Le gouvernement Harper veut savoir ce que l'ancien premier ministre libéral Jean Chrétien a dit lors de son entretien de jeudi avec le président russe Vladimir Poutine à Moscou.

Et le ministre fédéral de la Défense, Jason Kenney, espère que M. Chrétien a profité de cette occasion pour livrer au président russe le même message que martèlent les conservateurs depuis un bon moment, soit de retirer les soldats russes de l'Ukraine.

L'information émanant de l'agence de presse officielle de la Russie sur la tenue d'une rencontre, jeudi, entre M. Chrétien et M. Poutine dans l'un des palais près de Moscou a semblé prendre les conservateurs au dépourvu.

La rencontre est une gifle au visage du gouvernement conservateur du premier ministre Stephen Harper, qui essaie d'isoler politiquement le leader russe, le blâmant pour les troubles en Ukraine et l'annexion de la Crimée par la Russie l'an dernier.

M. Harper a évité tout contact avec le président Poutine, sauf pour une poignée de main brève et mémorable au sommet du G20 en Australie l'an dernier, lors duquel il a laconiquement dit au leader russe de «sortir» de l'Ukraine.

Un porte-parole de M. Chrétien n'a pas répondu à une demande de commentaire.

«Je n'ai pas été mis au fait de ce qui est survenu. Je ne sais pas trop si M. Chrétien a choisi de tenir au courant notre personnel à Moscou. Nous serions curieux de savoir ce qui a été discuté», a affirmé M. Kenney durant un symposium à Ottawa sur les relations de sécurité du Canada avec l'Union européenne.

«Tout ce que je peux vous dire, c'est que le gouvernement du Canada a profité de toute occasion avec M. Poutine, comme le bref échange du premier ministre Harper avec le président russe en marge du G20 à Melbourne, pour exprimer très clairement notre position que la Russie doit sortir de l'Ukraine», a dit le ministre.

«Nous serions à même de nous attendre à ce que M. Chrétien ait - de son propre chef - profité de l'occasion pour livrer le même message», a-t-il poursuivi.

Dans une photographie diffusée par l'agence de nouvelles russe TASS, on peut voir M. Poutine souriant à M. Chrétien, alors que les deux hommes sont assis sur des fauteuils dorés, dans une salle richement décorée.

Une autre agence de presse russe a diffusé une vidéo de la rencontre sur YouTube.

Les deux hommes ont échangé leurs points de vue sur le statut des affaires internationales et ont discuté des points douloureux de la situation internationale actuelle, a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitry Peskov, tel que rapporté par l'agence TASS.

«Il est bien connu qu'ils ont des relations amicales, ou, je dirais même, des relations de partenariat», a-t-il ajouté.

Le porte-parole de M. Harper, Stephen Lecce, a indiqué que le gouvernement fédéral voulait savoir ce que M. Chrétien avait dit à M. Poutine.

«M. Chrétien ne représentait d'aucune façon le gouvernement du Canada à cette rencontre, a dit M. Lecce par courriel. La position de notre gouvernement sur le régime Poutine est claire.»

Contrairement aux autres leaders du G7, M. Harper a décidé de ne pas discuter avec M. Poutine de la crise en Ukraine et a choisi des mots durs pour blâmer personnellement le président russe pour ce qui s'est produit dans la région.

Les Russes ont répliqué, le plus récemment lorsque leur ambassade à Ottawa a déclaré qu'il était à la fois «contre-productif et déplorable» que le gouvernement canadien déploie 200 soldats en Ukraine comme instructeurs pour améliorer les techniques de combat des forces ukrainiennes.

Le ministre des Affaires étrangères de l'Ukraine, Pavlo Klimkin, en visite jeudi à Ottawa, a déclaré que les formateurs de l'armée canadienne allaient permettre d'élever ses troupes à un autre niveau pour qu'elles puissent mieux repousser ses agresseurs russes.

M. Klimkin dit que ce geste peut difficilement être considéré comme provocateur, considérant que la Russie a déjà violé la frontière de l'Ukraine en envoyant des mercenaires et des armes lourdes.

M. Kenney a précisé que les soldats canadiens seraient postés à environ 1300 kilomètres de la région instable de l'est de l'Ukraine.

M. Klimkin était à Ottawa pour rencontrer M. Nicholson, qui a annoncé sept nouveaux projets d'une valeur de 14 millions $ pour renforcer la situation des droits de la personne, améliorer l'accès à la justice et offrir du soutien à la société civile en Ukraine.