Dignitaires, gens d'Église et membres du public se sont rendus, vendredi après-midi, à la cathédrale Marie-Reine-du-Monde, à Montréal, où sont célébrées les funérailles du cardinal Jean-Claude Turcotte, décédé le 8 avril dernier à l'âge de 78 ans.

Il y a plusieurs façons de se remémorer le cardinal Jean-Claude Turcotte, car il «réunissait en lui plusieurs personnages: l'homme, le Québécois, le prêtre, le prince de l'Église».

L'ancien premier ministre du Québec Lucien Bouchard a ainsi rendu hommage à son ami et ancien archevêque de Montréal, décédé le 8 avril dernier à l'âge de 78 ans. Les funérailles ont été célébrées à la cathédrale Marie-Reine-du-Monde de Montréal.

«Pour moi, le trait commun des différentes facettes de cette riche personnalité, c'est la fidélité», a-t-il ajouté.

L'ex-politicien a vanté la sensibilité de son ami à la misère et aux épreuves humaines, son refus de toute prétention et la frugalité de sa vie personnelle.

«Cet homme était aussi très conscient de nos particularismes québécois, de notre devoir de partager, dans l'harmonie et le respect, une citoyenneté commune aux francophones, aux anglophones et aux minorités ethno-culturelles. Au-delà de son ouverture à l'ensemble du Québec, il était resté marqué par les milieux populaires dont il avait conservé le naturel, la convivialité et le franc-parler», a dit M. Bouchard.

Plusieurs dignitaires et gens d'Église, en plus de membres du public, ont assisté aux funérailles. Le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, l'ancien premier ministre Bernard Landry, le maire de Montréal, Denis Coderre, l'ex-maire Gérald Tremblay ainsi que le chef de l'opposition officielle à Ottawa, Thomas Mulcair, ont tenu à rendre un dernier hommage au cardinal, tout comme le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, le ministre fédéral Steven Blaney et l'ancien directeur général du Canadien de Montréal Réjean Houle.

Au cours de la cérémonie, sobre et solennelle, ponctuée de chants religieux, Soeur Nicole Fournier a rappelé elle aussi la bienveillance du cardinal et son dévouement envers les plus démunis. L'ancienne directrice générale de l'Accueil Bonneau a notamment raconté comment, lors de l'explosion ayant détruit la façade de l'établissement, en 1998, elle avait vite compris que Mgr Turcotte allait «rapidement passer à l'action, sans tergiverser».

«Vous aviez foi en Dieu et foi en l'être humain. Vous aviez sur les personnes un regard bienveillant, un regard qui ne jugeait  pas. Vous étiez un homme disponible pour accueillir, encourager, conseiller. Vous avez soutenu bien des causes sociales, surtout celles qui rejoignent les plus démunis, en particulier les personnes itinérantes. Vous saviez susciter la solidarité et l'entraide», a-t-elle résumé.

Le neveu du cardinal, Pierre Turcotte, a lu une lettre au nom de son père, François, l'aîné de la famille Turcotte, dans laquelle il est revenu sur l'enfance de l'homme d'Église. L'archevêque de Halifax et ancien vicaire général du diocèse de Montréal, Mgr Anthony Mancini, et Mgr Jean Fortier, lui aussi ex-vicaire général du diocèse, ont aussi livré des témoignages.

Plus de 500 places avaient été réservées pour le public à l'intérieur de la cathédrale, et un écran géant avait été placé à l'extérieur, où il n'y avait toutefois qu'une centaine de personnes.

Devant l'église, avant la cérémonie, le premier ministre Couillard a parlé de la «profonde humanité» de Mgr Turcotte et souligné son empathie et sa compassion, des qualités qui «manquent dans la société», selon lui.

«Il a incarné l'Évangile, soit de penser à tout le monde dans la société, de se tenir près des plus défavorisés. C'est quelqu'un qui est arrivé au sommet de la hiérarchie de l'Église catholique, mais par la voie de l'engagement dans la communauté», a rappelé le premier ministre.

Thomas Mulcair a, quant à lui, mentionné sa gentillesse et sa simplicité, le décrivant comme un «homme merveilleux».

«C'est un ami de longue date. Je me vais me rappeler d'un homme bon et d'une grande dignité. Quelqu'un qui était toujours là pour les autres. Je perds plus qu'un ami, je perds un frère», a déclaré le maire Denis Coderre.

Plus tôt, jeudi, plusieurs personnes avaient visité en chapelle ardente la dépouille du cardinal, qui a été archevêque de Montréal pendant 22 ans. Son cercueil était gardé par des membres en uniforme des chevaliers de Colomb, une organisation à laquelle il appartenait.

