Même si une trentaine d'usines illégales de fabrication de cigarettes ont été identifiées dans des réserves autochtones de Kahnawake, d'Akwesasne et des Six Nations, au Québec et en Ontario, la Gendarmerie royale du Canada n'est parvenue à en faire fermer qu'une seule au cours des deux dernières années.

Le problème est qualifié de «politiquement sensible». L'inspecteur Derek Simmonds, qui est à la tête de la sous-direction des douanes et de l'accise, souligne que l'intervention de corps policiers extérieurs dans certaines communautés est délicate. La GRC ne peut agir isolément, mais doit plutôt le faire en partenariat avec les policiers des réserves, dit-il.

Un policier des Six Nations affirme que la police de la réserve ne porte pas d'accusations contre les fabricants de cigarettes illégales parce qu'on considère qu'il s'agit d'une question de taxation, et que cela ne relève pas des services de police.

Le lien croissant entre les cigarettes illégales et certains territoires habités par des autochtones constitue un problème épineux pour les instances chargées de faire respecter la loi, à cause de conflits entre la loi canadienne et les questions de souveraineté autochtone et de taxation, et des droits traditionnels des premières nations en matière de tabac.

La contrebande inclut tout produit du tabac qui n'est pas conforme aux lois fédérales et provinciales, tant en ce qui concerne l'importation, l'estampillage, l'étiquetage et le paiment des droits et taxes requis.

Près d'une cigarette sur trois fumées au Québec et en Ontario provenait de la contrebande, l'an dernier, selon une étude reconnue, et plus de 90 pour cent de ces cigarettes illégales étaient issues de réserves autochtones.

Enrayer la contrebande de tabac est devenue une priorité pour la GRC comme pour l'Agence du revenu du Canada, l'Agence des services frontaliers du Canada et le ministère fédéral des Finances.

Le problème coûte jusqu'à 4 millions $ par jour aux gouvernements canadiens en revenus de taxes impayées. Et la situation est loin de s'améliorer, au contraire, selon toutes les estimations.

L'an dernier, la GRC a saisi l'équivalent de plus de 123 millions de cigarettes illégales, un record pour la GRC. Or juste pour les six premiers mois de 2008, les services de police ont confisqué environ 69 millions de cigarettes illégales.

Toute la contrebande de tabac n'est pas associée aux territoires des premières nations, cependant. On assiste aussi à une hausse des produits illégaux de tabac importés de Chine, selon l'Agence des services frontaliers du Canada, et à une augmentation du recours aux livraisons de tabac par la poste et les services de messagerie.

Par ailleurs, plus de 150 groupes associés au crime organisé sont impliqués dans le trafic de tabac, estime la GRC.