Partager en France un nom, un livret de famille ou une déclaration de revenus sera désormais possible pour les couples homosexuels français qui se sont mariés au Canada.

Depuis la légalisation du mariage entre personnes de même sexe le 17 mai dernier, les mariages contractés par des couples homosexuels français à l'étranger sont reconnus en France, même si ce mariage a eu lieu avant l'entrée en vigueur de la loi.

Cela signifie que les couples homosexuels mariés au Canada pourront jouir en France des mêmes droits que les couples mariés.

Julien Finlay a organisé à Montréal les manifestations de soutien au mouvement français pour la légalisation du mariage gai en décembre et janvier dernier. Il explique que par le passé les couples mariés à l'étranger qui voulaient contracter un Pacte de Solidarité Civile en France devaient au préalable divorcer.

«La France reconnaissait le divorce entre personnes de même sexe», a dit Finlay.

Désormais, elle reconnaît le divorce, mais surtout le mariage entre personnes de même sexe.

Mais pour que le mariage soit pleinement reconnu en France, il est indispensable de faire transcrire l'acte de mariage étranger dans les registres de l'état civil français. C'est à ce moment que le couple se verra notamment remettre un livret de famille.

Cette transcription se fait auprès de l'autorité consulaire ou diplomatique compétente au regard du lieu de célébration du mariage. Il suffit qu'un seul des deux époux soit Français pour pouvoir faire reconnaître son mariage en France.

Avant cela, il faut s'assurer que le mariage soit valide au Canada. Un mariage qui ne serait pas valide ne peut pas être transcrit à l'état civil français.

Selon Jeffrey Talpis, professeur titulaire de la faculté de droit de l'Universite de Montréal spécialiste en droit international privé, si un des époux était domicilié à l'étranger au moment du mariage (qu'il soit venu uniquement pour se marier, par exemple), il se peut que la validité du mariage soit remise en question. Par conséquent la transcription en France ne serait pas possible.

Cependant un projet de loi fédéral (Projet de loi C-32 modifiant la Loi sur le mariage civil) devrait dans les prochains mois valider rétroactivement les mariages célébrés au Canada entre non-résidents. En effet le Canada souhaite assurer la validité des mariages entre non-résidents qui sont domiciliés dans des États où ils n'ont pas la capacité de se marier.

En devenant rétroactivement valides au Canada ces mariages pourraient également être transcrits en France.

En définitive, selon M. Talpis, les couples étrangers dont au moins un des époux n'était pas résident au moment du mariage pourraient devoir attendre quelques mois de plus pour faire transcrire leur mariage en France.

Au Canada, la procédure de transcription n'est pas encore mise en place. Le Consulat général de France à Montréal annonce sur son site internet être «en attente des instructions nécessaires à sa mise en oeuvre».

Mais d'ores et déjà, l'article 21 de la loi dispose que cette transcription se fera dans les mêmes conditions que pour les mariages hétérosexuels.

Cette simple mention va soulever de nombreuses questions.

Pour commencer, depuis 2006, les couples français qui souhaitent se marier à l'étranger doivent obligatoirement obtenir du Consulat un certificat de capacité. Le professeur Talpis soulève la question de savoir comment va être palliée l'éventuelle l'absence de ce certificat pour les couples de même sexe mariés avant le 17 mai 2013. Il pense que pour eux la transcription va être possible sans ce certificat.

Selon Christophe Arnaud, attaché de presse au Consulat de France à Montréal, bien que le décret ait été publié au Journal Officiel et que les arrêtés soient disponibles, le ministère des Affaires étrangères doit encore faire connaître les dispositions pratiques au réseau diplomatique et consulaire français pour l'ouverture de la transcription.

«Le fait qu'on ne soit pas encore autorisé à le faire n'est pas une question de principe, c'est une question de processus et de calendrier administratif de la mise en place des dispositions», dit M. Arnaud. «C'est une affaire de quelques jours, peut être d'une semaine ou deux».

Le Consulat de France publiera une annonce sur son site internet dès qu'il sera possible de faire des transcriptions. En attendant, le service notarial du Consulat conseille de commencer à constituer son dossier en suivant la procédure en vigueur pour les mariages hétérosexuels.