Quoi, c'est bien vrai? Tout le pays se lève ce matin et voit que Montréal, frappé par les plus grands scandales des 50 dernières années, a réélu celui qui a présidé à ce dérapage?

Un homme qui a montré une propension ahurissante à s'entourer de fripons, d'aveugles volontaires et de courants d'air?

Il nous a donné la une de Maclean's avec le titre officiel de ville corrompue, il nous a valu un texte gênant de vérité dans The Economist sur le même sujet; bref, il a fait mettre bruyamment le bonnet d'âne sur Montréal.

Mais ce matin, il est encore le maire? Vox populi, dites-vous?

Attention, la voix du peuple ne dit pas exactement ça. La voix du peuple disait: Dehors! Mais dans deux directions opposées...

Gérald Tremblay n'a pas de quoi être fier.

Une majorité claire des Montréalais a voté pour quelqu'un d'autre. Mais surtout, cette majorité claire est en colère contre lui, contre son administration inepte et contre tout ce qu'il a laissé faire dans la métropole. Et je ne parle même pas de ceux qui ont voté Tremblay moins pour lui que contre les deux autres, c'est-à-dire par dépit, à reculons.

Au-delà de la division du vote, on ne peut pas imaginer de mandat plus faible pour le maire de Montréal. C'est une sorte de record historique.

Sans la discorde chez les adversaires, il n'avait aucune chance. C'est donc par une sorte d'accident historique qu'il se maintient au pouvoir, faible maire d'une ville qu'il a contribué à affaiblir.

Quelle chance il a eue d'avoir comme principale opposante une politicienne furieusement détestée à l'ouest du boulevard Saint-Laurent! Tellement qu'elle ne pouvait pas, à elle seule, malgré sa réputation d'intégrité et son intelligence, recueillir le trop-plein de l'écoeurement politique montréalais. Alors c'est l'improbable Richard Bergeron qui s'est mis à enfler démesurément, mais lui aussi incapable de s'imposer, parce que trop marginal, inquiétant.

Il n'y a pourtant pas de doute que Bergeron peut être un apport excellent dans un conseil municipal, au pouvoir ou dans l'opposition, dans la mesure où il est encadré. Autrement dit, cette opposition aurait pu faire bloc derrière une candidature unique. Mais ni Louise Harel ni personne d'autre ne pouvait prévoir que Bergeron irait chercher le quart du vote. Incapable de faire plus, il devenait un allié objectif de Gérald Tremblay...

Avec ou sans Tremblay, voici donc une métropole en panne politique au beau milieu d'une énorme crise de confiance. Comment avoir confiance dans la capacité de Gérald Tremblay de redresser cet hôtel de ville qu'il a laissé à tous les faiseux de structures parallèles? Comment penser qu'il ira changer les règles qu'il a laissées pourrir? Et s'il le fait, quelle crédibilité aura-t-il?

Ce qui justifiait une commission d'enquête est encore là, avec ou sans Tremblay, avec ou sans ménage. Mais comme Tremblay demeure le maire, ce qui risque de sortir au cours des prochains mois, à la faveur des enquêtes policières et journalistiques (attendons-nous à d'autres sorties spectaculaires), tout ça lui retombera inévitablement dessus... et sur Montréal.

Cette ville a maintenant un faible maire, élu faiblement à la tête d'une ville affaiblie. Et rien dans son discours d'hier soir ne nous laisse voir qu'il a compris le message. Cette ville n'est pas au bout de ses peines.

Longueuil: enfin

À Longueuil, on note avec grand intérêt que Caroline St-Hilaire est devenue maire. Les choses peuvent donc changer puisque Jacques Goyette signe la première défaite du parti qui dirige cette ville depuis 27 ans. Il pourra retourner au notariat et à ses affaires, qu'il menait avec brio encore tout récemment. Mais être impliqué aussi activement en affaires et si près de promoteurs de toutes sortes dans la ville dont on veut être maire n'est pas une très bonne idée.

Le retour du maire Leduc

Je ne peux pas m'empêcher de souligner le retour de M. Net, le très rigoureux Paul Leduc, à Brossard, après huit ans en retrait de la politique. Son retour sur la scène politique municipale est une bonne nouvelle pour toute la Rive-Sud.

Pour joindre notre chroniqueur: yves.boisvert@lapresse.ca