Plusieurs entreprises de construction se plaignent de délais interminables pour obtenir leur autorisation de l'Autorité des marchés financiers (AMF) donnant accès aux contrats publics, ce qui les empêche de participer aux appels d'offres gouvernementaux de plus de 5 millions de dollars. Ulcérée, l'une d'elles demande maintenant au tribunal de forcer les fonctionnaires à travailler plus vite.

« On est comme dans le néant. Ça fait quatre mois qu'on a envoyé notre demande et on n'a toujours pas de nouvelles. On a été obligés de mettre une croix sur plusieurs contrats », raconte Guillaume Nadon, président de Devcor, une entreprise de construction qui a déjà réalisé plusieurs ouvrages pour des organismes publics et parapublics par le passé.

Depuis octobre 2014, toute entreprise qui souhaite obtenir un contrat de construction de 5 millions et plus d'un organisme gouvernemental doit d'abord obtenir une autorisation de contracter avec un organisme public, délivrée par l'AMF.

L'AMF, avant d'émettre une autorisation, demande l'avis de l'Unité permanente anticorruption (UPAC), qui vérifie « l'intégrité » des demandeurs, notamment en matière d'infractions récentes aux lois et règlements.

PRIVÉE D'IMPORTANTS REVENUS

Le 28 janvier dernier, Devcor a acheminé sa demande à l'AMF. Depuis, elle attend, sans que rien ne bouge de façon apparente, « ce qui la prive d'une importante source de revenus », précise la requête déposée à la Cour supérieure par l'entreprise.

Le 5 mai, Devcor a envoyé une mise en demeure à l'AMF et à l'UPAC en leur demandant de répondre à sa demande au plus vite. L'AMF a répondu qu'elle ne pouvait rien faire tant que l'UPAC n'avait pas donné son avis sur la demande, ce qui n'a toujours pas été fait. L'UPAC n'a pas commenté le dossier du demandeur et ce qui lui demandait tant de temps.

Devcor a donc déposé une requête en Cour supérieure. L'entreprise demande à la cour de forcer l'UPAC et l'AMF à prendre une décision quant à sa demande, quelle qu'elle soit, d'ici 40 jours.

Questionné par La Presse, le porte-parole de l'AMF, Sylvain Théberge, a confirmé que l'organisme attend toujours l'avis de l'UPAC, « qui mène ses vérifications de probité comme dans chaque dossier ».

« Il n'y a aucun blocage ni paralysie en cause ici », assure-t-il.

Un dossier mal préparé, la complexité de la structure d'une entreprise, le nombre de dirigeants à vérifier, l'implication d'autres organismes gouvernementaux comme Revenu Québec ou la Régie du bâtiment, peuvent influer sur les délais.

D'AUTRES CAS SIGNALÉS

L'UPAC a refusé de commenter le travail de son unité de vérification.

La cause de Devcor doit être entendue vendredi prochain, soit le 3 juin.

À la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec, le vice-président exécutif Luc Martin affirme que ce dossier est loin d'être un cas isolé. « C'est un problème dont on entend de plus en plus parler. On dirait qu'au début, ils ont mis du monde qui travaillaient là-dessus, alors que maintenant, je ne sais pas s'ils ont réduit le personnel ou quoi, mais les attestations ne sortent pas ! »