aux demandeurs d'asile admissibles d'obtenir un permis de travail plus rapidement, a expliqué Mme Weil tout en se disant satisfaite par la réponse du gouvernement fédéral.

«On le sait de notre expérience, les gens veulent travailler, sont aptes à travailler (...), a-t-elle dit. Donc, ce sont des gens qui veulent être autonomes et qu'ils puissent subvenir à leurs propres besoins.»

Le ministre Garneau a également indiqué qu'Ottawa poursuivra sa campagne d'information auprès de la diaspora haïtienne aux États-Unis et ciblera également d'autres communautés immigrantes sans toutefois préciser lesquelles.

Le statut de protection temporaire offert par les États-Unis à des ressortissants de neuf autres pays est déjà expiré ou arrivera à échéance d'ici quelques mois. Il s'agit de ressortissants du Salvador, du Honduras, du Népal, du Nicaragua, de la Somalie, du Soudan, du Soudan du Sud, de la Syrie et du Yémen.

Le député Emmanuel Dubourg s'est rendu en Floride la semaine dernière pour dissuader les Haïtiens là-bas en leur disant «de ne pas vendre leurs biens, de ne pas quitter leur emploi et tenter de traverser la frontière de façon irrégulière», a-t-il indiqué.

«Donc, je leur dis que ce n'est pas la chose à faire parce que le Canada a un système d'immigration robuste et il y a des conséquences pour ces personnes-là à savoir qu'elles pourront être renvoyées dans leur pays d'origine en Haïti.»

Près de 3000 demandeurs d'asile ont traversé la frontière de façon irrégulière à Saint-Bernard-de-Lacolle en juillet, selon le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Un nombre qui aurait dépassé 5000 en août, selon une source au sein du gouvernement.

Le nombre de demandeurs d'asile a toutefois diminué de 250 à environ 100 par jour depuis environ une semaine, mais il est trop tôt pour constater une tendance, selon Ottawa.

Le Nouveau Parti démocratique dénonce l'improvisation dont le gouvernement semble faire preuve dans ce dossier.

«Tout le monde disait au gouvernement d'anticiper cette possibilité (que les migrants continuent d'arriver en hiver), maintenant on se trouve dans une situation où on doit combler la brèche de façon ad hoc et ça démontre les conséquences du manque de planification», a rappelé le député néo-démocrate Matthew Dubé.

Le député conservateur Pierre Paul-Hus estime pour sa part que le gouvernement envoie un message contradictoire.

«On fait des appels d'offres pour avoir des bâtiments chauffés, donc c'est quoi que ça passe comme message? C'est qu'on s'attend à en avoir d'autres et qu'on continue d'accepter le phénomène», a-t-il dit.

«On devrait plutôt arriver et dire: ici c'est un poste de frontière et vous ne rentrez pas comme ça, ça ne marche pas», a-t-il ajouté.

Un sondage réalisé auprès de 1505 Canadiens par la firme Angus Reid publié vendredi révèle qu'une majorité d'entre eux estime que le gouvernement fédéral est trop généreux avec les demandeurs d'asile et qu'il devrait prioriser la surveillance de la frontière canado-américaine.

Marc Garneau a rappelé que le Canada «a toujours misé sur des valeurs d'ouverture et de compassion». «C'est à nous de les rassurer que nous prenons toutes les mesures nécessaires et suivons toutes les procédures», a-t-il dit.