Ils avaient entre 39 et 60 ans. Six membres de la communauté musulmane de Québec ont été tués alors qu'ils pratiquaient leur religion. Dix-neuf autres personnes ont été blessées, dont cinq qui étaient toujours dans un état critique lundi matin.

Parmi les victimes : Azzedine Soufiane, figure bien connue de sa communauté. Père de famille d'origine marocaine, il était propriétaire d'une boucherie halal située tout près de la mosquée qu'il fréquentait depuis plusieurs années.

Hier, proches et amis tentaient tant bien que mal d'obtenir la confirmation de ce qu'ils redoutaient le plus. Certains échangeaient chaque parcelle d'information par téléphone ou sur Facebook. D'autres s'étaient réunis devant l'anneau de glace de Sainte-Foy, où étaient rassemblés les 39 survivants de l'attentat dans l'espoir d'en avoir le coeur net.

« UN MODÈLE POUR LA COMMUNAUTÉ »

Le nom d'Azzedine Soufiane a été parmi les premiers à circuler.

« C'est un ami avec qui j'ai étudié à l'université, avec qui j'ai travaillé, avec qui on était souvent ensemble, jusqu'à aujourd'hui, a confié Rachid Benamor, un ami très proche. On se voit ensemble presque quotidiennement. C'est un frère, c'est un ami. »

« Le plus gros problème, c'est qu'on n'arrive pas à avoir de l'information. Je me suis présenté sur les lieux du crime, on n'a pas pu avoir d'information. Je me suis déplacé à l'hôpital Laval, au CHUL, à l'Enfant-Jésus, on n'a pas plus d'information », poursuit-il.

« Et là, on est inquiets. La famille est inquiète, sa femme est complètement désespérée », a ajouté M. Benamor

« De toute façon, il n'y a pas de bonne nouvelle ce soir. »

L'épicerie-boucherie Assalam, chemin Sainte-Foy, est un endroit très fréquenté par la communauté musulmane.

« Chaque fois que j'allais faire des achats, il était toujours là pour parler aux gens », a raconté un de ses clients, Hamid Garrouma, qui anime une émission de musique arabe à la radio communautaire.

Il décrit le propriétaire comme « un modèle pour la communauté ». « C'était un gars magnifique, généreux, souriant avec tout le monde. »

« Je le connais depuis mon arrivée à Québec en 2000. J'étais étudiant étranger et lui, il aidait les gens, il était sympa avec tout le monde, toujours souriant. Ce n'était pas quelqu'un qui vend cher, il ne profitait pas des gens », a dit un autre client de la boucherie, l'avocat Chiheb Ayed, dont la femme se trouvait avec celle de la victime, hier soir, après le drame.

« NOUS VIVONS EN PAIX »

En 2009, après que le déménagement du Centre culturel islamique dans un plus grand local eut engendré des messages de haine et une campagne de distribution de tracts anti-musulmans, M. Soufiane avait louangé le Québec et son ouverture dans une entrevue accordée au Soleil.

« C'est dommage, avait-il dit au sujet des tracts intitulés "Intégration ou intégristes ?", car ça crée de la haine. Moi, ça fait 20 ans que je suis à Québec et je n'ai jamais eu de problème. Nous vivons en société, nous vivons en paix et nous souhaitons que ça continue comme ça », disait-il.

Huit ans plus tard, il est tombé sous les balles entre les murs de cette mosquée qu'il avait défendue.