Un yacht acheté pour 4,3 millions par l'hôtel Le St-James de Montréal se retrouve au centre d'une nouvelle bataille entre le patriarche de la famille Rémillard et le fisc.

Le bateau, «utilisé par [la] clientèle la plus huppée» du luxueux hôtel, est tellement gros qu'aucune marina de la région ne dispose d'équipement assez fort pour le sortir de l'eau, selon la poursuite lancée par l'établissement et obtenue par La Presse. L'entreprise de Lucien Rémillard veut pouvoir comptabiliser les 200 000$ que lui coûtait l'entreposage hivernal de son yacht en Floride comme une dépense d'entreprise.

Revenu Québec, pour sa part, fait valoir que la dépense a été engagée à l'extérieur de la province et qu'on ne peut de ce fait en tenir compte.

Une bataille plus technique concernant des réclamations de centaines de milliers de dollars liée à la date de la vente du bateau oppose en outre l'hôtel Le St-James et Revenu Québec. La poursuite, datée du 27 décembre dernier, expose que le bateau aurait été vendu en juillet dernier, pour la somme de 450 000$.

Le yacht n'était pas à la portée de tout Montréalais qui se payait une nuit de luxe au St-James, indiquent les documents de cour.

Seuls «certains clients», qui paient «parfois jusqu'à 5900$ pour une nuitée», ont accès au bateau, en plus de recevoir les clés d'un véhicule pour se déplacer à Montréal.

Hôtel de grand luxe

Le St-James est l'un des hôtels les plus luxueux - sinon le plus luxueux - du centre-ville de Montréal.

«En plus d'une clientèle importante du domaine des affaires, l'hôtel St-James accueille des célébrités de renom, telles que Madonna, Céline Dion, Britney Spears, U2, Elton John, Mick Jagger et bien d'autres», décrit l'avocate de l'établissement dans sa poursuite contre Revenu Québec. «Ce grand hôtel est devenu une référence d'excellence en hôtellerie au Canada», écrit Tourisme Montréal dans ses brochures.

Selon le rôle foncier de la ville de Montréal, l'établissement valait 12,5 millions en 2009.

Plusieurs affrontements avec le fisc

Les Rémillard sont loin d'en être à leur première escarmouche avec le fisc, tant provincial que fédéral.

En 2009, la Cour d'appel fédérale avait obligé la famille à verser quelque 30 millions en impôts sur une transaction survenue entre une entreprise québécoise des Rémillard et une fiducie enregistrée à la Barbade, dont deux des bénéficiaires sont les fils de Lucien Rémillard.

La fiducie avait payé 200$ en 2002 pour deux gigantesques entreprises d'enfouissement, puis les avait revendues à une entreprise de la famille pour 145 millions en 2006.

La Cour suprême du Canada avait refusé d'entendre l'appel intenté par les avocats de la famille.

Puis, en 2011, la Cour canadienne de l'impôt avait condamné Lucien Rémillard à verser 1,6 million à l'Agence du revenu du Canada. Le tribunal avait jugé qu'un prêt consenti à l'homme d'affaires par sa propre entreprise puis rayé des livres ne pouvait être considéré comme une perte en capital aux fins de l'impôt.

Multimillionnaires

La famille Rémillard est bien connue dans le milieu des affaires québécois. Lucien Rémillard, son patriarche, a fait fortune dans le domaine de la gestion des déchets.

Il est l'unique actionnaire de Corporation Maybach inc., qui détient la propriété exclusive de l'hôtel Le St-James. Maybach inc. est aussi le promoteur des appartements de grand luxe Saint-Régis, aménagés dans un immeuble patrimonial tout près de l'hôtel.

Quant à ses fils Maxime et Julien Rémillard, ils tiennent le gouvernail de Remstar, une maison de production et de distribution de films. Les deux frères possèdent aussi le réseau de télévision généraliste V, qui a succédé à TQS.