Le pilote Frédérick Décoste, mort aux côtés du chanteur Bob Bissonnette dans l'écrasement de dimanche, connaissait bien les risques du métier : il s'était retrouvé plus d'une fois en position périlleuse aux commandes de son appareil et avait lui-même perdu son père dans un écrasement d'hélicoptère en 1990. Mais rien n'allait l'empêcher de voler.

« À terre... il n'était pas capable de rester là. Il fallait qu'il vole. C'était une passion », a raconté Guy Gonthier, ancien camarade de classe du disparu, qui a grandi à Sept-Îles aux côtés du pilote nord-côtier.

« Ça faisait partie de sa vie, tout ce qui volait. Il faisait ça depuis qu'il était jeune : il avait fait son cours privé après le secondaire. Ensuite, il se payait des heures de vol lui-même, pour conserver ses licences. Il en a fait une carrière », a ajouté Maxime Bélanger, un autre de ses grands amis.

PÈRE ET FILS DANS LE MÊME APPAREIL

Le vol était pourtant associé depuis 26 ans à une des pires tragédies de la vie du pilote de 35 ans. Le 8 août 1990, son père Michel Décoste, un contremaître d'Hydro-Québec, est mort dans l'écrasement d'un hélicoptère qui venait de décoller de l'aéroport de Sept-Îles. M. Décoste ne pilotait pas, il était simple passager dans un appareil nolisé pour transporter du matériel de la société d'État. Son pilote avait aussi péri.

L'aéronef était un Bell 206. Le même modèle que pilotait le fils Décoste lorsqu'il est mort à son tour. Une fin au triste air de déjà-vu pour sa mère, qui habite toujours la maison familiale.

Frédérick Décoste chérissait toujours la mémoire de son père, selon ses amis.

« Toutes les fois où il venait à Sept-Îles, il allait voir la croix de bois qui a été plantée là où son père est mort. »

- Guy Gonthier, ancien camarde de classe de Frédérick Décoste

Dès ses débuts comme pilote, Frédérick Décoste avait été impliqué dans un accident d'hélicoptère sur la Côte-Nord, dont plusieurs se souviennent dans la région. Heureusement, personne n'avait été blessé.

Puis, en 2014, il avait frôlé la catastrophe en tenant d'atterrir au Parc de l'Exposition de Trois-Rivières. Avec l'homme d'affaires Jean Tremblay, il était venu assister à un match des Capitales de Québec contre les Aigles de Trois-Rivières. En descendant vers le sol, le patin de l'appareil s'était emmêlé dans un fil du système de sonorisation. Un témoin au sol avait réussi à libérer le patin à temps.

« Je n'ai jamais vu le fil. Pourtant, j'ai fait le tour plusieurs fois, mais quand je l'ai vu, il était trop tard. On sentait la machine tirée par le fil. Une chance que j'y suis allé tranquillement, sinon l'hélicoptère aurait pu virer », avait-il raconté au quotidien Le Nouvelliste.

COMME UN OISEAU MIGRATEUR

Ni cet incident, ni le précédent, ni la mort de son père ne l'avaient rendu particulièrement craintif, selon ses amis. « Il n'a jamais vraiment eu peur », a affirmé Guy Gonthier.

« Il savait qu'un jour, une badluck pouvait arriver. Ça fait partie des dangers, on travaille dans les transports, on a perdu plein de chums, dans des accidents de moto, des accidents de chemin de fer », a expliqué Maxime Bélanger.

Hier, de nombreux collègues, connaissances et amis ont publié des messages sur les réseaux sociaux pour rendre hommage au défunt, « un gars qui avait son franc-parler et un rire très reconnaissable, un bon vivant que tout le monde connaissait, un épicurien qui aimait bien manger », selon M. Bélanger.

Sur son propre profil Facebook, le disparu s'était dit au cours de la dernière année « heureux comme un oiseau migrateur ».

« Je ne suis pas célibataire. Je suis dans une relation à long terme avec l'action, l'aventure et le fun », lisait-on aussi sur son profil.