Ce sont des briques Lego format géant, et de poids... plus que proportionnel, puisqu'ils sont en béton. Ces blocs modulaires empilables de 250, 500 et 1000 kg seront les cellules de base du futur mobilier urbain amovible du Quartier des spectacles.

Ce lest retiendra au sol les pièces mobiles qui servent au pavoisement, à la signalisation et au contrôle des foules durant les festivités.

Au fil des années, les différents festivals ont occupé des terrains vacants, en improvisant l'installation de leur équipement à grand renfort de vieux blocs de béton ébréchés et de poteaux dépareillés.

Mais ce cafouillis ne convient plus au nouvel aménagement de la Place du Quartier des spectacles, qui devient une manière de théâtre en plein air. «On cherche à le doter de nouveaux meubles qui seront à la hauteur des aménagements en cours de réalisation, mais qui seront aussi pratiques et fonctionnels pour les festivals», explique Stéphane Ricci, responsable du développement culturel du Quartier des spectacles. «Au départ, on a songé à des ancrages permanents au sol, mais la multitude de configurations rendait cette solution presque impossible.»

La recherche d'une solution globale a fait l'objet d'un concours de design annoncé par la Ville de Montréal, en juin dernier. Une dizaine de groupes ont répondu à l'appel de candidatures. Les cinq finalistes retenus par le jury ont chacun obtenu une bourse de 15 000$ pour mettre au point un concept.

La palme vient d'être accordée au projet du regroupement Morelli Designers&Signature design. Il se caractérise par ses blocs de béton blanc, aux arêtes adoucies, qui combinent des fonctions de lestage et de mobilier urbain.

Ces blocs en trois formats peuvent recevoir des fûts en aluminium qui serviront à l'affichage et à la signalisation. Ils peuvent être recouverts d'une surface de bois qui les transforme en banc.

Les blocs sont percés en leur centre d'une ouverture trapézoïdale qui évoque les diagonales caractéristiques de la Place du Quartier des spectacles. «Ces ouvertures centrales, où peuvent s'insérer les fourches du chariot élévateur pour le transport, ont particulièrement plu au jury», indique Mario Gagnon, président de l'Association des designers industriels du Québec et président du jury. Les fourches ne risquent plus ainsi de rayer le précieux granit qui revêt le sol de la Place.

Ce mobilier comprend également des barrières en acier pour le contrôle des foules. Leur cadre tubulaire est parcouru de fines diagonales, qui rappellent encore une fois le langage architectural de la Place. Les pieds, en retrait, ne nuisent pas aux jonctions à angle droit, au contraire des barrières actuelles.

Dans son ensemble, c'est un concept d'une grande simplicité technique et visuelle, a commenté Mario Gagnon - simplicité qui est toujours le fruit d'un long labeur. «Il a l'air bien simple de dire qu'on a choisi le béton parce qu'il se conjugue bien au site, mais on a d'abord envisagé des pièces rotomoulées en plastique, remplies d'eau ou de sable», décrit le designer Michel Morelli, pour illustrer l'éventail des solutions que son groupe a exploré. «On a dessiné des dizaines de barrières avant de revenir à quelque chose de plus conventionnel.»

Morelli Designers et Signature design ont consacré environ 550 heures à la préparation du concept. Les 15 000$ sont consommés depuis longtemps. Mais cette rémunération, même mince, a valeur de symbole pour les firmes de créateurs consultants. «Le concours est bien monté et bien structuré, les critères sont clairs et précis, le jury est solide», exprime Michel Morelli.

Cinq concours ont été prévus sur le même principe, pour la conception de divers éléments urbains qui justifieront, espérons-le, la désignation de ville de design accordée à Montréal par l'UNESCO. Le plus récent, dont les cinq finalistes ont été annoncés au début octobre, portera sur de nouveaux abribus pour la STM. À suivre.