Le gouvernement fédéral ne doit pas aller «trop loin» dans l'encadrement des institutions financières canadiennes, a soutenu hier le président et chef de la direction de la Banque Laurentienne, Réjean Robitaille.

La compétitivité des banques canadiennes pourrait écoper si Ottawa décidait de relever ses exigences réglementaires en matière de capital de façon plus importante que les autres pays, a fait valoir M. Robitaille dans une allocution prononcée à la tribune de l'Association des MBA du Québec.

«Le danger, particulièrement au Canada, c'est d'aller trop loin, a-t-il déclaré. Quand il y a (...) un marasme (comme la récente crise financière), les gens se disent: bon bien là, on va mettre la ceinture, les bretelles et tout le tralala. Du point de vue de la réglementation, il va être important que les organismes donnent quand même la place aux banques pour pouvoir continuer de prêter, sans ça on se retrouverait potentiellement dans un scénario en L (lente reprise économique).»

Le dirigeant a notamment fait allusion aux ratios de capital de première catégorie que doivent conserver les banques. Les autorités internationales ont fixé le minimum à 4% alors qu'Ottawa à placé la barre à 7%. Or, la moyenne des banques canadiennes dépasse déjà les 10%.

Dans la foulée des recommandations adoptées récemment par les pays du G20, on s'attend à ce que les exigences de capital de première catégorie pour les banques soient relevées à l'échelle internationale au cours de l'an prochain. Les pays devront ensuite décider de quelle façon ils mettront en oeuvre ces nouvelles directives.

Au cours d'une rencontre avec les journalistes après son discours, Réjean Robitaille a dit «applaudir» les orientations du G20. Il a en outre affirmé qu'il ne s'attendait pas à ce que le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, cherche à «étouffer» les banques canadiennes en adoptant des règles plus strictes qu'ailleurs dans le monde.

Un resserrement excessif des exigences en matière de capital ferait augmenter le coût du financement pour les banques, a rappelé M. Robitaille.

Pas de résistance

Lundi, dans un discours percutant prononcé à Montréal, le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, a reproché aux institutions financières du monde de «résister» aux réformes commandées par le G20.

Réjean Robitaille a assuré que sa mise en garde ne devait pas être interprétée comme un signe de cette résistance, estimant de toute façon que le message de M. Carney s'adressait principalement aux banques étrangères.

Par ailleurs, dans la foulée des recommandations du G20, la Laurentienne s'apprête à modifier certaines de ses pratiques de rémunération à l'égard des négociants de marchés et de certains cadres, comme l'ont déjà fait plusieurs autres banques canadiennes, a indiqué M. Robitaille.

«On veut s'assurer que les intérêts des actionnaires soient bien en ligne avec les intérêts des employés et de la haute direction», a-t-il expliqué.

Le PDG a toutefois fait remarquer que la Banque Laurentienne se démarquait déjà de ses concurrentes en la matière, en refusant notamment d'offrir des options d'achats d'actions à ses négociants.

L'action de la Banque Laurentienne a clôturé à 38,94$ hier, en baisse de 0,2%, à la Bourse de Toronto.