Alors qu'Hydro-Québec investit massivement et n'a jamais acheté autant de câbles, le nombre de ses fournisseurs au Québec diminue de façon alarmante.

La société d'État n'exporte pas que de l'électricité, elle exporte aussi des emplois, accusent les syndiqués de trois des fournisseurs d'Hydro, qui craignent pour leur avenir.

Les employés de l'usine de Prysmian, à Saint-Jean-sur-Richelieu, ceux de General Cable de Saint-Jérôme et de La Malbaie, et ceux de Nexans, qui a fermé ses portes, se retrouvent aujourd'hui devant le parlement à Québec pour demander aux élus de faire quelque chose pour eux.

«En période de crise, les Américains protègent leurs emplois avec le Buy American Act et nous, on laisse aller ça partout», déplore Daniel Roy, le directeur du syndicat des Métallos (FTQ) qui représente la plupart des travailleurs de cette industrie.

Parmi eux, les 200 travailleurs de Prysmian, à Saint-Jean-sur-Richelieu, sont particulièrement mécontents du fait que depuis qu'ils sont en grève, le 1er avril dernier, l'entreprise a continué comme si de rien n'était d'approvisionner Hydro-Québec à partir de deux autres de ses usines, en Ontario et en Caroline-du-Sud.

Pire, Prysmian, qui menace de fermer son usine de Saint-Jean, est en voie d'obtenir le statut de fournisseur accrédité d'Hydro pour ses deux usines, qui ont pris la relève de celle de Saint-Jean. La multinationale dont le siège social est en Italie pourra donc continuer de faire affaire avec Hydro, si elle met sa menace à exécution et ferme son unique au Québec.

Hydro-Québec affirme qu'elle achète en Ontario et en Caroline du Sud parce que tout délai dans ses approvisionnements risque de retarder ses projets d'investissement et en faire augmenter le coût. «Nous, on a des besoins, avec les projets qu'on a», a expliqué le porte-parole, Guy l'Italien.

Prysmian, comme tous les autres fournisseurs d'Hydro, doit s'engager à continuer à approvisionner la société d'État en cas de problèmes majeurs comme un incendie ou un conflit de travail, a-t-il précisé, et c'est ce que l'entreprise fait actuellement.

La procédure d'accréditation permanente en cours pour les deux usines de Prysmian en Ontario et en Caroline-du-Sud n'a rien à voir avec le conflit de travail, soutient Hydro. «Elle vise des produits qui ne sont pas fabriqués à Saint-Jean-sur-Richelieu», a assuré Guy l'Italien.

«Nous ce qu'on souhaite, c'est que le conflit se règle», a-t-il dit, en précisant que la politique d'Hydro est de favoriser les fournisseurs québécois.

Des fournisseurs «étrangers»

Cette politique n'a pas produit des résultats éclatants, du moins dans le secteur du câble. La liste des fournisseurs de câble d'Hydro-Québec, obtenue par les syndiqués en vertu de la loi d'accès à l'information, révèle que 10 des 17 usines qui approvisionnent la société d'État sont situées à l'extérieur du Québec.

À Saint-Jean-sur-Richelieu, l'usine de Prysmian pourrait fermer après 60 ans d'activités. General Cable, un autre fournisseur d'Hydro, a annoncé la fermeture temporaire de son usine de Saint-Jérôme (100 employés) et des négociations difficiles sont en cours avec les syndiqués de son usine de La Malbaie (aussi 100 employés).

Un autre fournisseur de câbles d'Hydro, Nexans à Québec, a fermé ses portes au début de l'année, laissant en plan une autre centaine d'employés.

Pour les syndiqués, Hydro ne peut pas se contenter de dire qu'elle ne s'immisce pas dans les négociations de ses fournisseurs avec leurs employés. «La moindre des choses, c'est de protéger les emplois qu'on a», affirme le porte-parole syndical, Daniel Roy.