Alors que les enlèvements et les décapitations d'Occidentaux par des groupes islamistes font la manchette, La Presse a appris que 20 Canadiens ont été tués à l'étranger depuis le début de l'année et que 6 autres ont été enlevés.

Ces données, obtenues en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, recensent les événements rapportés aux autorités consulaires canadiennes entre le 1er janvier et le 4 août 2014.

Depuis 10 ans, le nombre d'enlèvements de Canadiens à l'étranger oscille annuellement autour de 20. C'est Haïti qui trône au sommet de ce sinistre palmarès. Pas moins de 46 enlèvements de Canadiens y sont survenus depuis 2004. Suivent le Mexique (28), le Pakistan (13), l'Irak (8), l'Afghanistan (7) et la Chine (7).

Les Canadiens ne sont toutefois pas la cible des mouvements islamistes. «La vaste majorité des enlèvements sont commis par le crime organisé, qui y voit une façon rapide de se faire des sous, estime Michel Juneau-Katsuya, ancien cadre et agent de renseignement du Service canadien du renseignement de sécurité. Au Mexique, il y a un enlèvement toutes les 15 minutes.»

L'expert donne l'exemple des «flash kidnappings», qui consistent à amener quelqu'un de force dans un guichet automatique pour lui faire vider ses comptes bancaires. «Depuis une vingtaine d'années, les enlèvements sont devenus un sport national à certains endroits», dit-il.

L'industrie minière canadienne, très présente sur la scène internationale, est aussi souvent prise pour cible. «C'est tellement rendu ordinaire pour [ces] entreprises qu'elles ne prennent parfois même pas le temps d'aviser le gouvernement canadien, explique M. Juneau-Katsuya. Elles font affaire avec des compagnies spécialisées dans la négociation de rançons».

Payer une rançon ou pas?

Si certaines entreprises le font discrètement, bon nombre de gouvernements disent refuser de céder au chantage.

Le ministère des Affaires étrangères du Canada a refusé notre demande d'entrevue, mais a indiqué par courriel que «l'approche du Canada en matière d'enlèvements respecte des principes fermes: pas de changement de politique, pas d'échanges de prisonniers, pas d'immunité aux poursuites et aucun paiement de rançons».

Il ne faut toutefois pas se leurrer, si des otages ont été libérés, «il y a sûrement quelqu'un qui a fini par payer», croit Michel Juneau-Katsuya.

Toutefois, les Canadiens pourraient à l'avenir être davantage victimes d'enlèvements à caractère politique depuis que le groupe État islamique a appelé à punir le Canada pour sa participation à la coalition qui veut l'éradiquer. «C'est un avertissement sérieux qu'il faut prendre au sérieux», affirme-t-il.

Meurtres: États-Unis et Mexique au sommet

Une trentaine de citoyens canadiens sont assassinés à l'étranger chaque année depuis 10 ans. C'est en Amérique du Nord que le nombre est le plus élevé, avec un total de 54 homicides aux États-Unis et 42 au Mexique. Les Philippines suivent avec 23.

L'Amérique centrale et les Antilles ne sont pas en reste, avec un total de 62 Canadiens tués depuis 2004.