Le juge Jean-Paul Braun a encore fait preuve d'une extrême magnanimité, hier, en reportant la cause de Mario Antonacci et Sylvia Gibb, un couple qui se prétend intouchable parce qu'il fait partie d'un vague mouvement ésotérique, le Sovran Nations Embassies of Mother Earth.

Le couple est accusé de voies de fait graves à l'égard d'une quinquagénaire qui a eu le bassin et un poignet fracturés. Depuis le début du procès, au palais de justice de Montréal, les accusés tentent d'imposer leurs propres règles au tribunal. Un jour, c'est Sylvia Gibb qui obtient de se coucher par terre dans la salle d'audience ou qui ne se présente pas. Un autre jour, c'est Mario Antonacci qui n'est pas là. Il y a quelques semaines, à un moment très important du procès, les deux ont brillé par leur absence, un geste tout à fait volontaire. À la suggestion du procureur de la Couronne, le juge Braun a alors décidé de procéder sans eux, comme le Code criminel le permet. Il a lancé des mandats d'arrêt contre les accusés et a dit qu'il rendrait jugement le 12 mai.

 

Le 12 mai, hier, Sylvia Gibb était de retour, mais pas Antonacci. Le juge a remercié la jeune femme de s'être présentée. Mme Gibb a expliqué ses absences antérieures par des problèmes de fibromyalgie et par le fait qu'elle était hospitalisée «à la campagne». Elle n'a donné aucune preuve et le juge ne lui en a pas demandé. Mme Gibb a aussi raconté que son conjoint ne venait pas au tribunal parce qu'il avait «failli se faire tuer la dernière fois». Elle faisait allusion au fait que les constables spéciaux avaient arrêté Antonacci. En réalité, c'était à la demande du juge, car l'homme s'apprêtait à quitter la salle d'audience en plein procès, parce qu'il prétendait que la cour n'avait pas juridiction sur lui. Le juge l'avait fait relâcher aussitôt qu'il avait été calmé.

Pas de jugement

En fin de compte, hier, le juge n'a pas rendu jugement, car il veut avoir Antonacci devant lui pour ce faire, a-t-il dit. «Je pensais qu'il aurait été arrêté», a-t-il ajouté.

Le magistrat semble par ailleurs disposé à rouvrir le procès, du moins en ce qui concerne Mme Gibb, car il a ordonné que les greffes fassent parvenir à l'accusée, dans les huit jours, l'enregistrement d'un témoignage qu'elle a manqué vu son absence. Il lui a conseillé de se trouver un avocat. Le couple en avait un, mais celui-ci s'est retiré après un certain temps en raison du comportement loufoque des deux accusés et du fait qu'ils ne collaboraient pas avec lui. Les accusés ont notamment envoyé toutes sortes de requêtes sans queue ni tête, dont l'une assignant le juge à comparaître dans leur logement de la rue Cadillac.

La suite du processus a été reportée au 27 mai.