Le propriétaire du Café Cléopâtre, boulevard Saint-Laurent, a reçu la visite de Christian Yaccarini l'hiver dernier, bien avant que l'administration Tremblay ne donne son aval à sa participation au projet du Quadrilatère Saint-Laurent. Et bien avant que le projet ne soit soumis à des audiences publiques, au printemps dernier, et que l'idée d'exproprier fasse surface au conseil municipal.

Johnny Zoumboulakis a montré à La Presse l'offre de 1 million qu'il a reçue le 7 février 2009, signée par Christian Yaccarini. Elle a été préparée par le bureau de courtiers CBRE-Richard Ellis. La propriété est évaluée à 500 000$ au rôle foncier.

«Jamais personne de la Ville de Montréal n'est venu me rencontrer, explique M. Zoumboulakis. J'ai eu l'impression que l'administration municipale avait donné un fusil avec deux balles à M. Yaccarini, a-t-il raconté. Avec la première, il m'a dit d'accepter son offre d'achat. Et puis, comme j'ai refusé, il a utilisé l'autre balle en m'avertissant que de toute façon, je serais exproprié par la Ville.»

M. Zoumboulakis a finalement reçu, tel que l'avait prévenu M. Yaccarini, un avis d'expropriation lui offrant 875 000$ pour son terrain et son commerce, le 9 octobre dernier. Il n'a pas l'intention de céder. «Yaccarini tient le rôle d'un agent immobilier dans cette histoire. C'est incompréhensible.»

À l'endroit où se trouve le Café Cléopâtre, Christian Yaccarini projette de construire un édifice d'une douzaine d'étages, accueillant les bureaux administratifs d'Hydro-Québec sur 30 000 mètres carrés de surface. Un projet qui a été largement décrié lors des audiences, notamment pour l'architecture. Il affirme que les négociations avec la société d'État sont pratiquement achevées.

Déjà propriétaire de six lots sur dix dans le quadrilatère, la SDA espère annoncer prochainement l'achat de gré à gré de trois lots. Il restera la propriété de M. Zoumboulakis, dont les frais d'expropriation seront remboursés à la Ville, assure M. Yaccarini. «La Ville de Montréal a une garantie bancaire de 4 millions», dit-il.

Afin d'éviter un conflit d'intérêts, M. Yaccarini entend choisir la firme SNC-Lavalin construction, a-t-il ajouté. En effet, dans le cas de la construction du 2-22 Sainte-Catherine, la gérance du projet a été confiée au Groupe TEQ, dont le président-directeur général n'est nul autre qu'Emmanuel Triassi, membre influent du conseil d'administration d'Hydro-Québec. Ce dernier est aussi partenaire avec Christian Yaccarini dans les marchés publics des terrains Angus. Initiative dans laquelle SNC-Lavalin est aussi partenaire.

Quant au terrain du métro Saint-Laurent, vendu à Christian Yaccarini pour la somme de 2,9 millions alors que sa valeur marchande est évaluée à 4,3 millions selon les nouvelles règles d'urbanisme du quartier, les plans architecturaux n'ont pas encore été établis. Des pourparlers sont en cours pour accueillir les Ateliers de danse moderne (LADMMI), de même que le cinéma Parallèle. La SDA peut bénéficier d'une subvention de 1,2 million en vertu de la vocation culturelle.

Tout juste avant de démissionner, Benoit Labonté a demandé en vain au maire de vendre le terrain à sa pleine valeur. La Ville a fait volte-face en mettant le projet sur la glace, puis les élus ont approuvé la vente, une semaine plus tard, lors d'une séance spéciale du comité exécutif. Et ce, malgré un avis négatif du contentieux.