Terrains vendus à rabais, dépenses injustifiées, règles d'appels d'offres contournées: la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu a contrevenu à la loi à diverses reprises en 2009 et 2010 dans son projet de revitalisation de l'ancienne usine Singer, conclut une vérification du ministère des Affaires municipales.

Une révision des contrats octroyés par cette municipalité de la Montérégie en 2010 et 2011 a mis au jour plusieurs irrégularités dans le projet de relance du site de l'ancienne usine Singer, fermée en 1986. Le rapport rendu public hier au terme d'une vérification de trois ans conclut que Saint-Jean-sur-Richelieu a contrevenu à la loi en accordant des subventions interdites à deux promoteurs.

La Ville a en effet vendu à peine 1$ deux immeubles qui en valaient au total 2,8 millions. Le vérificateur nommé par Québec a jugé ces transactions d'autant plus étonnantes que Saint-Jean avait elle-même acquis en 2007 un terrain voisin de taille similaire pour 855 000$ afin d'y aménager un parc. De plus, la municipalité a vendu à un Centre de la petite enfance pour 227 000$, dans le même secteur, un terrain 10 fois plus petit que celui cédé contre 1$ à un promoteur privé.

«Aide non permise»

«Nous sommes d'avis que la Ville a accordé une forme d'aide au promoteur [...]. Il s'agit d'une forme d'aide non permise par la Loi sur l'interdiction de subventions municipales», indique le rapport.

Le vérificateur mandaté par Québec a noté aussi plusieurs dépenses injustifiées qui représentent à son avis des subventions interdites.

> En 2009 et en 2010, Saint-Jean-sur-Richelieu a déboursé 165 000$ pour retenir les services d'une firme afin de rattraper le retard dans les travaux réalisés par le promoteur.

> En avril 2010, la Ville a payé 466 000$ au promoteur pour des travaux d'aménagement dans des locaux pour lesquels elle n'était pourtant ni propriétaire ni locataire, une décision que le vérificateur s'explique mal.

> En mai 2010, Saint-Jean-sur-Richelieu a versé 303 000$ en loyer alors que l'aménagement des locaux n'était même pas terminé.

Autre problème, la vérification a constaté que la Ville avait contourné les règles sur les appels d'offres en signant un bail avec un établissement de santé pour le céder aussitôt à un des promoteurs privés contre 1$. Le vérificateur souligne que le bail de dix ans avec l'établissement de santé rapportera sur cette période la somme de 5,6 millions au promoteur. Ce montant pourrait doubler, puisque le contrat prévoit deux clauses de renouvellement de cinq ans.

Saint-Jean-sur-Richelieu se défend

Le ministère des Affaires municipales dit avoir transmis les conclusions de cette vérification à ses avocats.

Saint-Jean-sur-Richelieu a défendu ses gestes en disant avoir voulu «jouer le rôle de catalyseur» pour la renaissance de son plus vieux quartier. La municipalité rappelle que les bâtiments de l'ancienne usine Singer qui dataient de 1904 étaient abandonnés et présentaient des risques d'effondrement. Ceux-ci ne valaient plus que 100$ en raison de la forte contamination du site. Aujourd'hui, les trois nouveaux bâtiments construits valent 59 millions et rapportent près d'un million en taxes par année.

La Ville estime que les résultats de la vérification représentent simplement «un débat d'interprétation juridique».

1904

Construction des bâtiments de l'usine Singer

1986

Fermeture de l'usine Singer

2003

Saint-Jean-sur-Richelieu devient propriétaire du site

2008

Saint-Jean-sur-Richelieu signe une entente avec des promoteurs pour relancer ce site

2010

Fin de la construction du premier bâtiment qui est aussitôt transféré au promoteur avec le bail d'un établissement de santé

2012

Le ministère des Affaires municipales déclenche une vérification dont les résultats viennent d'être rendus publics