Au milieu des années 60, le monde se met à changer. Le Canada aussi. Au Québec, le mouvement souverainiste prend de l'ampleur et s'organise. Parmi les membres de l'Ordre de Jacques-Cartier, des dissensions apparaissent. La section québécoise exige plus d'autonomie et plus de pouvoir. Certains demandent que le siège de l'organisation déménage d'Ottawa à Montréal, où ses membres sont plus nombreux. D'autres réclament que les femmes y soient enfin acceptées.

On remet aussi en question son caractère occulte, jugé désuet. D'autant plus que le journaliste et ancien «initié» Roger Cyr vient de dénoncer publiquement l'Ordre dans son livre La Patente, paru en 1964. Pour plusieurs, le temps est venu de mener une lutte ouverte et de s'afficher politiquement.

 

Dans ce contexte, l'Ordre de Jacques-Cartier cherche sa pertinence. Son secret a été éventé. Le Québec a pris son envol et n'a plus besoin des autres provinces. Y a-t-il encore de la place pour une organisation franco-canadienne? Visiblement pas. Fin février 1964, une résolution est adoptée pour dissoudre l'Ordre de Jacques-Cartier.

«Par sa doctrine et sa pensée, le séparatisme est venu brouiller les cartes, raconte Victor Paré, membre de l'Ordre de 1955 à 1960. C'était une pensée pour le Québec et le Québec seulement. C'est là que la chicane a pris...»

Ce fut la fin pour la Patente, mais pas nécessairement pour la cause. Car certains de ses membres poursuivront le combat autrement, que ce soit en politique (Claude Morin, futur péquiste), dans le syndicalisme (Michel Chartrand) ou dans différents organismes militants pro-francophones, que ce soit au Québec, en Ontario, dans les Maritimes ou les provinces de l'Ouest.

Au moment de sa dissolution, l'Ordre comptait près de 12 000 membres. Il en aura compté près de 70 000 au cours de ses 40 années d'existence.