Après des années de tourmente, l'Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ) tente de redresser son image et sa crédibilité en proposant une nouvelle formule pour l'élection de son conseil d'administration. Pour la première fois depuis la création de l'Ordre en 1920, les membres sont appelés à voter de façon électronique et à choisir la personne à la présidence au suffrage universel.

Ces changements découlent de décisions prises lors de l'assemblée générale annuelle de 2014. Parmi les autres nouveautés, notons que le président occupera ses fonctions de façon permanente. « Le président devra être en mesure de consacrer tout son temps et toutes ses énergies à l'Ordre », indique-t-on.

Salaire de 207 000 $

Par conséquent, de nouvelles conditions sont rattachées au poste : à compter de juin prochain, le président de l'OIQ recevra un salaire annuel de 207 000 $, incluant les avantages sociaux. S'ajoute une prime de transition équivalente à trois mois de salaire à la fin du mandat à la présidence.

Il a été impossible de comparer la rémunération avec les présidents des autres ordres professionnels : comme l'a rappelé le Collège des médecins, le Code des professions n'oblige pas à révéler les sommes versées aux dirigeants.

Pour devenir candidat à la présidence de l'OIQ, les aspirants au poste devront récolter l'appui préalable de 30 membres en règle par rapport aux cinq exigés auparavant.

La campagne électorale est ouverte depuis le 4 mars. Outre la présidence, sept postes d'administrateurs sont à pourvoir : quatre pour Montréal et un pour chacune des régions de Québec, de l'Outaouais et de l'Abitibi-Témiscamingue. Le scrutin se déroulera entre le 6 et le 27 mai.

Motus et bouche cousue

Officiellement, les candidatures ne seront pas dévoilées avant la fin de mars. Mais déjà l'actuel président, Jean-François Proulx et la première vice-présidente, Kathy Baig, sont des candidats pressentis.

M. Proulx préside la firme Consultants GORD & associés, constituée en 2002. M. Proulx est également le fondateur d'un mouvement militant appelé GROLO, c'est-à-dire Groupe qui veut remettre de l'ordre à l'Ordre. M. Proulx n'a pas rappelé La Presse.

Quant à Mme Baig, elle est gestionnaire de projets à Aéroports de Montréal. Jointe à son travail, la jeune ingénieure a confirmé qu'elle sera candidate. Du même souffle, elle a précisé que le conseil d'administration a statué que les candidats ne peuvent pas accorder d'entrevue aux médias.

On marche sur des oeufs depuis plusieurs années à l'Ordre. L'organisation a connu des années difficiles avec la multiplication des scandales de collusion, de corruption et de financement illégal de partis politiques impliquant des firmes d'ingénierie et des ingénieurs. Les travaux de la commission Charbonneau ont permis de largement détailler les manoeuvres douteuses de certains membres de la profession. Du coup, le nombre de plaintes a explosé, obligeant l'Ordre à investir dans des enquêtes et exposant, surtout, l'inaction de l'OIQ depuis des décennies.

La crise a toutefois connu un sommet en 2014, lors d'une assemblée extraordinaire. Les ingénieurs ont alors voté la destitution du comité exécutif et du directeur général de l'Ordre, André Rainville (devenu PDG de l'Association des firmes de génie-conseil du Québec). La grogne était notamment liée à une proposition d'augmenter la cotisation annuelle des membres pour financer un programme d'audit volontaire des firmes de génie-conseil pour redorer le blason de ces dernières.

Par la suite, le gouvernement a mandaté l'Office des professions pour guider l'OIQ dans son redressement. Le rapport des deux accompagnateurs invitait à une révision en profondeur des façons de faire. Parmi les changements proposés, il était question de verser un salaire à la personne à la présidence pour que son rôle soit permanent auprès des membres et assurer l'orientation de l'Ordre.