La Chine va changer. L'automne prochain, le Congrès national du peuple nommera ses nouveaux bonzes. Qui dirigera les destinées du pays le plus peuplé du monde, deuxième puissance économique mondiale, tiraillé entre l'héritage maoïste et l'appel du capitalisme? Regard sur les futurs poids lourds de l'empire du Milieu.

D'un côté, les «petits princes», fils de révolutionnaires de la première heure, devenus capitalistes par excellence. De l'autre, le clan de la Ligue de la jeunesse du Parti communiste chinois (PCC), qui veut raviver la flamme maoïste et égalitariste avec un mélange de protectionnisme et de programmes sociaux favorisant les pauvres et les fermiers ayant migré vers les grandes villes chinoises.

La guerre de succession fait actuellement rage, en sourdine, dans les hautes sphères de l'empire du Milieu.

L'enjeu: les neuf sièges du comité permanent du bureau politique du Congrès national du peuple, surnommé en Chine les «poids lourds». Le président et le premier ministre chinois font partie de ce comité permanent, mais doivent prendre les décisions importantes de concert avec les sept autres membres. Le nouveau comité permanent, qui siégera pendant cinq ans, sera connu l'automne prochain.

«On sait que Xi Jinping sera probablement le prochain président et que Li Keqiang sera premier ministre, à cause de leur poste actuel», explique Alice Miller, sinologue à l'Institut Hoover de l'Université Stanford et éditrice de la revue China Leadership Monitor. «Ils représentent deux tendances opposées. Il faudra voir combien de membres de leur faction respective ils pourront avoir au comité permanent.»

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Un processus opaque

Printemps > Sélection des 2270 délégués du 18e Congrès national du peuple.

Été > Réunion secrète du comité permanent du Congrès national du peuple dans la station balnéaire de Beidaihe, près de Pékin. Première sélection des candidats au bureau politique.

Automne > Deuxième réunion secrète du comité permanent, cette fois à Pékin. Sélection des candidats au bureau politique qui seront présentés au Congrès. Celui-ci élira les 25 membres du bureau politique et des 9 membres du bureau permanent.

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Li Keqiang, futur premier ministre > Actuel vice-premier ministre, il doit prendre la place de son patron, Wen Jiabao. Économiste aux moeurs frugales, il a centré sa carrière sur le développement des régions plus pauvres, comme le Hunan qu'il a dirigé, et l'enrichissement de la classe moyenne.

Wang Yang > Chef du PCC à Guandong, l'une des régions les plus prospères de Chine. Il s'est récemment illustré en permettant la tenue d'élections municipales relativement libres dans le village de Wukan, après des manifestations de citadins contre le chef actuel du PCC de Wukan, qui avait réquisitionné des terres controversées.

Xi Jinping, futur président > Actuel vice-président, Xi sera probablement le successeur de Hu Jintao. Son père a été le père de la première «zone économique spéciale» chinoise, consacrée exclusivement aux exportations dans les années 70. Exilée à la campagne durant la Révolution culturelle, sa famille était revenue en grâce avec la mort de Mao.

Bo Xilai > Après avoir ravivé les activités de propagande maoïste à Chongqing, Bo a promis de doubler la taille de la ville d'ici 2020, tout en améliorant les programmes sociaux. Ce souci égalitariste le place à la limite entre le camp des petits princes, auquel il appartient par son père, et celui de la Ligue de la jeunesse.

La Carla Bruni chinoise > Le prochain président chinois, Xi Jinping, n'a pas un charisme inné. Mais il est marié à une vedette de la chanson chinoise. Peng Liyuan, sa femme, est l'une des chanteuses étoiles de l'Armée rouge. Les médias français la surnomment la Carla Bruni chinoise. Elle chante au gala du Nouvel An de CCTV, télévision d'État, chaque année depuis 1982.