Plongée dans la tourmente, la firme de génie-conseil Dessau cherche à rebondir en faisant le pari d'une certaine transparence. La Presse a rencontré la vice-présidente principale et chef de l'exploitation, Isabelle Jodoin, pour aborder quelques dossiers.

Proximité politique, le modèle d'affaires

Quand, à l'automne 2007, le premier ministre Jean Charest prend la parole devant un parterre de politiciens et de gens d'affaires pour saluer les 50 ans de réussite commerciale de Dessau, le modèle d'affaires du génie-conseil ne fait pas de doute au Québec.

D'ailleurs, lors de cette soirée, Dessau lance un livre souvenir dans lequel le PDG d'alors, Jean-Pierre Sauriol, souligne les succès qui ne sont pas étrangers à ceux de ses clients. «L'histoire de Dessau est celle du Québec quand la Révolution tranquille lui faisait prendre les bouchées doubles», écrit M. Sauriol.

Les relations intimes entre décideurs publics et le monde de l'ingénierie prennent la forme, par exemple, de voyages, de billets de hockey et de bouteilles de vin. Depuis, les équipes de développement des affaires ont été démantelées, affirme Mme Jodoin.

Les gestes concrets du grand nettoyage

Pour se refaire une virginité, Dessau propose de revoir la composition de son conseil d'administration. Les cinq administrateurs de la firme partageraient ainsi l'exercice du pouvoir. Ils ouvriraient la porte à quatre membres indépendants pour insuffler de nouvelles façons de faire. Des comités de vérification et de gouvernance seraient également mis en place. Mais pour l'instant, il s'agit d'intentions.

De plus, Dessau a récemment ouvert une ligne de dénonciation interne. Pour assurer l'indépendance du processus et afin de rassurer les employés quant au fait qu'ils sont à l'abri de représailles, une firme privée administre la ligne téléphonique.

Le fédéral sur le radar

Jusqu'à maintenant, Dessau a été dans la ligne de mire de la police et de la commission Charbonneau pour ses contrats dans les municipalités et au gouvernement du Québec. Isabelle Jodoin ne nie toutefois pas que la façon de brasser des affaires de Dessau s'appliquait également dans les officines politiques d'Ottawa. Jusqu'à maintenant, le gouvernement fédéral a toutefois gardé ses distances du débat se déroulant au Québec.

C'est chose du passé, assure Mme Jodoin avant d'ajouter: «Quand on a un signal aussi puissant que celui qu'on a reçu en 2009 avec la création de l'escouade Marteau, les façons de faire ont complètement changé.»

Les pommes pourries

Dans sa course contre la montre pour éviter sa mise à mort, Dessau réagit promptement devant les problèmes qui se présentent dans ses rangs, affirme Mme Jodoin. «Au moindre indice, on agit», dit-elle en pointant en direction des départs successifs des dirigeants de la firme.

Ainsi, le vice-président Rosaire Sauriol a dû quitter l'entreprise après son passage remarqué à la commission Charbonneau et son arrestation dans le cadre du scandale du Faubourg Contrecoeur. Selon Mme Jodoin, il ne fait aucun doute que M. Sauriol était le «grand stratège», bien qu'il «banalisait» ses gestes devant le conseil d'administration. «C'était tellement présenté comme quelque chose sans importance. Ce n'était que du financement politique, nous disait-il», raconte-t-elle.