Le trafic de drogue est un secret de Polichinelle près de la statue de Sir George-Étienne Cartier. Les policiers ont beau multiplier les frappes et travailler les revendeurs au corps, ceux-ci finissent toujours par revenir.

«Les environs de la statue sont reconnus comme un endroit où se procurer de la drogue à Montréal. Et tant qu'il y aura des acheteurs, il y aura des vendeurs. C'est une roue sans fin», résume le commandant du poste de quartier 38, Stéphane Bélanger.

Depuis son entrée en poste il y a trois ans, ses troupes et lui travaillent d'arrache-pied pour mettre des bâtons dans les roues des trafiquants de la montagne.

Comme le mont Royal s'étend sur un vaste territoire, le commandant Bélanger partage la tâche avec son homologue du poste de quartier 20, le commandant Marc St-Cyr.

Pour eux, la chasse aux revendeurs est un éternel recommencement. «Chaque fois qu'on leur complique la vie, ils se déplacent ailleurs. Mon but est de faire en sorte que les citoyens ne se fassent pas importuner», explique le commandant Bélanger. C'est lui qui a mis au monde le projet Nuisance, nom donné à plusieurs descentes dans le parc Jeanne-Mance et autour de la statue.

Depuis le début de l'année, les policiers ont mené sept rafles qui se sont soldées par au moins une quarantaine d'arrestations, indique le commandant Marc St-Cyr.

La vente de drogue à la statue découle des séances dominicales de tam-tam à l'ombre du monument, une tradition vieille de 20 ans. Les policiers font leur possible. «Quand on a des plaintes, on envoie des policiers prendre le pouls. S'il y a trop de sollicitation, on donne un coup», explique le commandant Bélanger. Plusieurs de ces frappes ont lieu le printemps, afin d'envoyer un message aux revendeurs.

Techniques améliorées

Les nombreuses frappes policières ont forcé les trafiquants à raffiner leurs techniques de vente, observe la police. Les revendeurs ont tous un rôle à jouer, c'est ce qui complique le travail, admet le commandant Bélanger. «Personne n'a de grosses quantités, ils ont compris que c'est dangereux s'ils se font arrêter», raconte M. Bélanger, qui ne veut pas trop décrire le modus operandi des revendeurs pour ne pas nuire au travail des policiers.

Le commandant s'intéresse davantage à la provenance de la drogue écoulée aux pieds de la statue. «Les revendeurs se connaissent et travaillent ensemble. On ne sait pas si c'est plein de petits gangs ou si c'est une grosse organisation», explique le commandant Bélanger. «Il n'y a pas de membre de gangs de rue parmi les gens qu'on a arrêtés. Les personnes qui commandent utilisent des gens vulnérables, des nouveaux arrivants notamment», ajoute-t-il.

Mais peu importe sa provenance, la drogue arrive en grande quantité au parc, transportée par des individus en voitures, les loaders. Les revendeurs divisent la marchandise en plusieurs paquets répartis dans des sacs, ou alors la cachent dans le bois. Des revendeurs à vélo s'occupent aussi des livraisons à domicile dans le secteur.

Pour l'heure, les policiers font des rondes régulières dans le parc. On voit régulièrement des cavaliers trotter deux par deux sur leur monture. «Dans un poste de quartier comme le nôtre, les policiers sont très sollicités dans le centre-ville. C'est dans leurs temps libres qu'ils vont à la montagne», souligne le commandant du poste de quartier voisin, Marc St-Cyr. «On ne peut pas laisser deux policiers à la statue 24h sur 24, nous ne sommes pas des gardiens de parc», résume-t-il.