Le pape François a exprimé ses condoléances par communiqué peu après l'annonce du décès du cardinal, soulignant la dévotion avec laquelle l'archevêque de Montréal a servi l'Église.

Jean-Claude Turcotte a été ordonné prêtre en mai 1959 et a occupé différentes fonctions pastorales avant d'être nommé évêque de Montréal en juin 1982, puis archevêque de la ville huit ans plus tard par le pape Jean-Paul II.

Il est devenu cardinal en octobre 1994. Il a fait les manchettes en 2008 lorsqu'il a rendu son insigne de l'Ordre du Canada pour protester après que le même honneur eut été décerné au Dr Henry Morgentaler, pionnier de l'avortement au pays.

En 2012, à l'âge de 75 ans, il a été remplacé par Christian Lépine à l'archevêché de Montréal.

Réactions recueillies sur le parvis

«Je ne l'ai pas rencontré très souvent (...), mais on était frappé par l'humanité profonde qui se dégageait de lui. Il a incarné l'Évangile, soit de penser à tout le monde dans la société, de se tenir près des plus défavorisés. C'est quelqu'un qui est arrivé au sommet de la hiérarchie de l'Église catholique, mais par la voie de l'engagement dans la communauté. L'empathie et la compassion, c'est des qualités qu'il faut retrouver dans nos sociétés.»

- Philippe Couillard, premier ministre du Québec.

«C'est un ami de longue date. Je me vais me rappeler d'un homme bon et d'une grande dignité. Quelqu'un qui était toujours là pour les autres. Je perds plus qu'un ami, je perds un frère. Il transcendait la religion. Beaucoup de gens s'identifiaient à lui. J'ai vu quelqu'un de très progressiste, quelqu'un qui a fait avancer à la fois l'Église et Montréal. C'était quelqu'un qui adorait le sport, alors on se parlait souvent du Canadien de Montréal. Je suis sûr qu'on a une »plogue« en haut pour parler aux fantômes afin que l'on s'assure de gagner le match (vendredi soir).»

- Denis Coderre, maire de Montréal.

«(Je retiens) sa gentillesse et sa simplicité. Il était toujours près des gens. Catherine (Pinhas, son épouse) et moi avons eu l'occasion de lui parler plusieurs fois. Nous l'avons croisé une fois en voyage en Europe. Il est venu s'asseoir avec nous dans l'aéroport pour discuter. Très généreux et ouvert. C'était un homme merveilleux.»

- Thomas Mulcair, chef du Nouveau Parti démocratique et de l'opposition officielle

«Il y a une dizaine d'années, son bureau avait communiqué avec le mien à l'époque où j'étais aux communications à la Sûreté du Québec. Mgr Turcotte voulait avoir une discussion avec moi sur les médias d'information. Il croyait important de pouvoir mieux s'adresser aux médias. On avait passé une journée ensemble à parler de la pratique de la communication. C'est un homme de vision. Il avait vu l'utilité de s'exprimer à travers les médias.»

- Robert Poëti, ministre des Transports et responsable de la région de Montréal.

«C'est un homme extraordinaire et charmant que j'ai rencontré à quelques reprises quand j'étais ministre de la Culture. Il était très proche de la population et près des gens. Il va nous manquer. Sa personnalité, très forte, était très attachante. C'était un homme d'une très grande simplicité.»

- Christine St-Pierre, ministre des Relations internationales et de la Francophonie.

«C'est un homme d'un grand coeur, mais surtout d'une grande intelligence. Je suis de la communauté anglophone et Mgr Turcotte était très apprécié de la communauté grâce à son intelligence et sa profondeur. Il me fait penser au pape actuel (François) avec sa proximité avec les gens ordinaires.»

- Kathleen Weil, ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion.

«Ce que je retiens, c'est son grand sourire et sa foi profonde. C'était un homme pleinement intégré dans la vie montréalaise. Un homme près des gens, près du peuple, qui vivait selon ses valeurs et qui était un modèle pour tous les Québécois. Il vivait en fonction de ses convictions, en paix avec lui-même.»

- Steven Blaney, ministre fédéral de la Sécurité publique.

«C'est un saint homme qui a fait beaucoup pour la communauté. Il mérite vraiment qu'on lui rende hommage. J'ai fait quelques collectes de fonds avec lui. C'est un saint homme. Un bon vivant. Je vais retenir sa bonté, son dévouement. Il a fait beaucoup pour la communauté.»

- Lino Saputo, fondateur de l'entreprise Saputo.