«Ça ressemblait à de la fumée et ça s'est mis à tourner. Ça faisait un cylindre. En tout, ça a duré 10 secondes.»

Un peu après 18h, mardi, Bruno Langevin, résidant de Lachute, se trouvait dans son salon quand de violentes rafales se sont levées. Il a alors assisté à ce qui, selon Environnement Canada, avait toutes les apparences d'une tornade. Les dégâts causés sur quelque 250 bâtisses ont forcé l'évacuation d'une quarantaine de personnes dans cette petite municipalité des Laurentides.

Lachute et l'arrondissement montréalais de Côte-des-Neiges - Notre-Dame-de-Grâce ont été particulièrement touchés par les violents orages qui se sont abattus mardi sur la grande région de Montréal, dans les Laurentides, dans Lanaudière et en Montérégie. Ces intempéries ont déraciné de nombreux arbres et provoqué des dizaines de milliers de pannes d'électricité.

Aux premières loges de la tempête, Bruno Langevin dit avoir vu «des débris de toutes sortes voler haut dans le ciel». La Sûreté du Québec affirme toutefois être intervenue à temps pour aider les résidants de Lachute, où plusieurs routes étaient encore fermées mardi soir. 

Selon Environnement Canada, tout semble indiquer qu'une tornade a bel et bien frappé cette région. «Tenant compte des vidéos et des photos reçues, tout porte à le croire, mais on ne peut pas le confirmer pour l'instant. On a besoin de se rendre sur les lieux et d'associer les vidéos aux dommages avant de confirmer à 100%», a déclaré un porte-parole de l'organisme fédéral.

Joint par La Presse, le maire de Lachute, Carl Péloquin, a affirmé que malgré les dommages, les intempéries n'avaient pas fait de blessés. Toutefois, il a dressé un bilan sombre des dommages matériels. «La moitié de la ville est sans électricité, une vingtaine de résidences ne sont pas réintégrables, soit à cause de toitures ou de devantures endommagées ou à cause d'arbres tombés. On a une quarantaine de sinistrés», a-t-il affirmé. «Les secteurs les plus touchés sont ceux de la rue de l'Expo et de la rue de l'Aéroparc».

Les sinistrés de Lachute ont pu passer la nuit à la Villa Mont-Joie, où la Croix-Rouge canadienne et la sécurité civile ont aménagé des espaces. «Pour l'instant, tout est sous contrôle. Tout est sécurisé», a assuré M. Péloquin.

Dévastation dans NDG

À Montréal, en fin d'après-midi, la scène était invraisemblable à l'angle de la rue Sherbrooke et de l'avenue Girouard, dans l'arrondissement de Côte-des-Neiges - Notre-Dame-De-Grâce. Au parc Girouard, des dizaines d'arbres avaient cédé sous les vents violents et les orages. «Ça va prendre 50 ans avant de repousser et redevenir comme avant, a dit en soupirant Yves Couture, un résidant du quartier. C'est triste.»

La large section dévastée du parc témoigne de la force des intempéries, qui n'ont pourtant «duré que deux ou trois minutes», d'après Christian Tylko, qui demeure juste en face du parc. L'homme a raconté à La Presse que les bourrasques ont tout détruit sur leur passage, puis que le calme est revenu en un clin d'oeil.

Davinder Jaura, propriétaire d'une boulangerie dans la rue Sherbrooke, atteste lui aussi de l'instantanéité des ravages. «En quelques secondes, c'était fini.» De sa boutique, il a pu voir de quelle façon les arbres, même les plus imposants, se sont fendus sous la pression du vent pour s'écraser les uns par-dessus les autres. 

La zone ravagée autour du parc a été fermée aux piétons. Les feux de circulation étaient hors service, l'un de ceux-ci presque arraché. Des policiers dirigeaient la circulation des automobilistes et des piétons, fréquemment interrompus par le passage de camions de pompiers. «On dirait une scène de film de guerre», a lâché M. Tylko en regardant autour de lui, du haut de ses escaliers.

115 000 clients d'Hydro affectés

À quelques pas de là, au croisement du chemin de la Côte-Saint-Antoine et de l'avenue Draper, plus personne ne pouvait circuler, comme dans plusieurs autres petites rues du quartier.

Avenue Draper, des dizaines d'arbres sont tombés sur les voitures, les maisons et la route, bloquant totalement la voie. La maison d'Anna Bonokoski n'était plus accessible par la porte avant. Au moment du passage de La Presse, son mari rafistolait une fenêtre brisée par une branche avec un sac de poubelle en plastique.

«J'étais sur les marches en avant et le vent a commencé à souffler. J'ai attrapé les chaises et tout ce que j'ai pu dehors et je suis rentrée», a raconté la femme. 

Elle a ensuite entendu des craquements, qu'elle a confondus avec de la grêle qui tombait, avant de se rendre compte qu'il s'agissait du bruit des branches d'arbres en train de fendre. L'une d'elles est tombée sur son toit. «Ça n'a pas encore traversé la vitre, mais c'est ce qui nous inquiète le plus», a-t-elle expliqué, tout en montrant du doigt la fenêtre de toit à travers laquelle on peut apercevoir les rameaux.

Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) rapporte plusieurs appels concernant des chutes d'arbres, mais aucun blessé n'était à déplorer mardi soir. «On est chanceux», a convenu Jean-Pierre Brabant, relationniste au SPVM, ajoutant qu'aucune entrave à la circulation causée par des montées d'eau n'était à signaler.

De son côté, Hydro-Québec a indiqué qu'environ 115 000 clients ont été privés d'électricité dans l'ensemble du Québec pendant la journée. Vers 21h mardi soir, près de 75 000 abonnés étaient toujours sans électricité. Ils étaient près de 50 000 à Montréal et 10 000 dans la région des Laurentides.