Le premier ministre Stephen Harper est catégorique: les 2500 soldats canadiens présentement en mission en Afghanistan rentreront au pays en 2011. Pas question, donc, de prolonger une nouvelle fois cette mission qui a coûté la vie à 97 soldats canadiens jusqu'ici.En certifiant que les troupes canadiennes quitteront ce pays ravagé par des décennies de guerre en 2011, Stephen Harper tient à se prémunir de nouvelles attaques de ses principaux adversaires politiques à trois semaines du débat des chefs.

Le gouvernement Harper a déjà prolongé à deux reprises la mission des soldats canadiens dans la région de Kandahar en adoptant une motion à la Chambre des communes et chaque fois il l'a fait avec l'appui de députés libéraux. En mai 2006, la mission a été prolongée jusqu'en février 2009. En mars dernier, la mission a de nouveau été prolongée jusqu'en février 2011.Au cours d'un point de presse informel avec des journalistes, hier, M. Harper a tenu à couper court aux supputations selon lesquelles les troupes pourraient demeurer plus longtemps en Afghanistan. Seuls des travailleurs humanitaires pourraient y rester au-delà de cette date.

«Le Canada aura une certaine présence en Afghanistan après 2011, mais j'anticipe que ce sera davantage un rôle de développement et de reconstruction, a affirmé le premier ministre. À ce point-là, nous avons l'intention de mettre un terme à la mission telle qu'on la connaît.»

M. Harper a précisé que l'objectif de la mission canadienne était de permettre au gouvernement afghan de s'occuper de sa propre sécurité. «S'il faut maintenir le même niveau de troupes canadiennes en Afghanistan après 2011 ««, alors nous n'aurons pas réussi. Et nous devons réussir», a-t-il ajouté.

Les chefs des trois autres partis politiques n'ont pas tardé à réagir aux propos de M. Harper.

Le chef du NPD, Jack Layton, qui réclame le retrait immédiat des soldats canadiens, a dit ne pas croire en la parole du premier ministre. Selon le leader néo-démocrate, M. Harper a fait cette déclaration uniquement pour calmer les inquiétudes des Canadiens en pleine campagne électorale. «Je ne crois pas que l'on puisse faire confiance à M. Harper et croire ce qu'il dit au sujet de cette mission en Afghanistan. J'ai le pressentiment que l'on ne peut tout simplement pas faire confiance à ce premier ministre qui a déjà dit que l'on aurait dû intervenir en Irak et qui a élargi continuellement notre mission militaire en Afghanistan», a dit M. Layton, de passage à Oshawa, en Ontario. Le NPD est le seul parti aux Communes qui réclame le retrait des troupes immédiatement.

Le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, qui exige que la mission prenne fin en février 2009, a affirmé que M. Harper semble avoir saisi l'ampleur de l'opposition à cette mission au pays. «Je pense qu'il commence à comprendre qu'il y a un fort mécontentement au Québec et au Canada sur cette question. Et là il tente de s'en sortir. Mais je n'ai pas plus confiance dans cet engagement que dans l'engagement de déclencher des élections à date fixe, que dans l'engagement d'être un gouvernement propre. Il a rompu ses promesses en cours de route. Alors je n'ai pas plus confiance dans celle-ci, qui n'est pas très explicite d'ailleurs. Il dit ça, mais on verra bien», a dit M. Duceppe, de passage à Sainte-Cécile-de-Milton, dans la circonscription de Shefford.

Le chef du Parti libéral Stéphane Dion a affiché le même scepticisme. M. Dion a dit ne pas croire que M. Harper tiendra parole. Il s'est dit convaincu que son adversaire conservateur agit de la sorte parce qu'il sait que les Canadiens souhaitent la fin de la mission afghane.

Devant les journalistes, M. Harper a pour sa part admis que la mission en Afghanistan est indubitablement le dossier le plus difficile à gérer.

«Je dois téléphoner chaque famille lorsqu'il y a un décès en Afghanistan et c'est évidemment quelque chose de très difficile», a-t-il confié. «Je dois avouer que les premières fois que nous avons perdu des soldats après que j'ai eu des conversations avec les familles, j'ai pleuré, a-t-il confié. Évidemment, avec le temps, on gère mieux les émotions.»

Questionné pour savoir s'il serait prêt à envoyer ses propres enfants au front, il a répondu que ce serait éventuellement leur choix. Le chef conservateur a une fille et un garçon qui ont respectivement 9 et 12 ans.

M. Harper sera à Montréal aujourd'hui. On s'attend à ce qu'il revienne sur le thème de l'unité nationale, qu'il déjà abordé à quelques reprises depuis le début de la campagne.