La guerre des motards fait rage à la fin des années 90, les morts s'accumulent et André Chouinard commence à avoir peur pour sa peau. Il s'arme, mais se tire accidentellement dans un pied. «Les armes, ce n'était pas pour moi. J'ai eu un garde du corps, mais pas longtemps.»

Chouinard est arrivé sur le tard parmi les Hells Angels, et il est peu connu. Il ne porte jamais ses couleurs, pour ne pas attirer l'attention, et n'a pas de tatouage.

Sa femme refuse de prendre la voiture en sa compagnie. Elle lui interdit de prendre leur fils à bord de sa voiture. Le couple utilise deux véhicules pour se déplacer.

C'est à ce moment que sa femme lui demande où ça va s'arrêter. «J'ai réfléchi et je me suis dit : Je m'en vais où? Ma femme avait raison.»

Chouinard commence à parler de retraite, mais ce n'est qu'en 2000, à son retour d'un voyage en Afrique, qu'un membre des Nomads lui annonce qu'il peut quitter le club.

«Mais tu ne dois plus jamais t'occuper de drogue», le prévient-il.

En exil

Mais Chouinard craint tout de même pour sa vie et fuit sur la côte ouest du Mexique pour se faire oublier en septembre 2000. Son plan prévoit que sa femme et son fils viendront l'y rejoindre et que la famille y restera deux ans. Il avait trouvé une école où l'enseignement se faisait en français, en anglais et en espagnol pour son fils, et il avait pris des arrangements avec son école du Québec pour suivre des cours par correspondance.

Sur place, Chouinard veut démarrer deux entreprises : un bureau de change, notamment pour blanchir les 600 000 $ qu'il a apportés avec lui , et un commerce de location de voiturettes électriques pour les touristes.

Mais en mars suivant, c'est l'opération Printemps 2001. Il fait partie des individus recherchés et la police sait où il se trouve. Il enterre une partie de son argent et revient à Montréal, où il changera cinq fois de logement et troquera sa Mercedes pour une bicyclette, pour ne pas se faire remarquer. Il est finalement arrêté en 2003 et condamné l'année suivante.

À la retraite

Avant de quitter les Hells Angels, c'est Chouinard qui contrôlait la fameuse cache d'argent de la rue Beaubien, perquisitionnée durant l'opération Printemps 2001. Il a raconté aux commissaires y avoir perdu 850 000 $, que le club ne lui a jamais remboursés.

Il a fait faillite et dit ne plus avoir un cent des 600 000$ qu'il avait apportés au Mexique. Une fois libéré, il veut suivre un cours de camionnage et vendre des voitures. Il est conscient que «redevenir l'homme qu'il était en 1993» ne sera pas facile. «Même si je me suis retiré, les gens croient encore que je suis avec les Hells Angels. Je suis marqué au fer rouge.»

« Il ne me reste que 62 000 $ de REER et mon honneur », conclut-il.

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Les commissaires refusent sa demande de libération

André Chouinard n'a pas convaincu mardi les commissaires aux libérations conditionnelles de lui permettre des sorties sans escorte.

Le détenu a effectué plusieurs sorties avec escortes depuis un an qui se sont très bien déroulées. Il demandait de pouvoir sortir sans escorte durant 72 heures par mois, pour voir sa famille, mais les commissaires Renaud Dutil et François Baron ont refusé.

Ceux-ci ont jugé que Chouinard manque d'empathie envers les victimes de la guerre des motards, qu'il s'est désaffilié des Hells Angels plus par crainte pour lui et sa famille que par une prise de conscience, et que son témoignage voulant qu'il ne lui reste plus rien des 600 000$ qu'il avait est difficile à croire.

Les commissaires demandent également que le détenu subisse une évaluation psychologique avant sa prochaine audience.

André Chouinard