Thomas Read Group, une société établie à Dublin, s'est transformée en une chaîne de plus de 20 pubs tandis que l'économie irlandaise connaissait un bel essor au milieu des années 1990. Mais à la suite de la chute des prix dans le secteur de l'immobilier et après que les buveurs eurent décidé de rester à la maison, les bars sont maintenant à vendre.

Un syndic de faillite, qui a le pouvoir de vendre des actifs pour recouvrer une dette, cherche des acheteurs pour neuf des bars les plus à la mode à Dublin. Parmi elles, on compte Ron Black's, où se trouvait le Champagne Bar au cours du boom économique, et le Harbourmaster, dans le quartier des affaires, à quelques minutes à pied des bureaux de Citigroup Inc. et de JPMorgan Chase&Co.

«La vente des pubs de Thomas Read constituera une épreuve décisive sur le marché», lance John Ryan, directeur des ventes d'hôtels et de lieux visés par une licence chez CB Richard Ellis Group Inc., à Dublin.

Dans un pays réputé pour sa culture du pub, l'industrie reflète les hauts et les bas de la situation économique en Irlande.

La valeur des pubs a explosé en Irlande au moment où le pays s'est transformé en l'un des plus riches d'Europe, alors qu'il était auparavant parmi les plus pauvres, les promoteurs s'arrachant des immeubles qu'ils ont rénovés pour étancher la soif des buveurs irlandais peu regardants à la dépense. Certains immeubles ont aussi été convertis en appartements.

Aujourd'hui, les courtiers immobiliers estiment que les prix des pubs ont chuté de quelque 40% tandis que l'Irlande a vu son marché boursier subir son pire effondrement de l'histoire moderne. Ainsi, l'indice boursier de référence ISEQ a chuté de 48% au cours des 18 derniers mois et le titre de C&C Group, un fournisseur de pubs et le fabricant du cidre Magners, a dégringolé de 37%.

«Au plus fort de la période de forte croissance économique [durant laquelle est née l'expression Tigre celtique], c'était tout autre chose et les mises aux enchères attiraient une foule d'intéressés pour le moindre pub qui avait du bon sens», raconte Aidan Heffernan, un spécialiste de la vente aux enchères de Sherry Fitzgerald Group, à Dublin. «L'époque sera bientôt révolue où on pouvait compter 15 ou 16 pubs dans une ville», ajoute-t-il.

Le mois dernier, M. Heffernan a vendu le pub Royal Denn à Athboy, une ville médiévale à une soixantaine de kilomètres au nord-est de Dublin, au prix de 470 000 (702 000$ US). Il y a six ans, les propriétaires avaient levé le nez sur une offre de 750 000 (1,12 million US), la qualifiant de trop peu généreuse.

La vente des pubs de Thomas Read et d'un restaurant fournira un meilleur indice de l'effondrement du marché, selon M. Ryan. Jusqu'à présent cette année, un seul bar de Dublin s'est vendu publiquement, dit-il.

Six pubs ont changé de mains l'an dernier, soit moins de 1% du nombre total d'établissements de ce genre, comparativement à 4,8% en 2006, à l'époque où plus de gens voulaient se lancer dans cette industrie, selon Morrissey's, la société qui s'occupe de la vente aux enchères des pubs de Thomas Read.

Cette dernière société, qui a commencé ses activités avec un pub en 1991, a demandé la protection de la cour contre ses créanciers en novembre de l'an dernier. Elle dirigeait 13 bars et restaurants à Dublin et aussi huit autres bars à l'aéroport de la ville.