Un bris d'équipement aurait causé la mort du sergent Janick Gilbert, le 28 octobre dernier, lorsqu'il tentait de porter secours à deux hommes en détresse sur une banquise dans le Nord canadien. Les enquêteurs disent maintenant mener un audit complet du processus de sauvetage de l'armée pour déterminer si les sauveteurs disposent d'un matériel adéquat.

Dans leur rapport préliminaire rendu public hier, les enquêteurs constatent que la combinaison étanche utilisée par le militaire de 34 ans pour se protéger des eaux glaciales n'était pas «optimisée». La courroie retenant tout son matériel de survie a été arrachée lors de son parachutage, laissant le sergent Gilbert à lui-même pendant cinq heures dans une mer agitée, couverte de frasil et d'imposants blocs de glace.

«On sait que ses deux collègues ont survécu, mais pas lui. Nous devons savoir pourquoi», a indiqué à La Presse le major Bill Canham, responsable de l'enquête.

Jusqu'à présent, l'enquête s'est surtout penchée sur l'équipement du militaire, les enquêteurs ayant constaté que les trois sauveteurs parachutés portaient des combinaisons différentes. Les enquêteurs ont maintenant décidé d'élargir leurs vérifications. «On fait un audit sur tout, de l'entraînement des techniciens en recherche et sauvetage à l'équipement qu'il portait, en passant par la prise de décision d'effectuer un saut en parachute», a indiqué le responsable de l'enquête dont le rapport final doit être diffusé d'ici au mois d'octobre prochain.

Dangereux sauvetage

Le soir du 26 octobre dernier, un homme et son fils à bord d'une petite embarcation sont restés coincés sur une banquise à une trentaine de kilomètres d'Igloolik, dans le Nord canadien. Alertée par leur balise de détresse, l'armée a envoyé des secours le lendemain matin.Un premier avion Hercules dépêché sur place a largué un radeau de sauvetage sur lequel le duo en détresse a réussi à grimper. Alors que les conditions météorologiques se détérioraient et que la noirceur s'installait, l'équipage d'un deuxième avion envoyé sur place a constaté que les deux hommes semblaient inconscients, probablement déshydratés et en état d'hypothermie. À 17h33, trois sauveteurs ont décidé de sauter en parachute pour leur porter assistance.

Au moment du saut, la mer était balayée par de forts vents formant des vagues de deux à quatre mètres. Celles-ci ont rapidement gagné en vigueur pour atteindre jusqu'à neuf mètres, indique le rapport d'enquête. Du frasil et d'imposants morceaux de glace mesurant jusqu'à 1,5 mètre de largeur couvraient la surface de l'eau.

Pris dans ce dangereux cocktail météo, un seul des trois sauveteurs a d'ailleurs réussi à nager jusqu'au duo en détresse afin de lui prodiguer les premiers soins. Un deuxième militaire a tenté de se rapprocher du radeau de sauvetage, mais a fini par réaliser qu'il ne pourrait pas y arriver. Il a alors déployé son radeau de sauvetage personnel et s'y est réfugié jusqu'à ce qu'un hélicoptère vienne le chercher, quatre heures plus tard.

Chef d'équipe, le sergent Gilbert a toutefois été moins chanceux, amerrissant loin du radeau où prenaient place les deux hommes en détresse. Comble de malchance, la courroie qui retenait tout son matériel de survie a brisé durant le parachutage. Le militaire originaire de Baie-Comeau n'a donc pas pu compter sur son radeau de sauvetage pour s'extirper des eaux glaciales.

Privé de son matériel de survie, mais protégé par une combinaison étanche, le militaire avait une fenêtre de survie d'au maximum 1 heure 45 minutes, avance le Dr Ernest Prégent, urgentologue s'intéressant à l'hypothermie. Le médecin estime toutefois que l'homme risque de s'être noyé plus rapidement en raison des fortes vagues. Le corps du militaire a finalement été repêché cinq heures après son parachutage.