Les chiens de garde de l'intégrité ont certifié l'intégrité d'une firme lavalloise trois semaines avant que son propriétaire et dirigeant soit arrêté et accusé, jeudi, à Laval.

Ils veulent maintenant revenir sur leurs pas et réviser l'autorisation, a appris La Presse.

Guy Jobin, président et seul actionnaire de la firme LUQS, a été accusé d'avoir comploté pour commettre des actes de corruption municipale avec l'ex-maire de Laval, Gilles Vaillancourt. Le 19 avril, pourtant, l'entreprise figurait dans la première fournée d'entreprises ayant reçu leur feu vert de l'Autorité des marchés financiers (AMF), après vérification de l'UPAC.

Et l'intérêt des policiers envers Guy Jobin ne date pas d'hier. Une autre de ses entreprises, ÉquiLUQS, avait été perquisitionnée en novembre dernier par l'Unité permanente anticorruption (UPAC). ÉquiLUQS se spécialise dans le génie-conseil, alors que LUQS met en marché un logiciel d'évaluation de coûts pour l'industrie de la construction. Selon des informations obtenues par La Presse, des représentants de l'UPAC avaient aussi interrogé M. Jobin dans la cadre de leurs enquêtes.

»Exigences élevées»

La loi 1, sur «l'intégrité en matière de contrats publics», prévoit un pouvoir de refuser une autorisation à une entreprise qui «ne satisfait pas aux exigences élevées d'intégrité auxquelles le public est en droit de s'attendre».

«Ce test-là, il est général. Il vise toutes les entreprises, il donne une discrétion à l'AMF d'autoriser ou non une entreprise à «contracter»», avait indiqué le leader du gouvernement, Stéphane Bédard, lors de la présentation du projet de loi.

L'UPAC affirme plutôt que les critères de la loi l'obligent à s'appuyer sur des éléments plus solides - des condamnations ou des accusations - que la simple réputation d'une entreprise.

«Il faut au moins être poursuivi, être accusé, a assuré Anne-Frédérick Laurence, porte-parole de l'Unité. Il faut appliquer les critères de la loi, qui sont quand même assez précis.»

LUQS pourrait aussi avoir reçu un feu vert pour que M. Jobin ne se doute pas que l'UPAC était sur le point de l'arrêter, a laissé entendre Mme Laurence. «Nos enquêtes, il faut toujours bien les protéger», a-t-elle laissé tomber.

L'AMF dit ignorer pourquoi l'UPAC a évalué que l'entreprise de Guy Jobin méritait une approbation. «Je ne peux pas vous dire ce que l'UPAC a vérifié», a indiqué Sylvain Théberge, porte-parole de l'organisme.

Dans tous les cas, l'autorisation accordée à LUQS pourrait être annulée. «On est en train de réviser le dossier», a indiqué M. Théberge. Pour ce dossier, «c'est un processus qui va être court», a-t-il ajouté, en laissant échapper un petit rire. «Ça ne présume pas de ce qui va être rendu comme décision», s'est-il toutefois repris.

Guy Jobin n'a pas rappelé La Presse. L'homme d'affaires a dirigé le conseil d'administration de la Fondation de la Cité de la santé jusqu'en 2011.

Vendredi, La Presse a révélé que M. Jobin avait tenté de vendre ses logiciels à l'Unité anticollusion, lorsque celle-ci était encore intégrée au ministère des Transports.

«Principal responsable du développement d'affaires, il s'attire l'estime de tous, tant dans les secteurs gouvernementaux et municipaux qu'industriels», indique sa biographie sur le site de ses entreprises.