Louise Harel et sa chef de cabinet Soraya Martinez, directrice générale de Vision Montréal au moment des faits, réfutent avec vigueur les propos de François Croteau.

«Absurde, s'insurge Louise Harel. M. Croteau savait dès le départ à qui il s'adressait et ne nous a jamais dit qu'il y avait un problème éthique.»

Ce sont d'abord des «citoyens montréalais» sympathisants du parti, avant d'être des gens d'affaires, qui ont payé 500$ pour intervenir lors du déjeuner-causerie du 7 juin 2011, affirme pour sa part Soraya Martinez. «Ils sont venus comme citoyens et non comme promoteurs, dit-elle. Ils ont échangé sur les problèmes vécus à Montréal notamment à cause de la non-harmonisation des règlements d'un arrondissement à l'autre.» Elle nie qu'il puisse s'agir d'une sorte de financement sectoriel.

Mme Martinez, qui a assisté à ces activités de financement, se souvient en revanche très bien du coup de gueule d'un des participants au déjeuner du 7 juin, comme l'a mentionné François Croteau. Selon elle, il s'agissait plutôt du «cri du coeur d'un entrepreneur prisonnier à l'intérieur de règles urbanistiques. C'est compliqué, à Montréal, alors que la ville a besoin de se développer.»

Mais jamais il n'y aurait eu de «pression» sur François Croteau pour l'inciter à être docile avec ces puissants donateurs. «Je n'y crois pas une seconde.»

Elle reconnaît toutefois qu'il pourrait y avoir infraction à la Loi sur le lobbyisme, «mais c'est un problème généralisé à la Ville», dit-elle.

Interrogé par La Presse, l'un des participants, Hugo Girard-Beauchamp, président de Maître carré, dit avoir participé au déjeuner à titre personnel et de sympathisant du parti. «J'ai écouté les discours et n'ai fait aucun lobbyisme.» André Coté, président du groupe AXXCO, présent aussi, n'a pas rappelé La Presse comme il l'avait promis.

La conscience tranquille

Benoit Dorais, maire du Sud-Ouest, a aussi la conscience tranquille: «On a échangé avec les entrepreneurs, ce sont des citoyens comme les autres, au même titre que la coiffeuse qui m'interpelle dans une file au IGA.» Contrairement à François Croteau, il ne voit aucun problème éthique à rencontrer des promoteurs à son bureau, à condition qu'il y ait transparence et mise en place de balises. «Il y a toujours un moment où on doit les rencontrer, ne serait-ce que pour arbitrer.»

En octobre 2009, Benoit Labonté, ex-lieutenant de Louise Harel, avait affirmé, peu après son départ précipité dans la foulée des révélations sur le financement de sa course à la direction du parti par Antonio Accurso, que Vision Montréal pratiquait ouvertement le «financement sectoriel». Ce mécanisme consiste à solliciter du financement auprès d'entreprises dans des secteurs d'activité précis, que ce soit la construction, le génie-conseil, les bureaux d'avocats, etc. Cette pratique ouvre la porte à l'usage de prête-noms, comme dans le cas d'Axor, mis à l'amende par le DGE en 2010.

Soraya Martinez soutient que son parti a récemment retourné des contributions à la suite d'un cocktail de financement parce qu'elles étaient jugées non «acceptables».

Au bureau du Directeur général des élections, qui aurait lancé une nouvelle enquête sur le financement du parti en 2009, on indique qu'il y a illégalité si les promoteurs et les entrepreneurs présents à ces cocktails se sont fait rembourser leurs dons de 500$ d'une façon ou d'une autre par leur entreprise. Le commissaire au lobbyisme annonce pour sa part qu'il va se pencher sur cette affaire de déjeuner-causerie rassemblant des promoteurs. Mais aucune «vérification n'a encore eu lieu à cette heure».