La décision du gouvernement fédéral de créer de nouvelles peines minimales obligatoires risque d'augmenter de plusieurs milliards de dollars les coûts liés au système de justice criminelle sans pour autant réduire le taux de criminalité ou améliorer la sécurité publique, selon un rapport publié lundi par un groupe de défense des droits de la personne de la Colombie-Britannique.

Le rapport de l'Association des droits civils de la Colombie-Britannique soutient plutôt que des plus longs séjours en prison peuvent augmenter les risques de récidive quand un détenu est libéré, tout en touchant de manière disproportionnée des groupes marginaux.

Le rapport fait écho aux critiques qui ont suivi l'augmentation du nombre de peines minimales obligatoires. En moins de 10 ans, le gouvernement conservateur a doublé le nombre d'infractions auxquelles est associée une peine minimale afin de tenir ses promesses de combat contre le crime.

«La recherche démontre que les peines minimales obligatoires ne sont pas un outil efficace de dissuasion, elles n'ont aucun impact concret sur la réduction du taux de criminalité et ne font rien pour améliorer la sécurité du public», a déclaré l'auteure du rapport, Raji Mangat, lors d'une conférence de presse à Vancouver.

«Une peine juste et proportionnelle ne peut pas être standardisée.»

La recherche de Mme Mangat a même démontré que les contrevenants qui passent plus de temps en prison sont plus susceptibles de commettre un crime quand ils sont libérés.

Les conservateurs ont ajouté des dizaines de peines minimales obligatoires, qu'elles soient liées à la drogue, aux armes à feu ou à des infractions à caractère sexuel. L'Association du Barreau canadien a indiqué qu'il y avait maintenant au moins 57 infractions liées à une peine minimale obligatoire, alors que le chiffre était de 29 en 2005.

L'adoption de chaque nouvelle peine minimale obligatoire a provoqué des réactions négatives chez des groupes de revendication et des opposants politiques, qui ont averti le gouvernement fédéral qu'il allait dans la mauvaise direction.

Les gouvernements provinciaux, incluant ceux du Québec et de l'Ontario, ont aussi manifesté leurs inquiétudes entourant l'augmentation des coûts des tribunaux et des prisons provinciaux.

Adrienne Smith, de Pivot Legal Society, qui a participé à la publication du rapport, a déclaré que les peines minimales obligatoires éliminaient l'habileté des juges d'utiliser leur jugement afin de s'assurer que la peine était proportionnelle au crime.

«Les juges sont des experts, à l'avant-scène du milieu judiciaire, a-t-elle dit. Ils écoutent les preuves et ils sont les mieux placés pour évaluer les circonstances entourant l'offenseur et l'offensé afin de décider d'une peine juste selon les circonstances.»

Elle a également déclaré que les peines avaient un effet disproportionné sur les groupes comme les autochtones, les personnes atteintes de maladie mentale ou ayant des problèmes de dépendance, ainsi que les femmes.

Le ministre de la Justice, Peter MacKay, n'a pas voulu commenter directement le rapport.

Son attaché de presse, Clarissa Lamb, a fourni une déclaration par courriel afin de défendre les peines minimales obligatoires. Elle a toutefois ignoré les questions entourant le rapport de lundi. Elle a également rappelé que les gouvernements libéraux précédents avaient aussi instauré des peines minimales obligatoires pour certains crimes.

La Cour suprême du Canada doit tenir deux audiences sur des cas liés aux peines minimales obligatoires cet automne. Les cas sont liés à des décisions de la Cour d'appel de l'Ontario l'an dernier, qui a déclaré que les changements du gouvernement entourant les peines minimales obligatoires sur la possession illégale d'armes à feu étaient inconstitutionnels.