Les Haïtiens sont mal informés sur leurs chances d'être acceptés au Québec.

Une grande concertation veut contrer les fausses rumeurs dont est victime la diaspora haïtienne aux États-Unis. Parmi les moyens retenus, elle accueille aujourd'hui un important élu de New York. L'objectif : faire un portrait moins rose aux milliers d'Haïtiens migrants sur leurs chances d'être acceptés au Québec. Explications d'Édouard Staco, un initiateur du mouvement.

Qu'est-ce que la Concertation haïtienne pour les migrants 2017 ?

Il s'agit d'un regroupement d'une trentaine d'organisations et d'intervenants sociaux, politiques et économiques. Il a été mis en place pour améliorer l'efficacité de la réponse de la communauté haïtienne face à l'afflux de migrants au Québec. Un des éléments de sa stratégie d'intervention est d'informer la diaspora haïtienne des États-Unis. D'ailleurs, le comité reçoit aujourd'hui le Dr Mathieu Eugène pour une journée de travail. Il s'agit du premier élu haïtien de la ville de New York. C'est un conseiller municipal très respecté dans la communauté. On lui a demandé de venir voir, de s'informer et de témoigner ensuite de la réalité globale.

À quoi peut-il s'attendre ?

Il va bien voir que tout ce qui circule n'est pas vrai. Et que contrairement aux fausses rumeurs sur Facebook, Twitter et autres réseaux sociaux, le Canada n'accueillera pas 100 % des gens. On veut utiliser la voix forte de M. Eugène. À la suite de sa mission, il pourra relayer l'information dans la diaspora new-yorkaise qui a une grande influence sur celle de Miami et des autres. Son message permettra aux gens de prendre individuellement leur décision. Ce qu'on souhaite éviter, c'est que quelqu'un qui est installé aux États-Unis prenne le risque de partir en pensant qu'en arrivant au Canada, demain matin, il va avoir ses papiers.

Donc, il s'agit de donner l'heure juste ?

Oui, parce que pour certains d'entre eux, ça fonctionne aux États-Unis. Et pour ces gens-là, ça va être des reculs. On veut que les gens soient au courant de la situation. On a appris que beaucoup de gens ont été très mal informés de la réalité d'accueil des réfugiés au Canada. Pour certains, il y avait un angélisme face à ça. Allez-y ! Vous allez être reçus... La désinformation des réseaux sociaux a été relayée par certains leaders dans les diasporas. Et elle a fini par atteindre les gens. Alors, plusieurs ont dit : « Pourquoi prendre le risque de se faire expulser des États-Unis à partir du 28 janvier ? On va sécuriser notre famille en partant pour le Canada. »

Et à quoi doivent-ils s'attendre ?

La question de devenir réfugié ou pas est une question individuelle. Est-ce que la personne est menacée dans sa sécurité ? Mais cela dit, c'est important que les gens prennent une décision sur leur cas particulier. Parce que le statut de réfugié n'inclut pas la question économique. Venir d'un pays pauvre, ce n'est pas un motif pour être un réfugié. Et le choix que les gens font doit se faire à partir des bonnes informations. L'afflux des migrants vient en partie de fausses rumeurs. En vérité, ils ne seront pas tous acceptés. Quel sera le pourcentage de ceux qui pourront rester ? Est-ce 45 %, 50 %, 60 % ? Ça reste à voir.

Les autres enjeux

Rappeler l'importance du respect des obligations des autorités canadiennes et québécoises envers les revendicateurs d'asile et du statut de réfugié

Traiter avec célérité les dossiers des personnes sur le sol canadien

Appuyer les organismes dans la recherche de logements et dans l'accompagnement des familles des demandeurs

Demander au gouvernement canadien de travailler conjointement avec les États-Unis pour le renouvellement de la mesure Temporary Protection Status

Demander au gouvernement canadien de travailler avec les États-Unis afin de combattre les réseaux de passeurs

Rester alerte sur les suivis d'accompagnement à long terme

Source : Concertation haïtienne pour les migrants 2017 

Qui sont les membres de la Concertation haïtienne pour les migrants 2017 ?

Initiateurs : Frantz Benjamin, président du conseil de ville de Montréal ; Nathalie Pierre-Antoine, conseillère d'arrondissement ; Marjorie Villefranche, directrice générale de la Maison d'Haïti ; et Édouard Staco, président du Fonds 1804 pour la persévérance scolaire. Parmi les autres membres, on retrouve notamment le Centre N A Rive, le Bureau de la communauté haïtienne de Montréal, le Regroupement international des causes sociales, le Centre communautaire multiethnique de Montréal-Nord. Sans compter des entrepreneurs et des citoyens engagés.

Photo Edouard Plante-Fréchette, La Presse

Édouard Staco est un des initiateurs de la Concertation haïtienne pour les migrants 2017.