Les trois anciens dirigeants de la Sûreté du Québec (SQ) accusés d'usage abusif du fonds de dépenses secrètes de l'organisation affirment qu'il n'était pas inusité de piger dans cette réserve de plusieurs millions pour payer une foule de dépenses d'ordre administratif qui échappaient par le fait même à l'examen public des finances.

Cette ligne de défense est évoquée dans des documents déposés à la cour par les accusés et rendus publics hier en réponse aux démarches de plusieurs médias.

Richard Deschênes, ancien patron de la SQ, ainsi que les anciens cadres supérieurs Steven Chabot et Alfred Tremblay sont accusés d'avoir utilisé le fonds secret de la SQ pour verser illégalement une indemnité à M. Chabot liée à son travail.

L'affaire remonte à 2012. Après son arrivée au pouvoir, le Parti québécois avait remplacé Richard Deschênes par Mario Laprise à la tête de la SQ.

Peu après, une enquête avait été ouverte sur l'utilisation du fonds par les anciens cadres supérieurs. Les nouveaux responsables avaient expliqué que cette réserve d'argent aurait dû servir exclusivement à des dépenses délicates liées aux enquêtes, par exemple le paiement de sources ou l'achat de drogue dans une opération d'infiltration.

Autres usages

Dans les documents judiciaires rendus publics hier, les accusés répliquent toutefois que le fonds de dépenses secrètes était fréquemment utilisé depuis des années pour des dépenses de nature administrative ou liées à la sécurité de l'État. « Le principal récipiendaire du volet sécurité fut le Parti québécois », a souligné l'accusé Alfred Tremblay dans un extrait de ses notes personnelles reproduit dans les documents.

M. Tremblay affirme aussi que les frais d'installation du système d'alarme chez l'ancien sous-ministre à la Sécurité publique Martin Prud'homme (aujourd'hui directeur général de la SQ) ont été payés à même ce fonds de dépenses secrètes.

Quant à l'idée de verser une prime financière non prévue dans son contrat à un cadre supérieur au moment de son départ, elle était courante et s'est répétée à diverses reprises, soulignent les accusés, sans préciser si l'argent avait déjà été puisé dans le fonds secret par le passé.

« Les autorités compétentes (Ministère ou sous-ministre) ont, à différentes occasions, été mises au parfum des ententes extracontractuelles survenues entre des officiers et la SQ », précise l'avocat des accusés.

Les accusés, dont le procès est prévu pour 2017, soutiennent qu'ils ont été victimes d'un règlement de comptes de la part de personnes avec qui deux d'entre eux étaient en conflit depuis leur passage à la direction des enquêtes criminelles de la SQ.