Le gouvernement péquiste a congédié le patron de la Sûreté du Québec (SQ) huit mois avant la fin de son mandat, afin de régler des problèmes de communication entre les différents acteurs de la lutte contre le crime organisé. C'est ce qu'a expliqué le ministre de la Sécurité publique, Stéphane Bergeron, en entrevue avec La Presse.

Le directeur principal de la sécurité industrielle d'Hydro-Québec, Mario Laprise, succède donc à Richard Deschesnes, nommé en 2008.

«Le nouveau directeur a été très impliqué dans l'escouade Carcajou, qui nécessitait une étroite collaboration entre différentes entités chargées de lutter contre le crime organisé. Nous voulons imprégner cette culture», a dit M. Bergeron.

Il ne nie pas que les rumeurs de tensions entre la SQ, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) et l'Unité permanente anticorruption (UPAC) aient pu motiver sa décision. Il faut inculquer un «réflexe de collaboration», insiste-t-il. «On veut que les gens comprennent le message, à la fois à la SQ et dans les autres entités.»

Selon ce qu'a appris

La Presse, M. Deschesnes croit qu'il s'agit d'une décision politique d'un gouvernement qui recherche du changement.

Cette nomination en a surpris plusieurs, en commençant par le président du syndicat des policiers de la SQ, Pierre Veilleux.

«Surpris? Oui. Je ne l'ai pas vu venir. Pour moi,

M. Deschesnes a toujours fait un bon travail. Il a fait avancer plusieurs dossiers au sein de l'organisation», a-t-il affirmé.

«Il y a un nouveau gouvernement, il y a des nominations. [...] Sûrement que le Ministère a des raisons pour le départ de M. Deschesnes. Mais c'est une prérogative du nouveau gouvernement de choisir le directeur général de la SQ. M. Laprise aura toute la collaboration du syndicat des policiers pour faire son mandat», a soutenu le président du syndicat.

Qui est Mario Laprise?

Mario Laprise est directeur principal de la sécurité industrielle d'Hydro-Québec depuis mai 2005. Il était arrivé en poste deux mois après la diffusion d'un reportage de Radio-Canada qui démontrait des lacunes dans la sécurité aux barrages hydroélectriques Manic 5 et LG-2.

M. Laprise avait auparavant travaillé durant 26 ans à la SQ. Il a notamment été patron de l'escouade Carcajou, formée pour lutter contre les motards criminels.

«Il a une vision opérationnelle des choses pour la lutte contre le crime organisé. Il a aussi l'avantage d'avoir été à l'extérieur de la SQ pendant quelques années. Son regard externe peut être des plus bénéfiques», a observé le ministre Bergeron.

Selon nos sources, M. Laprise est aussi un ami du grand patron de l'UPAC, Robert Lafrenière.

«Pas le temps d'attendre»

Le mandat de M. Deschesnes devait prendre fin l'été prochain. Pourquoi ne pas l'avoir laissé le terminer? «On n'a pas le temps d'attendre. Il nous fallait le bon homme au bon moment au bon endroit pour lutter contre le crime organisé», a répondu le ministre.

M. Deschesnes continuera de recevoir son salaire jusqu'à la fin de son mandat. S'il le souhaite, on pourrait aussi lui confier d'autres mandats à la SQ.

Avant de devenir directeur général de la SQ, en juillet 2008, Richard Deschesnes était spécialiste des mesures d'urgence. En 2000, il avait été coordonnateur des opérations de sécurité au Sommet des Amériques à Québec.

«On semble douter de la loyauté de M. Deschesnes envers l'État», a dit le député libéral et ex-membre de la SQ Robert Poëti. Il ne comprend pas la décision rapide. «On va payer deux directeurs en même temps», s'indigne-t-il.