Il y a eu 20 ans dimanche que Marc Lépine a fauché la vie de 13 étudiantes et d'une employée de l'École polytechnique de Montréal. Un millier de personnes se sont réunies à la basilique Notre-Dame, dimanche, pour honorer leur mémoire, mais aussi pour rendre un vibrant hommage aux femmes.

La cérémonie privée de deux heures a rassemblé les proches des victimes ainsi que d'anciens élèves et employés de l'institution.

«Il y a exactement 20 ans, 14 nouvelles se succédaient. Une à une, au compte-gouttes, annonçant chaque fois la fin du monde, 14 fins du monde», a raconté le frère de l'une des victimes de la tuerie, Donald Turcotte. «Ce jour-là, mon frère et moi venions de perdre notre soeur aînée, mes parents, leur seule fille. Le même drame est survenu dans 14 autres familles. Jamais on ne pourra s'en remettre. Annie, tellement belle, tellement intelligente.»

La question du registre des armes à feu -adopté en réaction à la tragédie de Polytechnique- a également retenu l'attention. Depuis son élection en 2006, le gouvernement conservateur a tenté, à trois reprises, de faire adopter un projet de loi pour éliminer les armes de chasse du registre. Celles-ci représentent 89% de son contenu.

«Il faut encore se battre aujourd'hui pour qu'il continue d'exister. De remettre en cause quelque chose qui a grandement contribué à diminuer le nombre de blessés et de blessures par balles au Canada me semble tellement illogique!» a souligné Jean-François Larivée, ancien conjoint de l'une des victimes, Maryse Laganière.

Sylvie, la soeur de Maud Haviernick, elle aussi morte sous les balles de Marc Lépine, abonde en ce sens.

«C'est déroutant. Les premiers à avoir déposé un projet de loi pour le contrôle des armes à feu étaient les conservateurs. Il est difficile d'expliquer un tel recul», a-t-elle affirmé en marge de la cérémonie. «Je pense qu'il faut redemander à la population canadienne de donner une voix à ce qui a été manifesté il y a 20 ans. Les gens veulent des outils pour favoriser la sécurité publique. Pas seulement des discours.»

Lors de la commémoration, l'Université de Montréal a remis un doctorat honoris causa à une ancienne étudiante de Polytechnique. Lili-Anna Peresa a été saluée pour son engagement à faire avancer la cause des femmes ici et ailleurs. C'est la première fois que l'École polytechnique propose la candidature d'une femme pour cet honneur.

Journée de commémoration

Plus tôt dans la journée, environ 500 personnes s'étaient massées à la place Émilie-Gamelin à l'invitation de la Fédération des femmes du Québec (FFQ). Elles ont formé une chaîne humaine afin de dénoncer la violence faite aux femmes et pour plaider en faveur de l'égalité des sexes. Quatorze banderoles blanches portant chacune le nom de l'une des victimes ont été suspendues au milieu du parc.

Plusieurs personnes ont également déposé des fleurs au pied du monument érigé près du campus de l'Université de Montréal, en hommage aux victimes.

La tuerie à Polytechnique a marqué l'inconscient collectif québécois. Le 6 décembre 1989, Marc Lépine a assassiné 14 personnes pour la seule raison qu'elles étaient des femmes. Au fil des ans, cette date est devenue la Journée nationale de commémoration et d'action contre la violence faite aux femmes.

«Il faut se rappeler des jeunes femmes qui sont mortes, mais aussi pourquoi elles ont été tuées. Elles ont été tuées par un homme qui leur en voulait pour leur avancement dans la société», a rappelé la présidente de la FFQ, Alexa Conradi. «Il faut également profiter de cette journée pour voir ce qu'il reste à changer. Les féministes sont encore au banc des accusés alors que les problématiques de violence faites aux femmes, la pauvreté et l'accès au pouvoir demeurent des problèmes très importants. Nous n'avons pas fini d'entendre parler d'égalité.»