Le directeur général de l'Assomption, appelé à préciser des éléments de son témoignage vendredi auprès du procureur en chef, a dressé le portrait des événements entourant la suspension sans salaire, et sur le champ, de l'une de ses cadres, en août 2014. Selon lui, la conseillère en ressources humaines, Carole Harvey, a joué une «réelle pièce de théâtre». C'était le portrait du «dérapage d'une dame en crise», a-t-il dit.

«Elle criait, elle a crié, ça n'a pas de bon sens ! C'était un vrai show. Elle est allée dans le corridor, elle criait que ça n'avait pas de bon sens de la suspendre après 30 ans de service. Elle pleurait. Elle est allée dans la salle de bain, ensuite elle s'est enfermée dans son bureau. On a craint qu'elle détruise des documents, on a donc appelé la police pour l'escorter», a raconté Jean Lacroix devant la Commission municipale du Québec (CMQ).

La suspension sans solde avait été annoncée par le maire Jean-Claude Gingras, en compagnie de trois conseillers et du directeur général. M. Lacroix a expliqué que le maire, craignant pour les documents, a appelé la firme HDB Forensic, déjà chargée d'analyser le contenu de certains ordinateurs, pour savoir comment procéder.

«On lui a demandé de nous remettre son téléphone portable, ses clefs. Elle était hors d'elle même. On lui a demandé son code d'accès pour le cellulaire, on a eu droit à 30 minutes de refus. Ce n'est qu'une semaine plus tard qu'elle nous a donné le code», a déploré le directeur général.

Mme Harvey a été suspendue au départ pour avoir étiré sur plus de deux heures son heure de lunch. Par la suite, il y a eu filature, puis le maire a demandé un avis juridique au cabinet Dufresne-Hébert-Comeau.

«On colporte que Mme Harvey aurait transmis de l'information confidentielle au sujet du maire», a dit M. Lacroix, sans être en mesure d'en préciser la nature. À ce jour, elle est toujours suspendue, et sa réintégration n'est pas à l'ordre du jour, a-t-il dit. Sa plainte pour harcèlement sera entendue en même temps que celles d'une dizaine de cadres, au printemps, devant la Commission des relations de travail.

Enquête de l'Upac

Le directeur général est aussi revenu devant les juges sur les circonstances entourant son arrestation dans le cadre d'une frappe de l'Unité permanente anticorruption (Upac), pour entrave à la justice, l'été dernier. Il a affirmé que son arrestation découle des plaintes de son procureur à la cour municipale, Me Suzanne Dubé, et d'une greffière, à la suite de sa décision de ne plus recourir à des experts pour défendre les constats d'infraction remis par les policiers dans le cadre de l'opération «trompette». Mais aucune accusation n'a été déposée à ce jour. Me Dubé a été remerciée de ses services par l'Assomption. Après vérifications auprès de l'Upac, la porte-parole Anne-Frédérick Laurence a expliqué à La Presse que la preuve a été déposée par les enquêteurs au Bureau de lutte à la corruption et à la malversation (BLCM), où des procureurs étudient le dossier. Le BLCM a le mandat d'intenter des poursuites le cas échéant. Le maire Gingras est pour sa part accusé formellement d'abus de confiance.

Le maire aux urgences

Les témoignages ont été bousculés quand le maire Gingras, appelé à revenir devant la CMQ vendredi, pour parler de son enquête sur les cadres, a fait savoir par l'entremise de son avocat qu'il a dû aller aux urgences, jeudi soir. «Il avait le souffle court, on lui a passé des radiographies. Ce n'est pas beau. Il doit voir son médecin lundi matin», a expliqué son avocat, Me Pierre Éloi Talbot. En principe, le témoignage du maire doit reprendre mardi.