Alors que 300 personnes sont restées coincées sur l'autoroute 13 toute la nuit, le Service de sécurité incendie de Montréal (SSIM) dit n'avoir jamais reçu de demande officielle d'assistance. Ce sont plutôt les pompiers qui ont décidé de «s'imposer» vers 4 h 30 pour venir en aide aux automobilistes.

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Normalement, les autoroutes sont sous la responsabilité du ministère des Transports et de la Sûreté du Québec. Mais comme les secours se faisaient attendre depuis des heures, les pompiers de Montréal ont pris les choses en main. «On s'est imposés», raconte Christian Legault, chef aux opérations du SSIM.

«Si on a un doute que des gens sont en danger, on intervient», dit-il.

Vers 2 h 30 ce matin, la Sûreté du Québec (SQ) a avisé le SSIM que son aide pourrait être requise afin de lui prêter assistance sur l'autoroute 13, où de nombreuses voitures étaient immobilisées. Le corps policier disait être à peaufiner son plan d'intervention.

Sans nouvelles depuis deux heures, la centrale du SSIM a envoyé un chef aux opérations constater l'état de la situation par lui-même vers 4 h 30. Il a immédiatement décidé de dépêcher sur place les trois camions de la caserne 64 de Lachine. «C'est à sa propre initiative», confirme Christian Legault au sujet de l'intervention de son collègue au cours de la nuit.

Plus tôt aujourd'hui, il avait été mentionné que la demande était arrivée tardivement, mais elle n'aurait ainsi jamais été formulée.

C'est seulement avec l'arrivée des pompiers que l'ampleur de la situation a été constatée. Contrairement à la procédure habituelle, ceux-ci sont intervenus sans escorte policière. Plus de 300 véhicules se trouvaient immobilisés, dont certaines avec des enfants à bord. Il s'agissait principalement de familles qui rentraient de vacances et ont ainsi été prises par surprise par la tempête. Des bouteilles d'eau, qui servent habituellement à désaltérer les pompiers lors de leurs interventions, ont été distribuées aux naufragés de la tempête.

Les pompiers ont fait venir un autobus équipé d'une toilette afin de permettre aux gens coincés depuis la veille de se soulager. Une trentaine de personnes ont également accepté d'être évacuées vers un centre communautaire de Lachine, leur véhicule étant tombé en panne et n'arrivant ainsi plus à se garder au chaud. Les autres ont préféré demeurer à l'intérieur de leur véhicule.

Les véhicules abandonnés sur l'autoroute 13 ont été remorquées plus tôt ce matin. Pour récupérer leur véhicule, les propriétaires ont dû payer une facture de 218$, ce qui en a indigné plusieurs. En après-midi, Québec a annoncé que le gouvernement rembourserait les automobilistes pour ces frais de remorquage.

«C'est inacceptable que des gens aient été pris dans leur véhicule 13-14 heures. Je comprends qu'il y a eu carambolage et tout cela, mais on a besoin de se demander pourquoi tant de temps», déploré ce matin le maire Denis Coderre. Il est d'autant plus étonné que les voies en direction nord étaient déblayées pour leur part. Il est d'autant plus étonné que les voies en direction nord étaient déblayées pour leur part.

Les véhicules se sont enlisés dans la neige. Certains automobilistes ont par la suite manqué d'essence ou ont carrément abandonné leur voiture. À 9h, quelques automobilistes ont pu reprendre la route et peu avant 11h, les voies ont été complètement dégagées.

Selon ce que la Sûreté du Québec a expliqué à La Presse, les conditions météorologiques ont causé une immobilisation des voitures qui a duré assez longtemps pour que la neige s'accumule sur la route, provoquant un enlisement.

Pourtant, les premiers véhicules se sont immobilisés vers 17h hier. Karim Mirshak a été témoin de l'accrochage.

«L'accident impliquait un total de cinq véhicules. Un était à part et les quatre autres étaient collés ensemble en tête à queue», a-t-il expliqué dans un courriel à La Presse.

«La neige s'était beaucoup accumulée dû à l'absence de trafic pour la tamponner et les conditions étaient périlleuses.»

Une femme a raconté sur les ondes du 98,5 FM avoir été «prisonnière» dans un autobus durant près de dix heures sur la 13.

Le véhicule devait se rendre au terminus Lionel-Groulx, vers 21h, mais il est resté pris dans la neige, a raconté Marie-Christine Tremblay, qui a dit que ce sont finalement les pompiers qui ont secouru les passagers vers 7h ce matin.

