Les doutes persistants envers la reprise économique s'alourdissent de jour en jour sur les Bourses mondiales, après des mois d'un vif rebond.

Encore hier, à la veille d'une mise à jour très attendue du produit intérieur brut (PIB) de l'économie américaine, les principaux indices boursiers ont subi une autre séance de baisse d'un à deux points de pourcentage.

Et chez la plupart des investisseurs, la même question: s'agit-il de la correction boursière que plusieurs appréhendent d'une semaine à l'autre, parce que le rebond depuis le creux de mars serait devenu exagéré par rapport à l'état réel de l'économie et des prochains résultats des entreprises?

«Tout le monde s'attend à une correction», a résumé Marc Pado, de la firme new-yorkaise Cantor Fitzgerald, à l'agence AFP.

«Le marché avait progressé grâce aux résultats des sociétés et à la baisse du dollar américain. Maintenant, on arrive à la fin de la saison des résultats et le dollar se reprend.»

Sur la Bourse américaine, hier, les deux principaux indices - le Dow Jones et le S&P 500 - ont subi des reculs respectifs de 2% et de 1,2%.

Il s'agissait de leur pire séance depuis le début du mois. En une semaine, l'indice S&P 500 affiche une baisse cumulative de 3,5%.

Au niveau mondial, les principales Bourses d'Europe ont subi leur pire séance baissière depuis quatre mois, avec des reculs d'au moins 2%.

En Asie, on s'attend ce matin à une autre glissade des principaux indices, en succession du recul limité autour de 1,5%, hier.

Au Canada, l'indice S&P/TSX de la Bourse de Toronto a reculé hier de 248 points, ou 2%, à 10 805 points.

C'était la quatrième séance consécutive de baisse pour le S&P/TSX, qui demeure très influencé par les titres liés aux matières premières et à l'énergie.

Or, ces titres ont été particulièrement malmenés ces derniers jours par les doutes résurgents sur la conjoncture économique.

«La Bourse canadienne reflète le sentiment envers la croissance de l'économie mondiale. Mais on doute de plus en plus que cette croissance ne soit pas encore au niveau que bien des gens espèrent» «, a commenté Cameron Webster, directeur de la firme d'investissement Sandstone Asset Management de Calgary, à l'agence Bloomberg.

«Les investisseurs boursiers devraient prendre le temps de mieux digérer la situation», selon M. Webster.

Parmi les facteurs baissiers, hier, les investisseurs ont été déçus de la chute inattendue des ventes de logements neufs aux États-Unis en septembre, après cinq mois consécutifs de hausse.

Par ailleurs, l'une des plus influentes banques d'investissement de Wall Street, Goldman Sachs, a révisé à la baisse ses attentes pour le PIB de l'économie américaine.

Banale de prime abord, l'abaissement de 3% à 2,7% de la prévision de croissance au troisième trimestre a suffi à stresser davantage les investisseurs boursiers qui doutent d'un redressement prochain des résultats financiers des entreprises.

Leurs doutes se fondent sur les résultats mitigés déjà annoncés depuis deux semaines par les entreprises, pour leur troisième trimestre.

Plusieurs entreprises ont déclaré des résultats nets (bénéfices ou pertes) moins mauvais que ce qui était prévu par les analystes qui les ont à l'oeil.

En contrepartie, ces résultats continuent d'afficher une faiblesse marquée au chapitre des chiffres d'affaires, qui sont les premiers témoins de la conjoncture.

Selon le stratège boursier Pierre Lapointe, à la Financière Banque Nationale (FBN) à Montréal, cette ambivalence des résultats d'entreprises demeure préoccupante.

«Nous gardons l'oeil sur les chiffres d'affaires», écrit-il dans le plus récent Mensuel boursier de la FBN, distribué hier.

«Les réductions de coûts dans les entreprises étaient une bonne chose, car elles les rendent plus productives. Mais une reprise durable ne se nourrit pas de compressions seulement. Il faut que les chiffres d'affaires augmentent.»

Cela dit, malgré le ressac boursier des derniers jours, Pierre Lapointe maintient ses cours cibles d'ici juin 2010: soit 1120 points pour l'indice S&P 500 de la Bourse américaine et 11 600 points pour l'indice S&P/TSX de la Bourse canadienne.

Si elles s'avèrent, ces cibles augurent d'un potentiel d'appréciation de 7% d'ici huit mois (hors devises).

Selon lui, après de fortes compressions des coûts par les entreprises, tout regain de leurs ventes aurait un impact immédiat sur le redressement de leur rentabilité.

Par conséquent, le repli momentané en Bourse pourrait s'avérer une occasion de rachat de titres bien ciblés par les investisseurs opportunistes.