Une demi-douzaine de femmes étaient assises dans la pelouse du mont Royal, décontractées et rigolant, comme c'est d'ordinaire le cas au traditionnel rendez-vous dominical des tam-tam. Seul détail discordant : elles avaient la poitrine dénudée.

« Je suis confortable comme ça, ça devrait juste être permis, raconte Erika B., vêtue seulement d'une longue jupe. Le monde autour prend des photos parce que c'est supposément inusité, mais ça ne devrait pas avoir cet effet-là, justement. »

À l'instar de femmes dans 60 autres villes dans le monde, une dizaine de Montréalaises ont déboutonné leur blouse, hier, pour revendiquer le droit de se promener torse nu en public, au même titre que les hommes. La manifestation initialement organisée par GoTopless.org - une organisation mise sur pied en 2007 par le gourou Raël (voir capsule à la fin du texte) - a été annulée à cause de la pluie annoncée, mais quelques participantes ont tout de même décidé de se réunir pour la cause.

« Je pense qu'aucun de nous, ici, ne fait partie du mouvement raëlien. C'est plus pour la liberté de la femme et non pour n'importe quel autre mouvement qu'on est ici », a précisé la manifestante Maude-Amélie Leblanc-Lapointe.

INTERDIT AU QUÉBEC

Au Québec, si une femme se promène torse nu en public, elle s'expose à une accusation d'infraction sommaire de grossière indécence et à un dossier criminel. Un homme ne fera face à semblable accusation que s'il s'exhibe à partir du bas de la ceinture.

« À New York, à Toronto, les femmes ont le droit de se promener topless, [...] ici, ça choque parce qu'on n'est pas habitués, mais il faut faire parler de la cause », défend pour sa part une manifestante qui avait caché ses mamelons avec deux autocollants en forme de coeur.

« Même si c'était accepté, mon but n'est pas d'aller dans un parc et de me mettre topless. Je suis ici pour la cause, pour l'égalité des hommes et des femmes », a ajouté Marie-Soleil Quirillon-Lafortune, une autre participante.

ATTROUPEMENT DE BADAUDS

Le petit groupe installé devant le monument George-Étienne Cartier, au coeur de la fête des tam-tam, a rapidement attiré les curieux. Certains badauds, téléphone ou caméra à la main, ne se gênaient pas pour immortaliser la scène qui, à un certain moment, avait davantage des apparences de cirque que de manifestation.

« Tantôt, un gars avec son téléphone s'est carrément approché à deux pouces de mes seins. Il y a quand même des limites », a raconté Mme Quirillon-Lafortune, qui a vu là la preuve que « les seins sont vraiment sexualisés en Amérique et [que] ces gens-là n'étaient pas là pour les bonnes raisons ».

Même son de cloche pour Paméla Cheney, selon qui les seins ne représentent pas un organe sexuel, mais simplement un organe féminin qu'il ne devrait pas être tabou d'exposer.

« On devrait pouvoir se promener, enlever notre chandail, être confortable dans nos corps et ne pas se faire regarder ou prendre en photo comme aujourd'hui. On n'est pas des animaux », souligne la jeune femme, qui était accompagnée de son conjoint.

Photo Olivier PontBriand, La Presse

Le petit groupe installé devant le monument à George-Étienne Cartier, au cœur de la fête des tam-tam, a rapidement attiré les curieux. Certains badauds, téléphone ou caméra à la main, ne se gênaient pas pour immortaliser la scène.

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QU'EST-CE QUE GOTOPLESS.ORG ?

GoTopless.org a été fondé en 2007 par le mouvement raëlien. Depuis neuf ans, le dimanche le plus proche du 26 août - date de la Journée de l'égalité de la femme, instaurée par le Congrès américain -, GoTopless.org organise une marche pour revendiquer que les femmes aient les mêmes droits constitutionnels que les hommes de se promener torse nu en public. L'événement se tient depuis trois ans à Montréal. Cette année, une soixantaine de villes dans le monde ont participé.