Loin du Vatican, Kahnawake a célébré dimanche la canonisation de Kateri Tekakwitha, qui est devenue la première sainte autochtone d'Amérique du Nord. Ce n'était peut-être pas aussi achalandé que pendant le pow-wow de juillet, mais il y avait du monde à la messe.

De mémoire de mohawk, il y a longtemps qu'on avait vu autant de gens à l'Église Saint-François Xavier, où sont conservés le tombeau et les ossements de Kateri.

Pour éviter les débordements, on avait même ouvert le gymnase de l'école en face, pour la retransmission sur grand écran de la canonisation et de la cérémonie.

«C'est plus gros qu'en 1980», a souligné M. Joe Delaronde, du Conseil de bande de Kahnawake en rappelant la béatification de Kateri par Jean-Paul II, il y a 32 ans. «Beaucoup plus gros».

Selon M. Delaronde, il y avait au moins 700 pèlerins dans les rues de la réserve, certains provenant d'aussi loin que l'Ontario, New York, Schefferville et la Californie. Du lot, beaucoup d'autochtones, mais aussi des latinos, des Philippins, des Haïtiens, des catholiques du Bangladesh et, bien sûr, beaucoup de canadiens-français.

C'est le cas de Francine Lambert, qui tenait à être sur place pour vivre l'événement. Pour cette grande croyante, qui avait fait le voyage de Sorel avec des Abénaquis d'Odanak, Kateri n'est pas seulement une icône amérindienne, mais une sainte pour tous les Québécois.

«On a tous du sang autochtone en nous, a dit Mme Lambert. Dieu a voulu qu'elle fasse l'union entre les catholiques et les autochtones.»

«Pour nous c'est une grande chef spirituelle», a ajouté Richard Moar, un Aikamekw de Manawan. Il est venu avec sa femme malade, dans le but de demander une guérison à sainte Kateri.

M. Moar sait bien que tous les Amérindiens ne partagent pas son point de vue. Il y a encore du ressentiment à l'endroit de l'Église. Mais il souhaite que la canonisation de Kateri mette du baume sur les vieilles blessures. «Ça va aider ceux qui ont encore de la colère à avancer dans la vie.»

Dans le gymnase de l'école Kateri, les gens ont applaudi en écoutant la retransmission de la canonisation au Vatican. Quelques minutes plus tard, la cérémonie officielle a débuté à l'église, sous l'oeil des multiples caméras.

La messe, semblable à celle qui sera donnée le 4 novembre à l'Oratoire, était officiée par Monseigneur Berthelet, ancien archevêque du diocèse de Longueil. Ses interventions étaient en anglais et en français, mais les chants étaient en mohawk.

Après la communion, les dignitaires sont allés se recueillir devant le tombeau de Kateri, récitant une nouvelle prière écrite spécialement pour la nouvelle sainte. Le reste de l'après-midi, les fidèles ont défilé à leur tour devant le tombeau pour rendre hommage à celle qui a attendu 332 ans pour être canonisée.

«Les yeux du monde étaient tournés sur nous aujourd'hui, a souligné Don Angus, un Mohawk de la réserve, préposé au stationnement de l'église. Ça n'arrive pas tous les jours. La dernière fois, c'était en 1990. Sauf qu'on avait des fusils. Pas des chandelles.»