Un homme dans la cinquantaine a passé la nuit dans sa fourgonnette avec pour seule nourriture une pomme. Il a raconté à notre photographe qu'il préférait rester dans son véhicule pour qu'il ne soit pas remorqué. Il ne comprend pas comment l'opération de sauvetage ait pu prendre autant de temps.

Emmanuel Dionne à passé la nuit au bureau plutôt que de dormir dans sa voiture sur l'autoroute. L'homme rentrait du travail, vers 19h45, lorsqu'il s'est butté à un bouchon monstre en prenant la 13. Il raconte avoir vu plusieurs sorties de routes. Des poids lourds bloquaient le chemin. Il a mis quatre heures à parcourir les 500 mètres menant à la prochaine sortie. Il n'avait presque plus d'essence. La neige l'a presque empêché de passer. Il raconte avoir été assez chanceux pour arriver à se frayer un chemin avec la voiture. «Un peu plus et je laissais mon auto là.»

Il est retourné au bureau, tout près, où il a passé la nuit sur un divan, incapable de se rentre chez lui dans Verdun.

Ce matin, il est complètement seul au travail. L'entreprise est fermée à cause de la neige, mais lui n'a pas encore réussi à retourner à la maison.

- Avec Vincent Larouche

Coderre défend les services municipaux

Le maire de Montréal, Denis Coderre, a pour sa part martelé, chronologie en main, que la Sécurité civile de Montréal n'avait rien à se reprocher.

«Il n'y a pas personne qui va défendre l'indéfendable. Ils (au gouvernement du Québec) vont faire leur bilan et je vais leur donner l'information que j'ai moi-même. En autant que je suis concerné, au niveau de la Sécurité civile de Montréal, tout a été fait adéquatement», a-t-il conclu.

Il a laissé entendre que c'est plutôt au ministère des Transports et peut-être à la Sûreté du Québec qu'il y avait eu des manquements.

«La première question, c'est pourquoi, au niveau du ministère des Transports du Québec, on n'a pas dit, quand c'était bloqué: «il y a des voitures qui sont prises là'», a-t-il demandé. Montréal, dit-il, ne dispose pas d'un système de caméras comme celui du ministère des Transports pour les autoroutes.

Selon la chronologie rapportée par le maire Coderre, à 23h50 la responsable de la Sécurité civile de Montréal a convoqué tous les acteurs du dossier et a demandé une mise en situation. Elle a invité le ministère des Transports du Québec. «Et c'est à ce moment-là qu'on apprend que l'Autoroute 13 est fermée. On ne parle strictement que de problèmes de déneigement. On ne dit pas qu'il y a du monde là» qui est coincé, a critiqué le maire Coderre, visiblement irrité.

«Ce qui est troublant, c'est pourquoi on n'a pas pu savoir ce qui s'est passé à ce niveau-là. Ce n'est pas à Montréal à s'occuper de ce dossier-là. On était là en appui de toute façon. Nous, on avait appliqué à la lettre notre plan d'intervention», a assuré le maire Coderre.

«À 1h40 du matin, tous nos services de sécurité civile, toutes nos capacités, tout était revenu à la normale» pour Montréal, a-t-il soutenu.

Pas moins de 317 appels ont été faits à la Sûreté du Québec.

Mais finalement, le Service d'incendie de Montréal a dû intervenir de son propre chef à 4 h 29. «On n'a pas attendu les gens de la Sûreté du Québec. On a amené l'eau et tout le reste; on a ouvert le centre d'hébergement à Lachine», a précisé le maire Coderre.

De même, 200 autobus de la Société de transport de Montréal sont restés embourbés dans la neige. Il en restait 60 au moment où le maire a donné son point de presse, à 15 h 30 mercredi.

Le maire s'est aussi dit soulagé de voir que la controverse concernant les factures de remorquage servies aux automobilistes coincés avait été réglée.

«L'autre affaire qui me fatiguait et ça n'a pas de maudit bon sens: t'es pogné là pendant 13 heures, pis après ça, tu te fais remorquer, tu te fais dire: «on vous remercie, on vous aime tellement qu'on va vous faire payer 218 $'. Ça n'a pas de maudit bon sens. Je suis très heureux et satisfait de voir à quel point le ministre (des Transports, Laurent) Lessard a répondu» à cet accroc, qui sera corrigé, a rapporté le maire Coderre.

- La Presse Canadienne